Nice-Matin (Cannes)

Précarité des AVS: «Les enfants handicapés en pâtissent»

- LOUIS GOHIN lgohin@nicematin.fr source : ministère du Travail.

Une AVS, auxiliaire de vie scolaire, est une personne qui s’occupe d’un ou plusieurs enfants handicapés à l’école. La Cannettann­e Katy Strazzeri a choisi ce métier depuis février dernier. Elle a découvert avec stupeur la précarité du métier et ses conséquenc­es non seulement pour elle ses collègues, mais pour les enfants qu’elle accompagne. Pour la rentrée, la secrétaire d’État chargée des Personnes handicapée­s Sophie Cluzel a annoncé que 50 000 assistante­s travailler­aient en contrat aidé (AVS) en 20172018, plus 30 000 en contrat de droit public (AESH, accompagna­nt d’élève en situation de handicap).

« Le contrat aidé n’est pas adapté »

62,5 % des assistante­s travaillen­t donc en contrat aidé, plus précisémen­t en contrat unique d’insertion (CUI). Ce statut est censé «faciliter l’insertion profession­nelle des personnes sans emploi rencontran­t des difficulté­s sociales et profession­nelles particuliè­res d’accès à l’emploi » (1). «Le contrat aidé n’est pas adapté pour s’occuper des enfants handicapés », affirme Katy Strazzeri. Premier problème, la loi permet d’embaucher sous ce type de contrat à 20 h hebdomadai­res minimum (environ 685 euros nets par mois). Mais légalement, un enfant handicapé a besoin d’une aide de 12, 18 ou 24 h. « Résultat, constate Mme Strazzeri : les AVS s’occupent souvent de deux enfants… 10 h par semaine. C’est mon cas : je travaille 10 h dans une école à Cannes et 10 h dans une autre au Cannet. Les parents sont alors mis devant le fait accompli sans qu’on leur demande leur avis. » Autre difficulté : « nous ne sommes pas formées, ou alors plusieurs mois après avoir commencé » , affirme-t-elle. «Et comme, selon la loi, nous avons l’obligation de trouver un emploi de droit commun, nous risquons à tout moment de partir sans aucun préavis. Donc on forme les gens en retard… pour ne peut-être pas les embaucher par la suite! Et surtout, les enfants peuvent se retrouver sans AVS du jour au lendemain. Cela peut s’avérer catastroph­ique pour certains d’entre eux. »

« Travailler avec eux est très enrichissa­nt »

Elle pointe aussi du doigt certains établissem­ents qui « ne transmette­nt pas aux AVS le plan personnali­sé de scolarisat­ion (PSE) » ou dossier de l’enfant handicapé. « Comment travailler dans ces conditions ? Surtout que ce sont les enfants qui en pâtissent », constate-t-elle. Aujourd’hui, son métier lui plaît, mais elle envisage parfois de changer d’activité. « Travailler avec eux est très enrichissa­nt! J’aimerais continuer mais financière­ment, je ne sais pas où je vais.» Elle demande au gouverneme­nt de « donner enfin les moyens nécessaire­s » : « Emmanuel Macron, lors de sa campagne, a montré qu’il était conscient de la situation. Il lui faut maintenant joindre l’acte à la parole. AVS, c’est un métier. Or aujourd’hui, il n’est pas considéré comme tel. « Le gros problème vient de là. Plusieurs de mes collègues ne sont pas reconnues de leurs supérieurs, des instituteu­rs… parce qu’elles sont en contrat aidé. Moi-même, à cinq jours de la rentrée, je n’avais toujours pas reçu mon emploi du temps… C’est incroyable, le retard qu’a la France comparé aux pays nordiques, où chaque enfant handicapé a une assistante. Si on ne s’en occupe pas quand ils sont petits, leur situation devient bien plus compliquée à gérer plus tard. »

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Katy Strazzeri interpelle le président de la République pour faire reconnaîtr­e son activité comme « un métier ». (Photo L.G.)

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