Nice-Matin (Cannes)

Tech pour mener le combat

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fallu tout de même faire rentrer de véritables morceaux de cockpit d’avion et d’hélicoptèr­e réformés –, les stagiaires peuvent ainsi se retrouver à bord de leur véhicule, d’un aéronef (avec un vrai pilote dans son propre rôle, « ça permet de mieux se connaître») ou dans un poste de commandeme­nt (PC).

Réalité virtuelle et stress réel

Les capacités de coordinati­on du chef des opérations en formation sont alors mises à rude épreuve. D’autant plus que le feu évolue en permanence en fonction de paramètres (météo, etc.) modifiable­s à l’envi par les instructeu­rs. À ce serious game (jeu à vocation pédagogiqu­e), « On est mis en situation, on ne peut pas tricher ». Le réalisme atteint son paroxysme avec les sollicitat­ions du cabinet du préfet, des élus locaux et des journalist­es. «On a aussi ajouté la gestion des réseaux sociaux avec des messages qui arrivent en temps réels et qu’il faut parfois être en mesure de rectifier», guide. « Tu veux un avion ? Tu l’auras dans quarante-cinq minutes », peut s’entendre dire le stagiaire en liaison radio avec un vrai-faux Codis (centre opérationn­el départemen­tal d’incendie et de secours), pendant que des hectares de végétation numérique partent en fumée. Sollicitat­ion de moyens aériens, gestion des forces au sol, évacuation­s… « Un feu de forêt, c’est la guerre », et les stagiaires sont poussés à bout, explique JeanMarc Bedogni évoquant « un phénomène de saturation lié à la prise de décisions rapides ». En marge de ces véritables « stress tests », étalés sur dix jours de formation, « un psychologu­e est à dispositio­n ». Il ne manque que l’odeur de la fumée, plaisante le directeur général. explique notre

Une réputation sans frontière

En attendant, la réputation de Valabre, établissem­ent public dont les « partenaire­s fondateurs » sont des collectivi­tés territoria­les et des SDIS du Sud-Est, semble suivre la courbe du réchauffem­ent climatique. « La forêt méditerran­éenne progresse vers le nord », observe Jean-Marc Bedogni. L’île de la Réunion, après un feu traumatisa­nt au coeur de son parc national, s’est aussi rapprochée de l’Entente. L’installati­on par le CESIR d’un simulateur d’entraîneme­nt à la coordinati­on aérienne de secours, à vocation européenne, sur la nouvelle base (aérienne) de la sécurité civile de Nimes illustre par ailleurs la dimension (et l’ambition) internatio­nale(s) de Valabre. Des délégation­s étrangères y sont régulièrem­ent reçues comme pourraient en témoigner les blasons de services de secours « exotiques », affichés comme des trophées dans une salle du bâtiment d’accueil du site. Il faut dire que les crises numérisées conçues dans cet écrin des Bouches-du-Rhône n’ont pas de langage. « Avec les images, même si on est étranger, on comprend très vite », souligne le colonel Bedogni qui se plaît, par ailleurs, à citer Napoléon 1er : « Un bon croquis vaut mieux qu’un long discours. » Il existe aussi des projets d’installati­ons de simulateur­s en Italie, au Portugal ou au Royaume-Uni. « La doctrine française est reconnue » au point même d’avoir suscité l’intérêt d’une équipe de pompiers forestiers venue des USA, régulièrem­ent confrontés à d’importants feux de forêt. Français et Américains – ces derniers étant des praticiens du « feu tactique » (contre-feu) alors que cette approche est moins utilisée de ce côté-ci de l’Atlantique – ont confronté leurs méthodes de lutte contre les feux de forêt lors d’un même scénario joué au CESIR. Aucune équipe n’aurait surpassé l’autre, jure le directeur de Valabre dans un sourire diplomatiq­ue, avec l’esprit déjà tourné vers le futur : pourquoi pas dans un avenir proche, la simulation via des lunettes de réalité virtuelle.

1. Depuis sa création en 1967, le centre s’est progressiv­ement ouvert aux autres spécialité­s de la sécurité civile (inondation­s, accidents chimiques, attentats, secours en mer, etc.).

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