Révolution Macron
Devant le Congrès, le Président a livré sa philosophie progressiste. Il a principalement annoncé une grande réforme institutionnelle
Pendant minutes, Emmanuel Macron a fixé les grandes orientations de son quinquennat face au Parlement réuni en Congrès hier à Versailles. Aucune annonce surprise, le Président a simplement répété ses mesures phares de campagne, centrant son discours sur une vaste réforme des institutions.
Je veux installer une République où la confiance partagée ira de pair avec les comptes que l’on y rendra. » Ne pas verser dans la pure littérature, semer quelques annonces très concrètes, sans pour autant couper l’herbe sous le pied de son Premier ministre, qui détaillera aujourd’hui sa feuille de route. C’est le délicat défi que s’est luimême assigné Emmanuel Macron devant le Congrès réuni à Versailles. Dans un copieux discours d’une heure et demie, chacun aura pu voir le verre à moitié plein ou à moitié vide. Ayant bien pris soin de poser qu’il était là pour déterminer un cap, «fixer le sens du quinquennat auquel il revient au Premier ministre de donner corps», le Président n’a pas échappé aux envolées forcément vagues, creuses, parfois infatuées, si lyriques et lettrées soient-elles. Les oppositions qualifiées de «stériles» ne s’en trouveront pas balayées aussi spontanément qu’il l’aurait rêvé.
Vers un dégraissage des parlementaires
Au chapitre du concret, on retiendra essentiellement l’annonce d’une vaste réforme institutionnelle, tendant à plus d’efficacité et de représentativité. Emmanuel Macron souhaite tout à la fois « mettre un terme à la prolifération législative», «un vote plus rapide des lois » et «une évaluation de l’application de tous les textes importants, pour si besoin les corriger». A cet effet, il entend réduire d’un tiers le nombre des parlementaires, «pour leur donner plus de poids et de moyens » . Il veut, également, instaurer une dose de proportionnelle dans l’élection desdits parlementaires et, comme il l’avait promis, limiter le cumul des mandats dans le temps. Il reviendra à la garde des Sceaux, Nicole Belloubet, de mettre en musique ces réformes, à raison de propositions précises dès cet automne, qui devront déboucher sur des décisions dans un an. La ministre de la Justice est par ailleurs chargée de repenser le Conseil économique et social, pour en faire «la chambre du futur où circuleront les forces vives de la nation, une instance unique de consultation des citoyens, le forum de notre République», de supprimer la Cour de justice de la République (juridiction d’exception destinée aux seuls ministres), d’ouvrir le droit de pétition et de renforcer le Conseil supérieur de la magistrature. Bref, de proposer «un changement profond des pratiques et des règles », qui pourra s’il le faut être validé par référendum, a indiqué le Président.
La fin de l’état d’urgence à l’automne
Autre annonce tangible du locataire de l’Elysée, la fin de l’état d’urgence à compter de cet automne. Emmanuel Macron fait le pari de la solidité de notre démocratie. « Répondre aux terroristes, ce n’est pas changer de Constitution chaque matin», estime-t-il. Une conférence des territoires sera, d’autre part, organisée pour «adapter les politiques aux réalités locales ». Ces pierres posées, Emmanuel Macron, pénétré de sa mission, s’est surtout employé à convaincre qu’il tiendra ses promesses électorales, en discernant « pas après pas, ce qui doit être refondé », sur la base d’une « éthique de l’action à l’épreuve du réel ».
«A l’épreuve du réel»
Le Président a défendu, à grand renfort de majesté et de digressions, les principes qui vont guider son action. A savoir, « le mandat d’un projet progressiste, sans refuser de voir le réel en face, qui tranche avec les années immobiles et les années agitées, toutes également décevantes, et renoue avec l’esprit de conquête », en bannissant «les faux procès et les stériles oppositions théoriques ». Une volonté qu’il appuiera sur une liberté forte, «qui permette d’innover tout en construisant une place pour chacun » et sur une morale de fraternité et de solidarité «qui doit infuser toute la société». Sur une France, enfin, qu’il a de nouveau et très clairement inscrite dans l’Europe. Pour refonder cette dernière, il désire, en lien avec Angela Merkel, mettre en place « des conventions démocratiques, afin qu’elle ne soit plus seulement perçue comme un syndic de gestion de crise ». Rendez-vous dans un an – puisqu’Emmanuel Macron va pérenniser ce Congrès –, pour confronter les actes au verbe de cette si baroque révolution.