Nice-Matin (Cannes)

Un palmarès haut de gamme pour une compétitio­n qui manquait de relief

- PHILIPPE DUPUY pdupuy@nicematin.fr

L’avantage des sélections moyennes, dans lesquelles aucun film ne provoque de véritable engouement, ni de véritable rejet, c’est que l’on est à peu près certain de ne pas être trop déçu par le palmarès. Cela s’est vérifié hier soir. Le jury de Pedro Almodóvar s’est quand même distingué en établissan­t un palmarès presque consensuel, qui n’oublie aucun favori et ne surcote aucun mauvais film. Pour une fois, on a l’impression d’avoir vu les mêmes films ! La Palme d’or accordée à The Square du Suédois Ruben Östlund est tout de même une petite surprise. Difficile à résumer car composé de saynètes parfois sans rapport les unes avec les autres, le film raconte, sur un mode tragi-comique, les mésaventur­es d’un directeur de musée d’art contempora­in, très sûr de lui, de sa séduction et de son pouvoir, qu’une certain nombre d’événements vont déstabilis­er et obliger à se remettre en question.

« Intelligen­t et drôle » Agnès Jaoui a affirmé en conférence de presse que le jury avait trouvé le film « brillammen­t mis en scène, intelligen­t et drôle » et qu’il soulevait « des questions importante­s sur la société médiatique ». Pedro Almodóvar a ajouté qu’il le trouvait, pour sa part « très contempora­in avec une critique acerbe du politiquem­ent correct». « Je le reverrai volontiers » , at-il conclu. C’est aussi notre cas. Mais même s’ils l’ont majoritair­ement aimé, les festivalie­rs ne s’attendaien­t pas forcément à retrouver The Square tout en haut du palmarès. Leur favori pour la Palme était plutôt Faute d’amour, du Russe Andrey Zvyagintse­v. Il n’obtient que le prix du jury. C’est une petite déception, mais l’important est qu’il n’ait pas été oublié. En revanche, le Grand Prix accordé au film de Robin Campillo 120 battements par minute, est une magnifique récompense (même si elle va d’habitude à des films d’une cinématogr­aphie plus exigeante). Après la cérémonie, Pedro Almodóvar a fait comprendre à demi-mot que le jury s’était exprimé collective­ment et démocratiq­uement, mais que ce film, qui parle de la lutte contre le sida et pour la reconnaiss­ance des malades, avait eu ses faveurs pour la Palme d’or. « Je suis sûr qu’il aura beaucoup de succès », a conclu le président du jury.

Une femme primée pour la mise en scène Les deux prix du scénario ex aequo accordés à des films qui se distinguen­t plutôt par leur mise en scène (Mise à mort du cerf sacré et You Were Never Really Here de Lynne Ramsay) permettent surtout de les avoir au palmarès. Le prix de la mise en scène à Sofia Coppola pour Les Proies est une manière de distinguer une femme metteur en scène, même si les membres féminines du jury se sont défendues de tout favoritism­e. Aucune n’avait encore jamais reçu ce prix prestigieu­x. Pour les prix d’interpréta­tion, le jury a épousé l’avis général en primant un Joaquin Phoenix, phénoménal dans le très bon film de Lynne Ramsey et une Diane Kruger excellente dans le plus mauvais film de l’édition (In the Fade de Fatih Akin)... Et Nicole Kidman pour sa contributi­on à l’édition (quatre films en sélection !) Parmi les oubliés, Jupiter’s Moon du Hongrois Kornél Mundruczó, fable fantastiqu­e sur l’immigratio­n avait semble-t-il les faveurs de... Will Smith ! L’acteur américain a affirmé l’avoir « adoré » ! Enfin, l’absence de Michael Haneke au palmarès fait craindre qu’un vent de révolution souffle sur le Festival. Quoi, pas de Happy End ?

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Sous le regard complice de Pedro Almodóvar, président du jury et de Juliette Binoche qui a remis la Palme d’or, le Suédois Ruben Östlund et les autres lauréats de la soirée laissent éclater leur joie.
 ??  ?? Monica Bellucci, sublime maîtresse de cérémonie, a donné le la de la soirée. Qui a vu deux réalisateu­rs remporter le prix du meilleur scénario : le Grec Yórgos Lánthimos et la Britanniqu­e Lynne Ramsay. Le prix du jury est revenu au Russe Andrey...
Monica Bellucci, sublime maîtresse de cérémonie, a donné le la de la soirée. Qui a vu deux réalisateu­rs remporter le prix du meilleur scénario : le Grec Yórgos Lánthimos et la Britanniqu­e Lynne Ramsay. Le prix du jury est revenu au Russe Andrey...

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