Nice-Matin (Cannes)

Cagnes : deux coqs sèment la discorde entre voisins

Le chant de deux gallinacés provoque le trouble au quartier du Val-Fleuri. Des voisins de la famille Yengo ont demandé de faire taire les coqs. Une affaire qui pourrait bien se finir devant le tribunal

- MAXIME ROVELLO mrovello@nicematin.fr

En arpentant le chemin de la Maure, quartier du Val-Fleuri à Cagnes-sur-Mer, près de l’école maternelle, on peut entendre le chant de quelques poules dans le jardin d’une maison. Comme c’est le cas depuis une cinquantai­ne d’années dans ce domicile familial, à en croire Yvette Yengo. «Nous avons toujours eu des animaux ici. Des coqs, des poules, un chien etc. Nous n’avons jamais reçu la moindre plainte», explique la Cagnoise. Jusqu’à un courrier déposé dans sa boîte aux lettres le 29 juillet dernier, demandant de faire taire les coqs. « D’autres personnes sont venues le lendemain, directemen­t chez moi. Pour se plaindre du chant des coqs qui, selon eux, démarre à quatre heures du matin ainsi que des nuisances qu’ils causent en journée», poursuit-elle.

« Ils m’ont demandé de m’en débarrasse­r »

Face à ces manifestat­ions, qu’elle a jugées quelque peu agressives, Yvette a tenté d’arrondir les angles. «Ils m’ont demandé de m’en débarrasse­r. J’ai bien voulu remédier à la chose différemme­nt. Déjà, j’ai séparé les coqs car ils se battaient. Chaque soir, j’en enferme un dans la cave et l’autre dans une cage avec un drap dessus, pour les mettre à l’abri du jour. Mais ce sont des animaux, ils ont une horloge interne. C’est comme demander aux cigales de se taire, ce n’est pas possible. » La famille est même allée jusqu’à envisager une opération pour les gallinacés. « Nous nous sommes renseignés auprès de plusieurs vétérinair­es, expose Alice, la fille d’Yvette. Pour empêcher un coq de chanter, il faut mettre une plaque dans sa gorge. C’est impensable. De toute manière, personne ne veut pratiquer cette opération car c’est considéré, depuis plusieurs années comme de la mutilation. » Avertie à plusieurs reprises par la police municipale, la famille s’expose à une amende de 145 euros par jour tant qu’elle n’a pas trouvé une solution pour faire cesser le chant des coqs. Yvette le réaffirme : « Ça n’a jamais gêné personne, bien au contraire. Si ça avait été le cas, depuis autant d’années, nous le saurions. L’un de mes voisins m’a dit que si le coq continuait de chanter, il m’appellerai­t et viendrait sonner chez moi toutes les nuits. Ça ne peut pas continuer comme ça. Nous ferons un recours en justice s’il le faut. »

« J’irai jusqu’au bout »

En début de semaine, une pétition en ligne a été créée pour soutenir la famille Yengo, à laquelle participe la Société de défense des animaux (SDA) de Nice. Elle a déjà recueilli 4 795 signatures. Contacté, le plaignant – un jeune homme d’une trentaine d’années, récemment arrivé dans le quartier – tient à éclaircir un point : «Je ne veux aucun mal à ces animaux, bien au contraire, mais ils n’ont pas à être là, en ville. » Il confirme être allé à la rencontre de ses voisins pour trouver une solution. Cependant, il l’assure : « J’ai été mal reçu par ces personnes. Lorsque j’ai évoqué ce problème, elles m’ont rétorqué que j’exagérais, que j’étais “de la ville”. Je viens d’acheter cet appartemen­t, qui est à quelques mètres du poulailler, je n’ai pas payé pour ce genre de nuisances. Vous imaginez être constammen­t dérangé par le chant de ces animaux, de quatre heures du matin jusqu’au soir ? Ce n’est pas légal, mais pour eux c’est normal. » Le jeune homme considère être dans son droit pour réclamer la fin des nuisances, s’appuyant sur l’article L2212-2 du code général des collectivi­tés territoria­les (1). « Je ne fais rien pour les gêner, j’estime qu’ils doivent faire pareil. Je me suis rendu compte que je n’étais pas seul à être importuné par le chant des coqs. Plusieurs voisins sont d’accord avec moi, l’intérêt général prime. Nous sommes cinq à avoir appelé, plusieurs fois, la brigade de l’environnem­ent et la police municipale. S’il le faut, j’intenterai une action en justice. Je ne lâcherai rien, j’irai jusqu’au bout. »

Ferme d’accueil ?

Un autre voisin, également importuné par le bruit, a proposé une solution. « Les propriétai­res des coqs ont essayé de résoudre le problème, mais ce n’est pas suffisant. Je peux vous assurer qu’entendre un chant de 80 décibels pendant 45 minutes non-stop à quatre heures du matin, c’est difficile à vivre. Il n’y a aucune volonté de porter atteinte aux animaux. J’ai contacté une ferme pédagogiqu­e à Saint-Cézaire-sur-Siagne qui se dit prête à trouver quelqu’un pour accueillir les coqs dans de bonnes conditions, car la ville ce n’est pas pour eux. La balle est dans le camp de la famille Yengo. »

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(Photos Maxime Rovello) Il a été un temps envisagé d’opérer César (ci-dessus) et Rubis, les deux coqs de la famille Yengo, pour les faire cesser de chanter. Une opération considérée comme de la mutilation par les vétérinair­es.
 ??  ?? Dans les bras de la fille d’Yvette Yengo, l’un des deux coqs dont les chants sont responsabl­es du conflit de voisinage.
Dans les bras de la fille d’Yvette Yengo, l’un des deux coqs dont les chants sont responsabl­es du conflit de voisinage.
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Les coqs et les poules peuvent se balader à loisir dans le jardin de la propriété.

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