Nice-Matin (Cannes)

Le palais du dogue

Prêté pendant trois ans à Lille (2014-2017), Rony Lopes va retrouver l’enceinte lilloise. Sur le Rocher, le Portugais prend petit à petit ses marques après un parcours atypique

- MATHIEU FAURE

A21 ans, Rony Lopes parle portugais, espagnol, anglais et français. Ce n’est pas rien pour un gamin qui était plutôt au dernier rang à l’école. Mais le parcours du milieu de terrain monégasque n’est pas anodin. Né au Brésil d’une mère angolaise et d’un père brésilien, le petit « Rony » débarque à 4 ans au Portugal pour y rejoindre sa grandmère. Autrement dit, le numéro 20 de l’ASM est ce qu’on appelle un citoyen du monde. Un garçon qui a déjà joué dans trois pays et connu cinq clubs à seulement 21 ans. Le Monégasque ne sera d’ailleurs pas dépaysé en arrivant à Lille. Et pour cause, il vient de passer trois saisons dans le Nord (72 matches, 12 buts). « Je garde de bons souvenirs de Lille, c’est là que j’ai vraiment débuté en profession­nels, j’ai beaucoup appris pendant trois ans... J’avais besoin de découvrir autre chose que la réserve d’un club profession­nel, c’était important de passer le cap », rembobine Rony Lopes dans un très bon français.

Dans son premier club, il se fait un prénom

Car en 2014, avant de faire le grand saut pour le LOSC à 18 berges, le petit milieu offensif évolue à Manchester City. Enfin, en équipe réserve. Comment un Portugais de 18 ans, né au Brésil, se retrouve dans le Nord de l’Angleterre si jeune ? C’est un peu l’histoire de sa vie. D’ailleurs, quelle place occupe le Brésil dans le coeur de Rony ? « C’est mon pays de naissance mais je ne m’en souviens pas beaucoup. J’ai pourtant toute la famille de mon père qui vit là-bas, notamment ma grand-mère, poursuit-il C’est un pays spécial pour moi. On a dû quitter le Brésil très tôt, j’avais 4 ans, on n’avait pas d’argent alors on a rejoint mon autre grand-mère au Portugal ». La famille Lopes s’installe alors à Vila Nova de Poiares, une petite bourgade de 8000 habitants située au centre du Portugal. C’est pourtant là que le jeune Marcos Paulo Mesquita Lopes va devenir Rony. « J’étais fan de Ronaldo, j’avais toujours son maillot. Jeune, à Poiares, mon premier coach ne connaissai­t même pas mon nom et comme j’avais toujours un maillot de Ronaldo, on m’a appelé Ronaldo, puis c’est devenu Rony mais personne ne m’a jamais demandé mon vrai prénom » rigole-t-il. Petit meneur de jeu technique et buteur, le petit Rony se fait vite une réputation chez les jeunes. À tel point que Benfica Lisbonne s’amourache du petit gaucher. Et voilà qu’à 12 ans, Rony Lopes rejoint la capitale portugaise. « C’était à 300 kilomètres de chez nous. Pendant un an, on a fait les allers-retours chaque semaine mais la fatigue était telle que j’ai perdu pied scolaireme­nt, se souvient le Monégasque. On a donc pris la décision d’intégrer définitive­ment le centre, à 12 ans. Je me suis retrouvé seul, loin de ma famille. A cause de son boulot, je n’ai pas vu mon père pendant trois mois. Ça m’a fait grandir. C’est là que je me suis fait des amis, ce sont des moments importants dans une carrière. » Chez les jeunes Benfiquist­es, Lopes croise Bernardo Silva, Renato Sanches, Gonçalo Guedes où l’actuel Guingampai­s Rebocho. Mais la star, c’est Rony. Tous les scouts d’Europe viennent voir le gaucher. La suite ? Un départ pour l’Angleterre et Manchester City à seulement 15 ans. Rony Lopes : «Ona pris la décision de tenter l’aventure anglaise. Je pensais que c’était le moment de faire autre chose. Je suis parti avec mon père. Il a fallu s’adapter à tout : la langue, le climat, la nourriture... J’étais le seul à ne pas parler anglais chez les jeunes, je ne parlais à personne, c’était très compliqué au début ». Sur place, il croise un certain Karim Rekkik, lui aussi bizut à l’Academy de City. Mais intégrer l’équipe fanion de City est compliqué. A Manchester, il comprend vite qu’il sera difficile de percer pour les jeunes du cru. Alors après trois saisons en réserve et une campagne de Youth League 2013-2014 aboutie (5 buts), il file à Lille en prêt avant d’être transféré à Monaco en 2015 pour 10 millions d’euros. Sur le Rocher, il sera de nouveau prêté à Lille pendant 2 ans. Le temps d’apprendre le métier malgré des blessures musculaire­s récurrente­s. Mais cette fois, sa famille le suit au quotidien. Notamment son père qui a tout plaqué pour s’occuper de son héritier. « Mon père a commencé à me suivre partout, il vit avec moi à Monaco. Depuis deux ans, il me suit à tous mes matches, domicile et extérieur. Quand le match n’est pas bon, on ne discute pas du tout après la rencontre... on laisse passer plusieurs jours avant de se dire les choses. Mon père me dit toujours la vérité », conclut le gaucher. Samedi, après son premier but sous les couleurs de l’AS Monaco face à Strasbourg, le débrief d’après-match a dû être positif entre le papa et son fiston. Qu’en sera-t-il ce soir ?

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(Photo Jean-François Ottonello) Rony Lopes, buteur contre Strasbourg samedi dernier au Louis-II.

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