AUTO Leclerc, le cavalier seul
Tous derrière et lui devant ! Bien que débutant dans l’antichambre de la F1, le Monégasque a mis d’emblée ses rivaux sous l’éteignoir pour s’échapper en tête. Le titre lui tend déjà les bras
Il vient encore de prendre le large. Après avoir semé la concurrence illico presto au printemps et en début d’été dans l’antichambre de la Formule 1 (l’ex-GP2 rebaptisé F2 cette saison), Charles Leclerc a cette fois largué les amarres au sens propre. « Rien de tel que le bateau, la mer, pour recharger les batteries, changer d’air, se vider la tête lors du break estival », clame le pilote monégasque voguant actuellement sur la Grande Bleue escorté par la satisfaction du devoir accompli durant une première partie de saison qu’il a éclaboussé de son talent hors norme. Meilleur débutant du championnat d’Europe F3 il y a deux ans, lauréat des GP3 Series en 2016, le successeur du tenant du titre Pierre Gasly au volant de la F2 de l’écurie italienne Prema Racing frappée du numéro 1 se savait attendu au tournant. Face à une meute de redoublants désireux de lui couper les ailes sur les pistes de cet ultime échelon impitoyable avant le top niveau, prolongerait-il sa fulgurante ascension vers les étoiles ? Aujourd’hui, la question semble un brin incongrue. En l’espace de trois mois, depuis l’ouverture des hostilités à Bahreïn, le jeune homme (19 ans) pressé de grandir affole le chrono et les statistiques. Alors que sept des onze échéances du calendrier figurent dans les rétros, son tableau de chasse affiche pas moins de cinq victoires et six pole positions. De quoi partir en vacances avec la bagatelle de 50 points d’avance sur le Britannique Oliver Rowland.
Mental en acier trempé
Entre Silverstone et Budapest, le « meilleur des autres » s’appelait Artem Markelov. Le Russe était, lui, relégué à 67 longueurs! Une marge qui a fondu en Hongrie du fait de la disqualification de l’invincible poleman, dépourvu de son 7e chrono de référence consécutif par les commissaires techniques à cause d’une irrégularité constatée sur le différentiel. Contraint de s’élancer en fond de grille, le lendemain, le leader piqué au vif marquera une énième fois les esprits en opérant une remontée fantastique jusqu’au pied du podium de la course 1 (4e). Cinq semaines plus tôt, l’impressionnant tir groupé réussi dans les rues de Bakou avait déjà mis en évidence le mental en acier trempé qui fait sa force. Dévasté par le décès de son père modèle, l’ancien pilote de F3 Hervé Leclerc, Charles s’était alors transcendé trois jours durant. « Je suis arrivé là-bas avec l’esprit ailleurs », confie-t-il. « Bien sûr, je voulais donner le maximum pour lui. Finalement, seule une pénalité de 10 secondes reçue le dimanche matin (2e, ndlr) m’empêche de réussir le week-end parfait après la pole du vendredi et la victoire du samedi. Quoiqu’il arrive désormais, ça restera un moment à part dans ma carrière car je me suis prouvé beaucoup de choses à moimême. En 2015, il m’avait déjà fallu surmonter la disparition de Jules (Bianchi, son parrain sportif). Le mental constitue un paramètre très important que je travaille en Italie, au sein de la structure spécialisée Formula Medicine depuis mes débuts en monoplace, et à la Ferrari Driver Academy depuis l’an dernier. Si j’ai pu traverser deux épreuves aussi pénibles, c’est d’abord grâce aux progrès accomplis dans ce domaine. »
Son rêve : le titre à Monza!
Pour le protégé du cheval cabré faisant cavalier seul en tête de la hiérarchie, reste maintenant à concrétiser. Lui dont on dit qu’il a déjà un pied et demi dans l’ascenseur F1 (voir ci-dessous) pense uniquement au futur proche. A ces quatre dernières étapes cruciales qui devraient lui permettre de rejoindre sur les tablettes Nico Rosberg, Lewis Hamilton, Romain Grosjean, Stoffel Vandoorne... et surtout Nico Hülkenberg, le précédent « débutant » titré à ce niveau (en 2009). Son objectif ? « Puisque le parcours réalisé jusqu’à présent avec l’équipe se situe audessus de mes espérances, je me dois de finir le plus fort possible. Les prochaines échéances peuvent s’avérer très importantes pour l’avenir. J’ai donc placé la barre haut. Pas question de se mettre en mode gestion. » Suivez son regard! La cible est fixée. Droit devant, juste après la reprise des hostilités sur le toboggan de SpaFrancorchamps (25-27 août). « En fait, je rêve de décrocher le titre à Monza (1er-3 septembre) », glisse Charles Leclerc, ogre insatiable. « Mission difficile mais pas impossible. Voilà pourquoi je vais continuer à pousser à 200 %. Sur les terres de Ferrari, devant les tifosi, nul doute que ce serait un sacré frisson... »