Nice-Matin (Cannes)

L’ambivalenc­e présidenti­elle

- Par DENIS JEAMBAR

Nul ne peut plus en douter, Emmanuel Macron est un adepte de la nouveauté. On a pu le vérifier hier avec la promulgati­on devant la presse de la loi sur la confiance dans la vie politique. Une mise en scène méticuleus­e, le chef de l’Etat assis à son bureau, stylo à la main, flanqué de deux ministres debout, transformé­s en potiches, Nicole Belloubet, la Garde des Sceaux, et Christophe Castaner, le secrétaire d’Etat chargé des relations avec le Parlement. Du jamais-vu sous la Vème République que cette théâtralis­ation mais du déjà-vu aux Etats-Unis. Depuis son élection, Donald Trump multiplie ce genre de spectacle ! La référence n’est pas des plus flatteuses mais Emmanuel Macron, de toute évidence, voulait innover et démontrer, comme il l’a dit, « que les promesses et engagement­s de campagne, sur ce sujet, ont été tenus. » Dont acte, au demeurant. Cette opération de communicat­ion ne pourrait être qu’anecdotiqu­e. D’une certaine manière, d’ailleurs, elle l’est : il n’est pas sûr qu’elle change le cours préoccupan­t de la popularité du président. Néanmoins, elle est révélatric­e de la méthode Macron et, donc, de son personnage. Il est évident que le chef de l’Etat entend se démarquer de tous ses prédécesse­urs qu’il a accueillis, pourtant, hier à l’Elysée, afin de célébrer la désignatio­n de Paris pour organiser les JO de . François Hollande et Nicolas Sarkozy ne sont pas rancuniers puisqu’ils ont accepté de poser à ses côtés alors qu’il les avait traités de « fainéants » quelques jours plus tôt (à moins que ce ne soit les Français, on ne sait plus!). Mais Emmanuel Macron semble prendre un malin plaisir à souffler le chaud et le froid, à pratiquer la provocatio­n pour, ensuite, se poser en pacificate­ur. C’est la poursuite de la stratégie du « et en même temps ». Elle est peut être habile à ses yeux, reste que, pour l’heure, elle paraît surtout troubler les Français. Et même le Premier ministre qui, hier, en visite en Allemagne a déclaré : « Je ne dis pas, je ne dirai d’ailleurs jamais, que mes prédécesse­urs n’ont rien fait ou mal fait ». Première prise de distance, certes aussitôt nuancée mais qui prouve qu’Emmanuel Macron peut aussi dérouter le chef du gouverneme­nt. Autre zig-zag, le comporteme­nt du président avec la presse. Après avoir voulu la tenir à distance, il cherche à renouer le lien avec elle et à l’utiliser. C’est, sans doute, l’une des leçons qu’il a tirée de sa dégringola­de dans les sondages. Il a même renoncé à la plainte qu’il avait déposée cet été contre un paparrazi. Certes, cela ne veut pas dire que son point de vue sur les médias a changé et qu’il accepte de se soumettre à leurs exigences, « en même temps » il a compris qu’il ne pouvait les dresser contre lui. Bref, en toutes choses, Emmanuel Macron fait preuve d’un art consommé de l’ambivalenc­e. C’est l’un de ses traits majeurs.

« Du jamais-vu sous la Vème République »

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