Nice-Matin (Cannes)

Jusqu’au bout du suspense…

- ARNAULT COHEN acohen@nicematin.fr A.R.

«Je suis hyper-stressée. C’est très serré…» Il est 19h45, hier soir, dans un petit appartemen­t situé à deux pas de la mairie de Menton. C’est dans ce logement transformé en QG de campagne qu’Alexandra Valetta-Ardisson a attendu, un par un, commune par commune, parfois bureau par bureau, les résultats de la 4e circonscri­ption. Avec anxiété. Repoussant jusqu’au bout le moment de la victoire. Autour d’elle, une vingtaine de proches sont là. Tout son staff de campagne. Son suppléant Alain Godinot. Son père et son frère, très actifs pour aller à la pêche aux résultats. Et son mari, Christophe, qui reste en retrait. Discret. Avec son portable, il ne scrute pas les résultats dans la circonscri­ption de sa femme mais gère la musique. Il distille des morceaux apaisants dans la pièce. « Je n’ai pas participé à sa campagne, confie-t-il. Je lui apporte une autre forme de soutien… » «Je vais mourir, c’est horrible. Je vous jure que je vais mourir.» La candidate de La République en marche est ultra-tendue. Elle redoute un retourneme­nt de situation, un retour d’Olivier Bettati, son adversaire FN, dans la dernière ligne droite. « Tu as 100 voix de plus à La Turbie», lui glisse Céline à l’oreille, en accompagna­nt le résultat d’une caresse d’encouragem­ent sur le bras. Céline, c’est la jeune femme qui saisit les résultats sur l’ordinateur, au fur et à mesure. Et qui tient les comptes. Alain Godinot: «Sospel vient de tomber: tu es devant de 115 voix.» «Yes!», entend-on. «Tende, plus 77.» «Yesss!» Les sonneries de SMS retentisse­nt toutes les 10 secondes.

«On attend Menton» A 20h15, une vraie tendance se dessine. «On a 1000 voix d’avance sur l’ensemble de la circonscri­ption, hors Menton» , informe Alexandra Valetta-Ardisson. Grands sourires dans la pièce. À commencer par celui de M. Valetta, le père de la candidate macroniste. «C’est pas gagné, Papa!», lui intime sa fille. Aucune effusion de joie ne sera permise avant le résultat final. Commence alors une longue attente. Pendant plus d’une heure, la candidate répétera à l’envi: «On attend Menton.» «Je ne veux pas y croire mais on m’a toujours dit que c’est Menton qui fait la différence dans cette élection », confie Alexandra Valetta-Ardisson. Une heure durant, la jeune quadra alternera entre stress, rires nerveux, prévenance­s – « Vous voulez boire quelque chose? Mangez quelque chose!» La télé annonce la victoire de Marine Le Pen. « Je ne veux pas être à l’Assemblée avec elle! Finalement, envoyez Bettati », blague-telle dans un éclat de rire. Un premier bureau mentonnais livre ses résultats. Ils sont bons pour la candidate REM. «Il nous manque 27 bureaux!», calme Alexandra Valetta-Ardisson. Discrèteme­nt, des proches trinquent à la victoire, avec des gobelets en plastique remplis d’eau. D’autres bureaux livrent leurs secrets. La victoire devient évidente. Tout le monde le sait dans la pièce. Sauf la principale intéressée. «J’ai besoin de voir des chiffres dans toutes les cases », souffle-t-elle. Il faudra donc attendre le 28e bureau de Menton pour que la jeune femme réalise qu’elle a déjoué tous les pronostics et remporté la 4e circonscri­ption des AlpesMarit­imes considérée comme «la plus gagnable pour le FN ». 21h33. Toutes les cases sont remplies. Alexandra Valetta-Ardisson se cache le visage dans les mains et ne retient plus ses larmes. On applaudit, on l’embrasse, on la félicite. Elle vient de réaliser qu’elle est députée de la 4e circonscri­ption. Olivier Bettati a attendu  heures pour réagir officielle­ment devant ses proches et sympathisa­nts, réunis au restaurant « Il était une fois » sur la promenade du Soleil à Menton. « Face à une déferlante absolue, nous avons eu un score invraisemb­lable. Je milite depuis un an et demi pour la recomposit­ion de la droite, nous en avons besoin plus que jamais aujourd’hui. « Dans la droite du sud, certains élus sont partis du côté de La République en marche, tels que Christian Estrosi et Jean-Claude Guibal. « Je ferai en sorte, en temps voulu, de présenter face à eux des candidats de qualité. En politique, on ne perd jamais, soit on gagne, soit on apprend. J’ai la carapace dure et vous m’aurez à vos côtés dans la totalité des combats à venir… Je vous engage à ne pas être déçus et à être fiers de ce que l’on a fait. En réalité, tout commence ici. »

 ?? (Photos Jean-François Ottonello) ?? L’anxiété avant la délivrance.
(Photos Jean-François Ottonello) L’anxiété avant la délivrance.

Newspapers in French

Newspapers from France