Nice-Matin (Cannes)

«Pas vraiment d’astreinte ce soir-là »

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Guilaine Debras, maire de Biot depuis mars 2014, a accepté notre interview, dans laquelle nous lui avons exposé les éléments de notre enquête. Elle a souhaité faire une déclaratio­n préliminai­re que voici in extenso : « J’ai choisi d’informer mes administré­s de ma mise en examen, consécutiv­e aux inondation­s du 3 octobre 2015. Soumise au secret de l’instructio­n, je réserve mes déclaratio­ns à l’autorité judiciaire, la justice ayant besoin de sérénité pour exercer son ministère. Le respect le plus élémentair­e dû aux victimes et à leurs proches commande ce silence. Je reste à la dispositio­n de la justice dans sa quête de vérité, celle que nous devons aux victimes. La population biotoise peut compter sur ma parfaite transparen­ce dans cette affaire dramatique dont l’analyse a posteriori doit être menée avec sérieux et circonspec­tion.»

Cette convention dévoilée par Nice-Matin indique qu’un policier municipal devait être dépêché à la maison de retraite. Vous connaissez ce document ? Oui.

Était-il intégré au Plan communal de sauvegarde qui régissait l’attitude à adopter en cas de catastroph­e ? Oui. Il était intégré à tous les documents qui évoquaient les établissem­ents recevant du public.

Ce jour-là, un policier municipal a-t-il été envoyé sur place pour alerter ? Nous sommes là au coeur de l’enquête. Je ne répondrai pas.

Vous ne voulez pas confirmer que la mairie a agi ce jour-là en ce sens ? (…) Ce document interroge… La grande différence, c’est qu’entre ce moment et le  octobre , les bassins de rétention avaient été construits.

Lors de l’annonce de votre mise en examen, vous avez dit « J’ai fait ce qu’il y avait à faire. »

Mais qu’est-ce qui a été fait ? J’ai dit que j’avais fait ce que j’avais à faire, en fonction des informatio­ns dont je disposais.

Selon nos informatio­ns, vous avez été prévenue par le système d’alerte officiel Viappel à  h , et vous avez validé la réception à  h . Le confirmez-vous? Oui. Qui reçoit l’alerte ? Le maire, l’adjoint en charge des risques naturels, la directrice générale des services, la police municipale et la personne désignée pour s’occuper des risques naturels.

Tous ont validé l’alerte ? Oui. Pour certains, on travaillai­t même ensemble à ce moment-là.

Qu’est-ce qui a été fait ensuite ? Nous sommes là dans le secret de l’instructio­n.

D’après nos informatio­ns, la première interventi­on recensée de la part de la mairie est à  h . Selon une source proche de l’enquête, vous êtes décrite comme « apathique » ce jour-là. C’était le cas ? Vous imaginez bien que je n’ai pas rien fait. Je n’ai pas été apathique du tout ! J’ai cherché à m’informer. Ce n’est pas si souvent qu’on est en vigilance orange. Lors de la dernière, en , il pleuvait beaucoup et j’étais restée au bureau jusque très tard. Selon ce qui était indiqué dans le Plan communal de sauvegarde.

Le poste de commandeme­nt communal n’a été mis en place qu’à partir de  h . Vous confirmez? Oui.

Je repose la question : des choses ont-elles été mises en oeuvre avant  h  ? J’ai eu certaines informatio­ns et j’ai agi en fonction. J’ai transmis ces éléments de décision aux enquêteurs.

Des communes comme Antibes ont agi, ce jour-là, avant midi. Comment l’expliquer ? Antibes dispose d’un service de sécurité civile. À Biot, la sécurité civile, c’est quasiment le maire, sa police municipale et un ingénieur risques naturels. Sur des communes plus petites, on n’a pas les mêmes moyens, mais la même demande de résultat.

Aviez-vous conscience du danger au moment où vous validez l’alerte ? Dès mon élection j’ai voulu travailler sur la culture du risque. Nous nous sommes formés et avons fait des exercices pour former la population et les établissem­ents recevant du public. Consciente du danger, alors oui, cela fait partie de ma culture (...)

Vous sentez-vous une part de responsabi­lité dans ce drame ? Je me sens responsabl­e dans le sens « responsabl­e mais pas coupable ». Mais je n’ai pas le sentiment d’avoir fait quelque chose que je n’aurais pas dû faire.

Comment expliquer que, ce soir-là, vu l’imminence ou la possibilit­é du danger, vous soyez au Festival du livre de Mouans-Sartoux et que votre responsabl­e des risques naturels soit au match à Nice ? Je pourrais dire des choses, mais je ne veux pas lancer de polémique là-dessus.

Selon nos informatio­ns, l’astreinte ce soir-là pose problème. Votre cadre «risques naturels» nous indique que ce n’était pas lui. Qui l’était ? Le problème, dans ce Plan communal de sauvegarde, c’est qu’il n’y avait pas vraiment d’astreinte. (Embarrassé­e). Cela fait partie des choses qu’il fallait qu’on mette en place.

Il n’y avait personne de nommément d’astreinte ? Dans ce Plan, il y avait des choses qui fonctionna­ient par habitude.

Y a-t-il eu des défaillanc­es ce soir-là? Je ne dirais pas des défaillanc­es, je dirais qu’il y a des zones de flou qui (Ellede flou, étaient... reprend)oui, dansquiIl y avait n’étaientce Plan des zonespas… communalqu­e vous avezde sauvegarde­quelqu’un qui qui vousfait dit, d’astreinte« moi, ».je n’étais pas Qui L’instructio­nest responsabl­ele définira. de ce flou ?

Qui communalme­t en de oeuvre sauvegarde­le Plan ? Vousdes opérations­êtes bien responsabl­ede secours ? C’est Mais moi,le maire j’en n’estsuis responsabl­e.pas un spécialist­eJ’ai encore beaucoupde la sécurité.de choses(…) à dire, à cette étape de l’enquête.

Selon nos informatio­ns, les sirènes auraient été en panne depuis le mois d’août et devaient être réparées en décembre. C’est exact ? J’avais signé un marché de changement car les sirènes ne fonctionna­ient pas bien.

Elles ne fonctionna­ient pas ou pas bien ? (Longue hésitation) Il fallait les changer. Elles avaient un fonctionne­ment aléatoire.

Elles ne devaient donc être réparées qu’en décembre ? C’est ce que j’avais signé.

Selon nos informatio­ns, votre police municipale aurait soustrait des documents à l’enquête. C’est ce qui m’a été dit. Je n’ai pas à commenter.

Vous leur avez posé la question ? Non, je ne mène pas l’enquête auprès de mes services.

Tout a-t-il été fait pour la manifestat­ion de la vérité ? Ce sera aux enquêteurs de le déterminer. Je n’ai pas de déclaratio­n à faire là-dessus. Vous imaginez que j’irais vérifier cela auprès de mes services ? Si des choses n’ont pas été faites, le juge tranchera.

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