Le chaos après le départ de Florian Philippot ?
Démis de ses délégations la veille, le vice-président porteur de la ligne souverainiste a quitté le FN, accusé de céder à « ses vieux démons ». En interne, son départ fait surtout des heureux
Les événements se sont donc précipités, de manière inéluctable. Florian Philippot a claqué la porte du Front national. Il n’avait plus guère d’autre issue, après que Marine Le Pen lui avait retiré la veille ses délégations à la stratégie et à la communication, tout en le maintenant pour la forme à son poste de vice-président. Une décision qui faisait suite au refus de Philippot de mettre un terme au « conflit d’intérêts » posé par sa double casquette de vice-président du FN et de responsable de l’association Les Patriotes, lancée mi-mai.
Ça flingue à tout-va
« Bien sûr que je quitte le Front national », a annoncé Florian Philippot hier matin sur France 2, croix de Lorraine à la boutonnière. « Puisqu’on m’a dit que j’étais vice-président à rien… Je n’ai pas le goût du ridicule, je n’ai jamais eu le goût de ne rien faire ». « Le FN est engagé dans un retour en arrière terrible et rattrapé par ses vieux démons », a ajouté l’eurodéputé de 35 ans, sans préciser les contours de son avenir : «Je suis gaulliste, je n’ai jamais renoncé à mes convictions, y compris en arrivant au FN, je me battrai donc. Sous quelle forme, on verra bien, ce n’est pas le moment d’en parler. » Son départ n’a pas manqué de faire des heureux au sein d’un mouvement qui ne l’a jamais considéré comme l’un des siens, en dépit du soutien inconditionnel que lui a longtemps apporté Marine Le Pen, depuis qu’il était devenu en 2011 son directeur stratégique de campagne, à peine arrivé au FN. Anecdote révélatrice, Philippot avait essuyé il y a quelques jours une série de tweets vengeurs, pour s’être fait photographier en train de manger un couscous à Strasbourg. Ambiance… Plusieurs cadres frontistes ont cessé hier de se contenir et lui sont tombés dessus à bras raccourcis. A commencer par Louis Aliot, le compagnon de Marine Le Pen, cinglant : « Le Front national va enfin connaître l’apaisement face à un extrémiste sectaire, arrogant et vaniteux qui tentait de museler notre liberté de débattre. » Jérôme Rivière, ex-député UMP niçois de 2002 à 2007, aujourd’hui rallié au FN, n’a pas été en reste, stigmatisant «un homme replié sur lui, plein de haine et de morgue ». D’autres, plus nuancés, ont en revanche salué sa force de travail et ses talents d’organisateur, par-delà un ego surdimensionné que peu semblent vouloir contester.
Cap sur mars
Quelques-uns de ses lieutenants ont d’ores et déjà annoncé leur départ du FN dans la foulée de Florian Philippot. Notamment l’eurodéputée Sophie Montel, évincée de la présidence du groupe FN en BourgogneFranche-Comté cet été. Tout l’enjeu pour le FN est désormais de savoir si ce départ va achever de déstructurer un parti déjà lézardé. « Je ne crois pas du tout que Florian Philippot entraînera avec lui beaucoup de cadres », a minimisé Bruno Gollnisch. Le député Gilbert Collard a lui circonscrit ce clash à une fracture relationnelle, nuançant sa portée idéologique: «On voudrait nous faire croire que Philippot s’en va et que les fachos reviennent. C’est déplacé. On ne va pas faire un concours pour savoir qui est facho ou qui ne l’est pas. » Robert Ménard, maire de Béziers proche du FN, n’a pas tout à fait la même perception de l’événement: «Son
départ est une bonne nouvelle. Maintenant, à Marine Le Pen de ne pas faire du Philippot sans Philippot. Il faut surtout et avant tout ne plus reprendre sa ligne politique. » Le congrès prévu en mars, pour définir une fois pour toutes la ligne du FN, vaudra en tout cas son pesant de cacahuètes. Et selon l’ampleur du coup de barre à droite qui y sera donné, il ne sera pas non plus sans incidence sur la recomposition de la droite dite « républicaine ».