Nice-Matin (Cannes)

Enfants : « Dissocier attentat et fête »

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A l’approche de la commémorat­ion du 14-Juillet, peurs et angoisse peuvent ressurgir. Pour y faire face, l’hôpital Lenval a prévu d’assurer une permanence pour les enfants et leurs parents, du 10 au 21 juillet (1). La pédopsychi­atre Michèle Battista, responsabl­e du centre d’évaluation pédiatriqu­e du psychotrau­matisme au sein du service du Pr Florence Askenazy (2), explique les enjeux de cette période est délicate.

■ Comment répondre à la douleur de cette “plaie qui se rouvre”?

« Certains enfants qui avaient pourtant consulté peuvent replonger. D’autres, qui n’en avaient pas vu la nécessité jusqu’alors, peuvent décompense­r. On pose la question aux enfants : pourquoi on fête le 14-Juillet ? On fait un peu de pédagogie positive. Le 14Juillet, c’est la prise de la Bastille, un grand moment de liberté et il ne faut pas le perdre. Il faut bien séparer les deux, dissocier l’attentat de la fête. » Michèle Battista demande aux enfants : « “Qu’est-ce que tu faisais le 14 juillet 2015 ?” En puisant dans leurs souvenirs, certains racontent, la Prom’, le feu d’artifice, une soirée où on est ensemble, on rigole. Les pédopsychi­atres travaillen­t ainsi sur les bons souvenirs. On relance le plaisir, la vie, pour donner envie de continuer”. »

■ Faut-il assister aux commémorat­ions ?

Sur ce plan, le Dr Battista invite à « écouter ses sentiments ». « Aller aux commémorat­ions c’est se trouver confronté aux horreurs vécues. Ceux qui vont mieux peuvent se demander s’ils veulent ou pas prendre le risque d’aller mal. Le problème d’un traumatism­e, c’est la mémoire. Or les mauvais souvenirs, c’est comme un livre d’horreur qu’on range dans une bibliothèq­ue : il existe, mais on ne le laisse pas au milieu du salon. Il ne faut pas non plus le mettre sous le tapis, se voiler la face, sinon on va le prendre dans les pieds et trébucher. Ce que certains pensaient pouvoir oublier leur saute à la figure. » « Une commémorat­ion, c’est une mémoire collective que l’on partage. L’être humain a besoin de ne pas être seul. En revanche, à chacun de choisir avec qui partager ces moments, et dans quel environnem­ent : en participan­t ou pas à l’hommage officiel. »

Ce drame nous rapproche-t-il ?

« On ne sort pas plus fort de ce type de drame. Mais, on en sort grandi, explique le Dr Battista. On sait ce qu’est la peur, la vigilance. Et surtout, on réalise que tout seul, on ne peut pas s’en sortir. On a besoin les uns des autres ; ça s’appelle l’empathie. Partager, c’est dire qu’il y a un demain. Ensemble. On peut s’appuyer les uns sur les autres. Aujourd’hui, la Promenade est encore plus belle, on a planté des palmiers. »

1. Se présenter sans rdv de 10 h à 18 h à Lenval, centre d’évaluation pédiatriqu­e du psychotrau­matisme. Tél. 04.92.03.00.66. 2. Depuis le 1er janvier, le service a reçu 149 “petits patients” et leurs parents.

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