Nice-Matin (Cannes)

Un prix Nobel au Festival du livre

On la présente parfois comme une «écodéesse». Figure de proue de la lutte contre les OGM et grande défenderes­se de la biodiversi­té, elle ne craint pas la controvers­e, ses idées bien ancrées…

- PROPOS RECUEILLIS PAR FRANCK LECLERC

Entre deux conférence­s, une séance de dédicace et des selfies avec un public passionné à Mouans-Sartoux. L’Indienne Vandana Shiva, prix Nobel alternatif en , met la femme au coeur de l’écologie et du développem­ent. En dénonçant sans relâche les OGM, à l’origine selon elle du drame d’innombrabl­es petits paysans.

Paix, biodiversi­té, droit des peuples à l’autodéterm­ination: c’est un bon résumé?

Je me bats contre quiconque exploite autrui avec brutalité. Je me bats pour la biodiversi­té. Je me bats pour la paix. En effet, je me définis dans tout ce qui vient d’être dit.

Comment votre combat a-t-il commencé?

Avant de partir pour le Canada où je devais poursuivre mes études en physique quantique, j’ai voulu me promener une dernière fois dans ma région du Penjab, tout près de l’Himalaya. J’ai découvert que la végétation avait disparu, remplacée par des pommiers qui n’ont pas tenu. Je me suis alors rapprochée du mouvement des Chipkos, ces femmes qui embrassent les arbres pour les défendre contre les tronçonneu­ses. C’est ainsi que mon activisme a débuté. Par la suite, j’ai consacré mon énergie à la lutte contre toutes les formes de destructio­n de la planète.

Les OGM, c’est l’ennemi ?

Les OGM sont un énorme mensonge. Sur le triple plan légal, scientifiq­ue et éthique. Les OGM réduisent la biodiversi­té et créent une dépendance, via les royalties sur les semences que les petits paysans ne peuvent pas payer. En Inde,  d’entre eux se sont suicidés depuis . Rien que la semaine dernière,  autres ont perdu la vie à cause des pesticides. Plus de mille personnes ont attaqué en justice.

Al Gore montre dans Une suite qui dérange les efforts du gouverneme­nt indien lors de la conférence sur le climat de Paris…

De nombreux gouverneme­nts ont un côté schizophrè­ne. Devant de bonnes décisions, nous disons bravo. Quand ce n’est pas le cas, nous nous levons et nous opposons.

Vous dites qu’en achetant une chemise à  euros, on cause des dommages ?

Absolument. Nous ne pouvons plus nous comporter en consommate­urs inconscien­ts, complices de crimes contre la Terre et contre les hommes. Nous avons d’ailleurs dénoncé le mensonge qui a été entretenu sur le coton transgéniq­ue.

L’avenir, c’est le bio?

Aujourd’hui, les petits fermiers produisent  % de nos aliments. Ils pourraient nourrir deux fois la population de la planète. Nous n’avons pas besoin des OGM.

Et si vos détracteur­s vous présentent comme une activiste anti-progrès?

Le fait que je sois physicienn­e ne leur permet pas de me traiter comme une illuminée. J’ai renoncé à ma carrière pour servir la Terre. Mais les enseigneme­nts que j’ai reçus sont acquis. Savoir que je suis capable d’analyser des données, cela peut faire peur à certains.

Ni écodéesse ni gourou?

Si j’avais voulu être un gourou, j’aurais bâti un énorme ashram et j’aurais fait beaucoup d’argent. Moi, j’aime les gens et j’aime la liberté.

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(Photo Franz Chavaroche) Hier à Mouans-Sartoux en compagnie de Françoise Nyssen, ministre de la Culture.

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