Venezuela: la poigne de fer de Maduro se renforce
Le président socialiste vénézuélien Nicolas Maduro a porté hier un grand coup à ses opposants : à peine installée, la Constituante qu’il a voulue et dotée de pouvoirs illimités a limogé l’une de ses adversaires les plus pugnaces, la procureure générale Luisa Ortega.
« Dictature »
Celle-ci, une chaviste historique qui a pris ses distances depuis plusieurs mois avec M. Maduro, a répliqué quelques heures plus tard qu’elle ne reconnaissait pas cette décision. Elle avait indiqué dans la matinée que des unités de la Garde nationale bolivarienne l’avaient empêchée d’accéder aux bureaux du Parquet général dans le centre de Caracas. «C’est une dictature!» avaitelle dénoncé, tout en promettant de continuer «à lutter pour la liberté et la démocratie au Venezuela». «Non seulement ils arrêtent les gens arbitrairement, mais ils les font juger par la justice militaire, et maintenant ils ne laissent pas entrer la procureure générale dans son bureau ». Le Parquet général, qu’elle dirige, avait ouvert mercredi une enquête pour fraude électorale présumée lors du scrutin de l’Assemblée constituante le 30 juillet, réclamant en outre l’annulation de l’installation de cette toute-puissante institution. Nommée en 2007 par le président Hugo Chavez (19992013), Mme Ortega était la principale figure institutionnelle à oser défier publiquement son successeur. Ce limogeage risque d’empirer les relations déjà tendues du Venezuela avec la communauté internationale, inquiète de la dérive autoritaire du régime.
Le pays suspendu du Mercosur
Dernier exemple de cette tension: réunis hier à Sao Paulo, les ministres des Affaires étrangères du Brésil, de l’Argentine, de l’Uruguay et du Paraguay ont décidé de suspendre le Venezuela du Mercosur, le marché commun sud-américain, « pour rupture de l’ordre démocratique». Une mesure qui ne sera levée qu’après « la libération des prisonniers politiques, la restauration des compétences de pouvoir législatif, la reprise du calendrier électoral et l’annulation de l’Assemblée constituante ». Nicolas Maduro a aussitôt répliqué que son pays ne serait « jamais » exclu du Mercosur et dénoncé une tentative de « blocus économique, financier, commercial et politique comme celui imposé à Cuba dans les années 60 ». Il a également défendu la Constituante, qualifiée de «baume pour la vie sociale et politique du Venezuela ». Présidée par l’ex-ministre des Affaires étrangères Delcy Rodriguez, la Constituante a pour mission de réécrire la Constitution de 1999 promulguée par Chavez. M. Maduro lui a notamment fixé pour mission d’apporter la «paix» et de redresser l’économie en lambeaux de cette nation pétrolière, naguère immensément riche. L’opposition, elle, accuse le dirigeant socialiste de vouloir accroître ses pouvoirs et prolonger son mandat qui s’achève normalement en 2019.