Frédérique Vidal, «pur produit de l’université de Nice» Les réactions
Novice en politique, la nouvelle ministre de l’Enseignement supérieur est en revanche rompue aux campagnes électorales qui l’ont conduit des bancs de la fac à la présidence de l’université
53 ans, l’Azuréenne Frédérique Vidal décroche donc un poste au gouvernement. Non pas un strapontin de secrétaire d’État, mais un portefeuille à part entière. L’Enseignement supérieur, la Recherche et l’Innovation, généralement rattachés à l’Éducation nationale, auront leur propre ministère. Ce qui, plus encore que sa propre nomination, ravit la présidente de l’université de NiceSophia Antipolis qui vient donc d’en hériter. Elle, l’enseignante, qui n’avait jusque-là jamais fait de politique. Tout au moins en dehors des instances universitaires dont elle a su gravir tous les échelons au cours de sa carrière professionnelle.
D’étudiante à présidente
Car Frédérique Vidal est, comme elle se plaît à le dire elle-même, « un pur produit de l’université de Nice». Née à Monaco, elle a fait l’essentiel de ses études dans la capitale azuréenne. Après un bref passage par Paris – le temps de décrocher à l’Institut Pasteur un diplôme d’études approfondies (DEA) option virologie fondamentale –, c’est sur ses terres natales qu’elle revient soutenir sa thèse. Docteur en sciences de la vie, chercheur spécialisé en génétique moléculaire, elle est recrutée comme maître de conférences par
Comment accueillez-vous cette nomination ?
Je suis très honorée d’avoir été choisie comme ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation. En tant que membre de la société civile, je crois que le Premier ministre et le président de la République ont cherché, par ce grand ministère, à faire en sorte que des gens qui ont été aux manettes des universités puissent répondre aux défis qui attendent l’université du XXIe siècle. C’est en tout cas ce à quoi j’essaierai de m’employer.
Comment ça s’est fait ?
On est contacté. Il y a des discussions sur les idées, les projets que l’on porte. Et voilà. Ensuite, on accepte ou on refuse. J’ai accepté et j’en suis, encore une fois, très fière, et très honorée que l’on ait pensé à moi pour ce poste.
On a un peu eu l’impression que ce gouvernement s’était constitué dans les dernières heures. En fait, les choses étaient préparées bien en amont ?
Évidemment qu’un gouvernement ne se fait pas dans la précipitation. l’université de Nice-Sophia Antipolis en 1995. Nommée professeur en 2004, elle prend la direction du département des sciences de la vie dès l’année suivante. En 2009, c’est désormais la faculté des sciences dans son ensemble Ce sont des choses qui se discutent et qui se réfléchissent.
Quelles seront vos priorités ?
Je suis, d’abord, extrêmement contente qu’un ministère à part entière soit consacré à l’enseignement supérieur, à la recherche et à l’innovation. Je crois que cela répond à une véritable attente de l’enseignement supérieur. En tout premier lieu, je vais rencontrer mon prédécesseur, prendre en compte les dossiers en cours et puis fixer, lors du premier Conseil des ministres, les grands chantiers que j’aurai à mener.
Vous avez sans doute déjà une petite idée de ce que vous voulez faire ?
Rencontrer, écouter et puis fixer un objectif qui est très clair. Celui de remettre la recherche et l’université française dans la compétition internationale. Veiller en même temps à l’accueil des étudiants. Veiller aussi à ce que les moyens donnés aux universités leur permettent d’avancer, que ceux alloués aux organismes de recherche nous permettent de rester parmi les toutes premières puissances en matière d’enseignement qu’elle dirige… Et finalement toute l’université de Nice-Sophia Antipolis en 2012. En regardant sa trajectoire professionnelle, le moins que l’on puisse dire, c’est que Frédérique Vidal ne se perd pas en fioritures. C’est d’ailleurs un trait de caractère chez cette femme, mère de deux enfants, décrite comme « redoutablement efficace ».
L’excellence comme label
Elle préfère faire que faire savoir. C’est un peu l’anti bling-bling, capable de délaisser les ors du château Valrose au profit du gymnase de la fac de sciences pour présenter ses voeux au corps professoral. La boîte semble lui importer moins que ce qu’elle contient. Ce qui, au passage, lui vaut quelques coups de griffe de son prédécesseur, qui lui reproche d’avoir abandonné le plan bâtimentaire qu’il avait arrêté pour construire les nouveaux campus de la Côte d’Azur. Frédérique Vidal, elle, vise un tout autre objectif, et l’obtient en décrochant en 2016 le label «Initiative d’excellence». A la clé: un capital de 580 millions d’euros alloué à l’université azuréenne pour développer l’enseignement, la recherche et l’innovation. Précisément ce qu’on lui demande aujourd’hui de faire à l’échelle du pays ! supérieur. Et puis, il y a l’innovation. C’est quelque chose qu’il va peut-être falloir travailler plus avant. On sait que la France est excellente en matière de production scientifique, mais qu’on a dans le même temps un déficit en matière de transfert et d’innovation. Il y a donc beaucoup à faire sur ces sujets-là.
Cela doit-il passer par une plus grande collaboration entre la sphère publique, à laquelle appartient l’université, et le monde des entreprises ? À l’image finalement de ce que vous avez initié ici à l’université Nice-Sophia Antipolis…
Bien sûr, il y a déjà de très nombreux ponts entre l’université et l’entreprise. Mais l’idée c’est de simplifier ces relations, de les fluidifier, pour mettre finalement l’université au service de la société civile.
Estimez-vous que la recherche et l’enseignement supérieur ont été un peu malmenés ces dernières années, souvent pour des raisons budgétaires ?
Je n’ai pas de jugement à porter sur les politiques antérieures qui ont été conduites. Beaucoup de choses ont été faites et il en reste sans doute beaucoup à faire.
Comment va se passer votre succession à l’université Nice-Sophia Antipolis ?
Le président de l’université est élu par les membres du conseil d’administration. Bien sûr, je vais démissionner de cette présidence. Mais j’ai une équipe avec laquelle je travaille depuis de nombreuses années. C’est une machine qui tourne, et le conseil d’administration désignera de toute façon un nouveau président. Il n’y a pas de risque pour l’université. Nice-Sophia Antipolis et Nice-Côte d’Azur continueront à avancer et à réussir comme elles le font depuis plusieurs années déjà.
Justement, cette proposition au premier plan national se justifie-t-elle aussi par les combats que vous avez menés ici, localement ?
C’est vrai que nous avons, avec l’université Nice-Côte d’Azur et notre projet d’initiative d’excellence, innové. J’imagine qu’effectivement, cela a pu peser. Mais c’est une question qu’il faut poser au Premier ministre et au président de la République. « Enfin un ministre que je vais comprendre. » Jean-Marc Gambaudo, le président de l’université Côte d’Azur, instance chapeautant l’enseignement supérieur et la recherche, privés et publics des A.-M., est « extrêmement content » :« Frédérique Vidal a fait un très beau travail pour faire progresser le territoire azuréen, notamment avec le projet Idex qu’elle a initié et que nous avons obtenu en . C’est une belle reconnaissance de l’excellence azuréenne et une image positive renvoyée de la Côte d’Azur. Frédérique Vidal a toutes les capacités à effectuer au national le travail fourni ici. Elle a des capacités de rassemblement et surtout une vision très large de tout ce qui se fait dans la recherche et l’enseignement supérieur. » « Fierté » et « félicitations ». Tels sont les deux mots clés qui sont revenus, hier, dans les tweets et les communiqués des élus des Alpes-Maritimes, après la nomination de Frédérique Vidal au gouvernement. « C’est une fierté pour Nice que la présidente de l’université Nice Sophia Antipolis soit nommée ministre de l’enseignement supérieur, de l’innovation et de la recherche. Félicitations à Frédérique Vidal », a tweeté l’ex-président de région Paca redevenu maire de Nice, Christian Estrosi. Du côté des juppéistes, le maire d’Antibes Jean Leonetti a adressé ses « félicitations sincères » à «notre présidente de l’UNSA» .Plusà droite, Eric Ciotti lui a sobrement tweeté ses «féliciations républicaines». Côté PS , justement, le er secrétaire départemental Xavier Garcia se dit «surpris et heureux» de la nomination de Frédérique Vidal. Il loue « une universitaire de grande qualité [qui] a montré durant son mandat à la tête de notre université une capacité à faire des choix stratégiques justes et à anticiper les changements. » Son prédécesseur au PS , le conseilleur municipal et métropolitain niçois Patrick Allemand, salue pour sa part « une fierté pour la ville de Nice et pour l’ensemble de la communauté enseignante de notre université. »