Le procès Cannes-Torcy rend son verdict ce soir
Deux suspects, le grand-oncle et la grand-tante, écroués puis libérés en moins d’une semaine, pour un crime vieux de 32 ans. Et après ? La suite de l’enquête sur l’affaire Grégory s’annonce déterminante si la justice veut éviter un nouveau fiasco. En 1985, Bernard Laroche, premier suspecté dans cette affaire, avait été remis en liberté avant d’être tué par le père de Grégory, JeanMarie Villemin, son cousin. Les soupçons se portèrent ensuite sur Christine Villemin, la mère du garçon de quatre ans, finalement innocentée. Dans le dossier, plusieurs fois rouvert depuis, les noms de Marcel et Jacqueline Jacob figuraient dès l’origine mais ils n’avaient jamais été inquiétés jusqu’alors. Pourquoi aujourd’hui ?
Les époux Jacob restent suspectés
Après quatre jours de détention, les deux septuagénaires résident désormais séparément, dans des lieux tenus secrets, sous étroit contrôle judiciaire. Ils ont interdiction absolue de communiquer avec les médias, dans un dossier souvent pollué par la presse. Leur remise en liberté constitue un revers pour les enquêteurs et le parquet général mais le couple demeure au coeur des soupçons et reste mis en examen pour l’enlèvement et la séquestration du petit Grégory, suivis de sa mort. Les enquêteurs pensent, a minima, avoir mis la main sur les « corbeaux » de l’affaire grâce à une nouvelle expertise graphologique attribuant à Jacqueline Jacob un courrier de 1983. L’accusation avait requis des peines de prison allant de deux ans ferme à la réclusion criminelle à perpétuité ; les vingt accusés seront fixés ce soir, au procès de la cellule terroriste Cannes-Torcy. Après deux mois de débats aussi passionnants qu’inquiétants, les accusés ont la parole une dernière fois, ce matin, devant la cour d’assises spéciale de Paris. Celle-ci rendra son verdict ce soir dans ce procès hors normes, premier du genre dans l’ère du djihadisme contemporain. Hier, les avocats de Kevin Phan et Jérémy Bailly, jugés pour l’attentat contre une épicerie casher à Sarcelles (Val-d’Oise) en , ont dénoncé l’« outrance » des réquisitions – de ans de réclusion à la perpétuité – avant de s’affronter. Me Georges Sauveur, l’avocat de Bailly, numéro de la filière et seul chef survivant, s’est demandé « comment justifier l’outrance de la perpétuité, cette peine de mort civile ». Me Elise Arfi a, elle, relevé que les ans requis contre Kevin Phan, âgé de ans, était « une peine plus longue que sa vie » .Les deux avocats se sont livrés à une rude bataille par plaidoiries interposées : leurs clients risquent les plus lourdes peines et s’accusent mutuellement d’avoir jeté la grenade à Sarcelles, principal fait d’armes de la filière jihadiste. Hier matin, les avocats des Cannois « syriens » de la bande avaient, eux, dénoncé un « massacre judiciaire », pointant « la faiblesse des preuves » d’une association de malfaiteurs à visée terroriste. Philippe Courroye, qui portait l’accusation avec Sylvie Kachaner, avait requis à ans de prison pour des séjours de seize mois en Syrie. L’avocat général a souligné la dangerosité potentielle de certains accusés. La cour présidée par Philippe Roux, exclusivement composée de juges professionnels, se retirera tout à l’heure pour statuer sur leur sort.