A Tende, la route rouvre, les questions demeurent
La RD 6204 et le tunnel transfrontalier ont rouvert hier, après les travaux menés en urgence sur le mur fragilisé. L’attention se porte à présent sur le nouveau tunnel, au coeur de l’affaire
Le trafic routier a repris son cours normal. L’enquête, elle, n’a pas connu de pause. Voilà bientôt un mois, désormais, que le col de Tende vit au rythme des investigations et expertises judiciaires menées de part et d’autre de la frontière franco-italienne. A l’origine, une sombre affaire de vol de métaux a conduit à la mise sous séquestre du chantier de percement d’un second tunnel à Tende. De fil en aiguille, elle a conduit à s’alarmer de l’état de l’imposant mur érigé le long de la RD 6204. Depuis 17 h hier, les véhicules peuvent à nouveau emprunter cette route pour gagner l’Italie. Elle est restée fermée durant trois jours, le temps pour les services départementaux de réaliser, en urgence, les travaux de sécurisation du mur réclamés par le préfet des AlpesMaritimes. « J’ai accepté, à titre exceptionnel, que le Département intervienne, à frais avancés, bien que ce ne soit nullement de sa responsabilité », fulminait le président du Département, Eric Ciotti.
« Solution de sagesse »
Le résultat est éloquent. Entre quatre-vingts et cent blocs d’un mètre cube imbriqués ont été disposés devant la partie la plus fragile du mur, l’habillant d’une ceinture de béton haute de 3,50 m. Le mur de soutènement, lui, en mesure près de 11, pour 80 de longueur. Or les experts venus successivement l’ausculter avaient décelé d’inquiétants signes de faiblesse. L’expert en travaux publics, mandaté par le procureur de la République Jean-Michel Prêtre, avait pointé « des risques pour la sécurité publique ». Le rapport tout frais remis par le Cerema (1) au préfet a largement confirmé ces craintes. Selon nos informations, ses conclusions seraient accablantes sur les travaux réalisés. La paroi, mélange de terre hyper compactée et de couches géotextiles, ne serait pas ancrée dans la colline comme elle aurait dû l’être. Dès lors, ces travaux apparaissent comme « la solution de sagesse, trouvée grâce au préfet et au département », salue de son côté JeanPierre Vassallo. Le maire de Tende redoutait une fermeture au long cours de la RD 6204, en raison des risques présentés par le mur en cas de fortes pluies. « Une surveillance humaine sera exercée en cas de fortes précipitations, précise Jean-Pierre Vassallo. En un mois, le mur avait bougé de cinq millimètres... On a empêché le glissement. »
Tunnel ausculté
Les équipes dépêchées sur place ont fait mieux encore : elles en ont profité pour rendre quelques couleurs goudronnées à l’asphalte dans le tunnel de Tende. Un coup de frais pour ce tunnel historique, inauguré en 1882 et long de 3,2 km, qui ne répond plus aux normes de sécurité européennes actuelles. Désormais, c’est vers son jeune voisin que convergent les regards. Après le Cerema, c’est le Cetu (Centre d’étude des tunnels) qui s’intéresse à l’ouvrage en cours de percement. Deux cents tonnes de métal se seraient volatilisées au cours des opérations. Les ingénieurs vont donc devoir réaliser sondages, carottages, et examens à coups de rayons laser pour vérifier la viabilité de l’ouvrage. Dans la vallée de la Roya, où nombre d’habitants sont hostiles au nouveau tunnel, beaucoup ne voient pas d’un mauvais oeil les péripéties qui frappent le chantier [lire ci-dessous]. D’autres, à l’instar de Jean-Pierre Vassallo, s’inquiètent de leurs répercussions pour l’économie locale. «Onaquatre stations service dans la Roya ! A Tende, j’ai une boulangerie avec dix employés, une pharmacie qui en a cinq... C’est ce passage qui fait travailler tous ces gens. » 1. Le centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement, à Lyon.