Nice-Matin (Cannes)

Le Parti socialiste a-t-il encore un avenir?

- ERIC GALLIANO

Effeuillée par Emmanuel Macron et les candidats de La République en marche !, la rose a perdu l’essentiel de ses pétales ce dimanche soir. Avec moins de 7,5 % des suffrages exprimés à travers l’Hexagone, le Parti socialiste a enregistré un score historique­ment bas lors de ces législativ­es. Il se réduit même à sa plus simple expression dans les Alpes-Maritimes où les candidats PS totalisent dix fois moins de voix qu’en 2012 et passent sous la barre des 2%. Du coup la question se pose : y a-t-il encore un avenir pour cette formation politique ? Et même pour son secrétaire départemen­tal, Xavier Garcia, la réponse n’est pas forcément évidente. «Le Parti socialiste peut vivre… Mais il peut aussi disparaîtr­e. Ou tout au moins devenir un parti marginalis­é », reconnaît-il avec lucidité. «Car il ne suffira pas d’attendre, comme l’espèrent certains depuis un moment déjà, que la bulle Macron éclate pour voir les électeurs revenir vers nous. »

« Entre le social libéralism­e et les oukases de Mélenchon » «Aujourd’hui, ils ont trouvé un autre mode d’expression politique », souligne son prédécesse­ur à la tête des instances départemen­tales, Patrick Allemand. Il y a ceux qui, comme lui, se sont mis en marche. Et les autres qui se sont « tournés vers un pôle de gauche plus radical ». Reste à savoir si entre les « sociaux-démocrates », qu’incarne Macron, et la France Insoumise de Mélenchon, le PS peut se reconstrui­re. Paul Cuturello, figure locale du parti, en est convaincu : « Il existe un espace suffisant pour une gauche réformiste, entre la gauche protestata­ire et ce qui est, en réalité, le centre droit ». Voire le « social libéralism­e » d’un Emmanuel Macron qui, pour Xavier Garcia, «penche quand même très à droite» .Lui aussi estime qu’il y a dès lors une place à la gauche de La République en marche ! et la droite « des oukases de Mélenchon ».

À défaut de changer le parti les gens ont changé de parti Tout comme Yann Librati, candidat socialiste dans la première circonscri­ption, veut encore croire au « parti de Jaurès, de Blum, de Mendès France, de Rocard… » Après tout, « on le savait », assure-t-il : «Ces élections c’était un peu la chronique d’une défaite annoncée » .Et depuis bien longtemps, à en croire ce socialiste niçois. « Ca fait des années que le logiciel est fatigué, que ce parti ne se contentait plus que de prendre le vote utile pour une rente. Nous n’avons pas réussi à le changer, alors les gens en ont changé. » Ils sont partis vers La République en marche ! «Comme une bonne partie de ceux qui, au sein de la Hollandie, nous ont empêchés de changer le PS», constate Yann Librati qui y voit plutôt un mal pour un bien : « Finalement, Macron a réussi ce que nous n’avons jamais fait. Il nous a débarrassé­s des éléphants ! »

Avec quel leader et quels moyens financiers ? Le revers de la médaille c’est que se pose dès lors la question de qui peut encore incarner les valeurs du PS. D’autant que la plupart des ténors qui n’ont pas fait défection, de Cambadélis à Hamon, ont essuyé des revers personnels lors de ces législativ­es. Xavier Garcia, pour sa part, verrait bien «un Bernard Cazeneuve» dans ce rôle. Mais pour Paul Cuturello l’urgence est surtout de « renouer avec ce qui a été la force de ce parti, à savoir sa capacité à apporter des idées nouvelles. Ensuite on verra bien qui peut les porter… » Et éventuelle­ment réussir à nouveau cette fameuse synthèse qui, hier a porté le PS au pouvoir, mais qui aujourd’hui semble désormais impossible entre deux gauches qui ne supportent plus de cohabiter au sein d’une même formation politique. « Ça sera sans doute long », reconnaît Paul Cuturello. Et en attendant, l’appareil du parti, du moins ce qu’il en reste, va devoir apprendre à vivre chichement. Car ce revers électoral est aussi synonyme de coupes claires dans ses finances. Chacun des 62 000 électeurs perdus dans les Alpes-Maritimes ce dimanche va amputer de 1,44 euro la dotation du PS. À l’échelle de la France ce sont près de 17 millions de moins qui vont être injectés dans les rouages de cette machine politique. Au risque de la gripper définitive­ment ? Là encore Yann Librati ne veut pas y croire : « Aujourd’hui, avec le poids réseaux sociaux notamment, l’argent importe moins qu’avant. Après tout Macron ou Mélenchon n’en avait pas tant que cela. Et cela ne les a pas empêchés de passer en tête. » C’est d’ailleurs le fond du problème existentie­l qui se pose au Parti socialiste.

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