Nice-Matin (Cannes)

Le Mas de l’Olivine retrouve de sa superbe

Vieux de plus de 200 ans, le domaine de Peymeinade a failli disparaîtr­e avant que l’un des héritiers n’y revienne pour perpétuer la tradition familiale. Celle de cultiver des plantes à parfums

- DIANE EGGERMONT deggermont@nicematin.fr

Une dizaine de figuiers, plus de trois cents oliviers, un ancien lavoir, et le calme. Presque absolu. C’est ici qu’est niché, depuis le XVIIIe siècle, le Mas de l’Olivine, superbe bastide sur deux étages aux tons ocre et aux volets couleur vert provençal. Difficile d’imaginer que la demeure – qui appartient aux Bortolini depuis les années quarante –, aurait pu ne jamais retrouver son lustre d’antan. « Quand j’ai décidé de la restaurer, la nature avait repris ses droits », explique Thierry Bortolini, troisième génération de la famille à y habiter.

Cultivateu­r puis jardinier…

L’histoire familiale commence en 1942, lorsque son grand-père arrive d’Italie. Carmel Bortolini, paysan, fuit alors le régime fasciste et arrive en France sans savoir parler ni écrire la langue du pays. Employé temporaire­ment dans une carrière de pierres, ses premiers salaires lui permettent d’acheter le domaine. Sur la propriété, du jasmin s’épanouit librement et donne l’idée à l’homme de se lancer dans la culture de la plante ainsi que d’oliviers. Une période florissant­e qui cesse en 1971. Date à laquelle « le cours des matières premières grassoises s’effondre, se rappelle son petit-fils. Mon grand-père refuse de brader son jasmin comme ses acheteurs (les industriel­s, NDLR) le lui demandent et préfère le jeter ». C’est la fin d’une époque. Il faut se reconverti­r pour continuer à vivre. Carmel Bortolini, réfléchit, se renseigne, et remarque que les jardins d’ornement ne sont plus réservés uniquement aux familles qui ont de l’argent. «Les moins aisés, qui se servaient de leurs jardins pour se nourrir jusqu’alors, allaient également avoir besoin de jardiniers pour entretenir leurs terrains .» La transition est en marche. Le désormais jardinier commence par arroser et tailler pour ses voisins. La petite entreprise devient grande et s’implante aussi à Sainte-Maxime où le grand-père finit par s’installer à temps plein avec sa famille. Le domaine de Peymeinade est laissé au soin d’un régisseur, le beau-frère de Carmel. Le terrain devient une pépinière. « On plantait sur le terrain des végétaux qui étaient ensuite proposés à la vente aux clients. Cyprès, laurier-sauce, laurier-rose, romarin… Ce que mon grand-père vendait était ensuite entretenu par les soins de ses employés .»

...Pour revenir à la culture de la plante à parfums

Le temps passe, le régisseur vieillit, la concurrenc­e fait rage avec l’apparition de pépinières profession­nelles et le Mas de l’Olivine est petit à petit laissé à l’abandon dans les années 80. Carmel Bortolini décède, son fils reprend le flambeau dans le Var en tant que jardinier et pépiniéris­te. Thierry, le fils de ce dernier, né dans les plantes, devient, lui, le bras droit de Jean Mus. « J’avais 6 000 personnes sous mon autorité. » Le paysagiste voyage beaucoup, habite dans le Var, à Nice... Une vie à cent à l’heure qui, dans les années 2000, ne lui convient plus. Il ralentit le rythme, pense à la maison familiale abandonnée depuis plusieurs années et change de vie. « Je ne m’amusais plus, raconte ce fan du film Out of Africa. Depuis tout petit j’ai toujours rêvé d’avoir une ferme en Afrique et d’y cultiver, du café du thé, etc. Et puis un jour, j’ai fini par me rendre compte que j’avais un endroit pour assouvir ma passion. » Thierry Bortolini décide de remettre en état le domaine, tombé en décrépitud­e, qui appartient toujours à sa famille. Arbres dans la maison, absence de toitures… « C’était la belle au bois dormant, il y avait tout mais il fallait secouer et réveiller un peu tout le monde ».

Encore  hectare à demi à planter

La première tranche de travaux dure trois ans. L’homme emménage en 2004 dans la maison dépoussiér­ée et peut enfin semer sa première plante à parfum, de l’iris, en 2009. «Le temps de me jeter à l’eau ». La rose de Mai, le jasmin, la violette, le lys, la tubéreuse et la fleur d’oranger suivront et le succès est au rendezvous. « Cette année, on va replanter de la rose et du jasmin parce qu’on s’aperçoit qu’on a des stocks limités. Augmenter les quantités de ce qui existe déjà plutôt que d’essayer d’introduire une nouvelle espèce c’est bien. » Car le domaine n’est pas extensible et il ne reste plus qu’un hectare et demi à planter. À côté de la culture de plantes à parfums, les propriétai­res se diversifie­nt et accueillen­t des enfants les après-midi, mais aussi des réceptions de mariage (70 invités maximum), et organisent même des visites patrimonia­les (avec ou sans rendez-vous et en anglais pour ceux qui le souhaitent, « en roulant les r », plaisante Thierry Bortoloni)... De quoi continuer à faire vivre le Mas de l’Olivine pendant plusieurs années et le conserver dans le giron familial.

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Le couple ramasse ici des citrons qui seront ensuite transformé­s en vin. Les activités sont multiples sur le domaine familial. Ici, un atelier est organisé.

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