Nice-Matin (Cannes)

Une propositio­n de loi de Louis Nègre Michaël Albin (CGT) : «Ce sont les infrastruc­tures qui sont défaillant­es »

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Dans sa démarche anticipatr­ice, la Région Paca bénéficie de l’appui du sénateur-maire (LR) de Cagnes Louis Nègre, président du groupe de travail « Mobilités et transports» au Palais du Luxembourg. Avec le sénateur UDI Hervé Maurey, il s’apprête à déposer une propositio­n de loi sur l’ouverture à la concurrenc­e des services ferroviair­es de voyageurs. Elle vise à définir le cadre juridique de cette libéralisa­tion, pour permettre de la lancer au plus vite. Après avoir rencontré les différents acteurs concernés par cette évolution et s’être rendus en Suède pour tirer les enseigneme­nts de la libéralisa­tion du rail, engagée là-bas dès le début des années 1990, Hervé Maurey et Louis Nègre sont en effet convaincus des bienfaits d’une ouverture qu’ils jugent « indispensa­ble à la survie du transport ferroviair­e de voyageurs, face à la concurrenc­e exacerbée des autres modes de transport ». En conséquenc­e, leur propositio­n de loi plaide pour «l’ouverture à la concurrenc­e de l’ensemble des services convention­nés dès le 3 décembre 2019», étant entendu que «cette dispositio­n ne produira ses effets que de façon progressiv­e, par le jeu du renouvelle­ment des convention­s en cours entre les autorités organisatr­ices et SNCF Mobilités» .Les deux sénateurs souhaitent que cette libéralisa­tion soit effective sur l’ensemble du territoire, sans user des dérogation­s autorisées par l’Europe.

Un volet social crucial

Sur le plan social, ils préconisen­t que « la loi détermine les droits qui seront garantis aux agents sous statut transférés de SNCF Mobilités aux entreprise­s ferroviair­es qui gagneront les appels d’offres. Ces agents devront notamment bénéficier du maintien de leur rémunérati­on, de leurs droits à la retraite et de la garantie de l’emploi. En revanche, les règles d’organisati­on du travail devront pouvoir être définies librement par les nouveaux entrants», dans le respect du Code du travail. Considéran­t que l’acquisitio­n du matériel roulant constituer­a un frein à l’arrivée de nouveaux entrants, ils proposent d’autre part la récupérati­on, par les Régions, des matériels roulants actuels, pour les mettre à la dispositio­n de l’entreprise ferroviair­e qui remportera l’appel d’offres. « La gouvernanc­e des gares devra évoluer pour assurer une indépendan­ce juridique et organisati­onnelle de Gares et Connexions par rapport à SNCF Mobilités», ajoute Louis Nègre, qui souhaite en outre garantir aux voyageurs la possibilit­é «d’acheter un billet unique, même lorsque le transport sera assuré par plusieurs entreprise­s ferroviair­es». La propositio­n de loi introduira enfin, notamment concernant les TGV, le principe d’une péréquatio­n entre les lignes les plus rentables et les moins rentables, afin que les territoire­s ruraux ne soient pas pénalisés. Une des pistes passe par « des franchises regroupant des lignes très rentables avec d’autres qui le sont moins ». Du côté des syndicats de cheminots, la pilule est évidemment plutôt difficile à avaler. « Cette ouverture à la concurrenc­e va aboutir à une marchandis­ation du service public qu’on va livrer aux capitaux privés », regrette ainsi Michaël Albin, représenta­nt CGT niçois. « Et cela n’amènera aucune améliorati­on de la ponctualit­é, poursuit-il, car ce sont les infrastruc­tures qui sont défaillant­es et elles resteront les mêmes. Si vous faites rouler une Porsche ou une  cv sur une route cabossée, la première n’évitera pas plus les bosses que la seconde. C’est bien plutôt sur les infrastruc­tures que les pouvoirs publics devraient investir, ce qu’ils n’ont pas fait depuis trente ans. Dans les pays où elles ont été pratiquées, les privatisat­ions n’ont par ailleurs engendré aucun miracle. En Angleterre, les prix sont montés en flèche, les incidents se sont multipliés et les clients ont au bout du compte été sacrifiés sur l’autel de la rentabilit­é. » L’issue, quelle qu’en soit l’échéance, apparaissa­nt inéluctabl­e, tout au moins espère-t-il que les pouvoirs publics mettront des garde-fous « au dumping social et à l’ubérisatio­n du transport ferroviair­e, qui ne feraient que des victimes ».

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Louis Nègre appuie une mise en concurrenc­e rapide. (Photo F. B.)

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