Le Département célèbre Alberto Giacometti à Nice
La galerie Lympia, sur le port de Nice, accueille cinquante sculptures, peintures, dessins et lithographies de l’artiste suisse. Une exposition exceptionnelle par le nombre et par la qualité
La Fondation Giacometti de Paris, légataire universelle de la veuve de l’artiste, prête au Département des Alpes-Maritimes quelques fleurons de sa collection. Une sélection de cinquante oeuvres sur cinq mille, parmi les plus belles et les plus rares. Ce qui fait de « L’OEuvre ultime » l’une des expositions phares de l’été 2017 sur la Côte d’Azur. Ainsi la pièce maîtresse, Grande Femme, culmine-t-elle à près de trois mètres sur la terrasse de la galerie Lympia, dominant le port de Nice de sa silhouette gracile. Tandis que l’on découvre dans les vitrines climatisées l’une des figurines les plus modestes par la taille, mais bouleversante d’intensité : à peine deux centimètres de talent pur et de plâtre.
Des bustes en bronze pour deux êtres chers
Exceptionnels aussi, les dessins au stylo-bille ou au crayon, jamais montrés auparavant, dont l’un représente le ramage d’un palmier : proche des Maeght, Giacometti aimait la Méditerranée. Le nouveau site culturel du conseil départemental des Alpes-Maritimes se voit également confier une suite de bustes en bronze à l’effigie notamment de deux être chers. La jolie Caroline, pudiquement présentée comme « l’un de ses modèles historiques », et le photographe d’origine roumaine Éli Lotar, dont on peut admirer des clichés montrant Giacometti au travail. La première, de son vrai nom Yvonne-Marguerite Poiraudeau, s’est éteinte à Nice il y a deux ans. L’artiste l’avait rencontrée dans un bar de Montmartre que fréquentait la jeune femme – elle avait vingt ans, il en avait soixante –, habituée à se « débrouiller », comme elle le disait gentiment. Le second, qui avait connu Giacometti à Genève en 1944, devait le retrouver à Paris vingt ans plus tard, posant pour lui jusqu’à la mort de l’artiste en 1966. Pour la Fondation Giacometti de Paris, cet accrochage arrive à point nommé. Après de nombreuses rétrospectives à l’étranger, « L’OEuvre ultime » est l’opportunité de présenter « une exposition sur mesure, autour d’une question resserrée », comme le souligne Christian Alandete, son commissaire avec Catherine Grenier. «Enfermé depuis 1927 dans un atelier de 23 m2 à Montparnasse, il se concentre à la fin de sa vie sur les portraits de sa muse Caroline et de son ami Lotar. »
« Un repère pour les artistes d’aujourd’hui »
Une façon brillante de rappeler que Giacometti ne se réduit pas à L’Homme qui marche ouà Femme de Venise, ses bronzes les plus emblématiques. Cet événement a été préparé en étroite concertation avec le Département. Son président Éric Ciotti avait toutes les raisons de s’en féliciter hier : « C’est pour moi un grand plaisir d’inaugurer à la galerie Lympia, dans l’ancien bagne du port de Nice qui a été entièrement réaménagé en espace muséal, cette exposition d’Alberto Giacometti. Nous aurons de nouvelles clés de lecture pour aborder l’oeuvre intemporelle de cet artiste qui, par son indépendance de pensée et sa liberté de création, est un repère pour les artistes d’aujourd’hui.» Le travail accompli est remarquable. La galerie elle-même, sur 230 m2, offre toutes les garanties pour la conservation des oeuvres et pour le confort du public. Étonnant quand on sait que ce massif couloir de pierre, bâti en 1750, a connu des destinations très différentes, d’abord affecté aux galères de Villefranche-sur-Mer, puis reconverti en bagne maritime avant de se muer en caserne ou en dépôt. Complété par le pavillon de l’Horloge, l’ensemble devient avec Giacometti l’un des pôles majeurs de l’animation culturelle dans les Alpes-Maritimes.