Nice-Matin (Cannes)

Le macronisme fiscal

- Par DENIS JEAMBAR

Le grand maître des horloges qu’entend être Emmanuel Macron peut, donc, commettre des erreurs de chronométr­age. Ne doutons pas de sa parole et de celle de son Premier ministre : la semaine dernière, les deux hommes avaient échangé et relu leurs discours respectifs devant le Congrès et l’Assemblée nationale. Cette belle harmonie signifiait, en outre, que les annonces d’Edouard Philippe avaient le feu vert de l’Elysée. Notamment, l’annonce d’un report de la suppressio­n de la taxe d’habitation et de la réforme de l’ISF. Cet étalement tenait, bien sûr, à la découverte du dérapage budgétaire révélé par la Cour des comptes. Au passage, on peut s’étonner que les deux responsabl­es de l’exécutif soient tombés de l’armoire en découvrant ces huit milliards de déficit supplément­aires. Il ne fallait pas être un éminent expert pour s’en rendre compte. En outre, Emmanuel Macron était encore ministre de l’Economie il y a un an et avait participé à l’élaboratio­n de ce budget

. Son « Cet épisode budgétaire

ancien [...] laisse à tout le moins collègue de Bercy, une impression de

Michel flottement et, surtout, Sapin, ne s’est d’improvisat­ion. » d’ailleurs pas privé de le lui rappeler. Bref, pour tenir l’objectif de  % de déficit, l’exécutif avait fait le choix délibéré de ne pas baisser les recettes fiscales. Telle est la vérité. L’horloger Macron a néanmoins vite réalisé que le nouveau réglage de sa montre budgétaire et fiscale ne passait pas dans l’électorat. Certes, le pouvoir tente de nous faire croire que nous n’avions rien compris. Raté ! Les Français ont vu qu’ils allaient passer à la caisse tout de suite avec la CSG et attendre pour les baisses d’impôts. Ainsi est revenu à toute vitesse ce spectre du ras-le-bol fiscal qui a coûté si cher à François Hollande. Sans compter que le Président trahissait au passage ses promesses. Il avait martelé tout au long de sa campagne que la hausse de la CSG serait compensée par la suppressio­n de la taxe d’habitation. Un sacré coup de vieux menaçait soudain le jeune prince. Qui a mesuré qu’il était en train de commettre une terrible erreur. Conseiller­s, experts, spécialist­es de l’opinion, députés l’ont alerté et, dès dimanche, sa décision était prise : retour à l’agenda initial. « Une précision de calendrier », dit-on à l’Elysée, un euphémisme pour faire oublier un gros faux pas, preuve que le chef de l’Etat peut en commettre mais sait aussi réagir au quart de tour. Pour démontrer que rien ne le prend de court, il a poussé dans le même temps son ministre de l’Action et des Comptes publics, Gérard Darmanin, venu du camp des Républicai­ns, à annoncer qu’il avait déniché , milliards d’économie. Divine surprise qui montre au passage que l’argent public est bien mal géré. Comment a-t-on pu laisser une telle somme se perdre dans le budget de l’Etat ? En tout cas, si cet épisode fiscal et budgétaire s’achève bien, il laisse à tout le moins une impression de flottement et, surtout, d’improvisat­ion.

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