David contre Goliath

C’est l’éternel combat du petit courageux contre le méchant géant. Première victime médiatique du nouveau régime, Pujadas pourrait donc disparaître des petits écrans dès le mois prochain. On lui reprochait d’avoir, en dépit de sa taille, malmené les grands de ce monde en fixant souvent l’oeil du  heures sur des zones d’ombre que le pouvoir n’apprécie pas de voir éclairer. En fait, depuis seize ans, il avait interviewé trop de politiciens et enregistré d’un air aimablement dubitatif un nombre record d’utopies et de contradictions. On ignorait pour qui il votait car, tous les cinq ans, dans les secondes précédant l’annonce du vainqueur de la présidentielle et contrairement à d’autres, son visage ne laissait transpirer aucun état d’âme. On savait seulement qu’à sa rigueur s’ajoutait la disposition d’énormes archives lui permettant d’évoquer à point nommé les mensonges, les reniements et les trahisons. Les soirs où il ne portait pas, pendant  minutes, tout le poids du monde sur ses épaules, il arbitrait des combats de plus en plus singuliers sans jamais sembler prendre d’autre parti que celui de l’électeur de base. Sa hiérarchie assure qu’il était urgent de donner leur chance à des pros de l’info moins aguerris et si possible, de substituer l’éternel féminin au perpétuel masculin. Peut-être va-t-il profiter, lui aussi, de sa retraite forcée pour fonder un parti. Les derniers sondages le créditaient de quatre millions et demi de partisans.