« Il y a une crainte que Macron soit le Président des riches »
Le dernier sondage Ifop ne crédite plus Emmanuel Macron que de 46 % d’opinions favorables. Soit un point de… moins que François Hollande, qui avait déjà battu des records d’impopularité à pareille saison en 2012. Le politologue Roland Cayrol analyse les raisons de ce désamour.
Pourquoi cette chute si rapide ?
Les premiers pas d’Emmanuel Macron lui ont permis d’asseoir sa présidentialité et de montrer sa capacité d’incarnation de la fonction au niveau international. Mais cela a encore plus accentué le regret chez certains Français, y compris ceux ayant voté pour lui, qu’il ne s’intéresse pas assez à eux. Car il est, avant tout, attendu sur les dossiers économiques et sociaux. C’est là que la France a besoin de voir que des choses sont faites. Or, non seulement il n’y a pas eu d’explication de la politique menée sur ce terrain-là, mais une série de petites nouvelles, comme la baisse de euros des APL, la modification de l’ISF ou la hausse de la CSG dont vont pâtir les retraités, sont venues nourrir la crainte que Macron soit d’abord le Président des riches.
Il mène pourtant une politique qu’il avait largement annoncée lors de sa campagne…
Absolument, il fait ce qu’il avait dit et il le fait même de manière sourcilleuse. Le problème pour Emmanuel Macron tient au fait que les ordonnances travail, le premier texte de cette rentrée, sont perçues comme un texte en faveur de l’entreprise. Il parle de flexi-sécurité, mais on est principalement sur un texte de flexibilité. Les volets suivants, sur l’assurance-chômage et la formation, apporteront plus de satisfactions sur l’aspect sécurité, mais ils ne sont pas encore en magasin. Et le ressenti, légitime ou pas, est celui d’un manque d’équilibre.
Le chef de l’Etat n’a-t-il pas aussi trop lourdement insisté sur son côté « jupitérien » ?
Je ne crois pas. On ne sent pas dans l’opinion de vraie critique là-dessus. En revanche, le fait d’être jupitérien n’interdit pas et fait même attendre un peu plus une parole directe du Président. Il doit expliquer son cap, prendre le peuple à témoin et le mettre dans le coup. L’interview donnée au Point ne solde pas le besoin populaire d’une expression directe, à mon avis par la télévision, moyen par excellence du contact avec un maximum de Français.
Comment les partis d’opposition vont-ils, eux, réussir à sortir du chaos dans lequel la plupart sont tombés ?
Je crois qu’on est parti pour deux ans où les grands partis de gouvernement d’avant resteront inaudibles. Le PS comme LR auront du mal à faire entendre des solutions alternatives, même si la poursuite du gauche et droite de Macron va les conforter dans l’idée qu’ils pourront restaurer vraiment la gauche ou la droite. Le seul qui surnage est Mélenchon. Non qu’on sache ce que sont ses solutions, mais parce que lui fait vraiment de l’opposition.