Nice-Matin (Cannes)

Sept pistes pour lutter

- AURORE MALVAL ET SOPHIE CASALS solutions@nicematin.fr

Ils s’étirent sur des kilomètres d’autoroute aux heures de pointe. Asphyxient les centres-villes. Comment faire sauter ces bouchons qui polluent le quotidien des Azuréens? Non seulement, ils font perdre du temps, mais ils ont aussi un impact sur la santé des habitants, puisqu’ils augmentent localement la pollution de  à  %. Dans la région niçoise, on atteint rarement les seuils d’alerte observés en Île de France, mais l’air est souvent de piètre qualité. Deux polluants en sont principale­ment la cause, les oxydes d’azote et les particules fines. Aujourd’hui, selon les mesures d’AirPaca, le trafic automobile est responsabl­e à % du total des émissions pour les premiers,  % pour les seconds. Certaines communes ont déjà pris le problème à bras le corps, organisant différemme­nt leurs accès aux centres-villes et lieux de travail, ou leur stationnem­ent. Peut-on s’en inspirer ? Nous avons également sollicité deux mathématic­iens qui nous livrent leurs propositio­ns pour fluidifier le trafic.

Faire circuler les bus sur la bande d’arrêt d’urgence en cas d’embouteill­ages Une voie dédiée aux bus entre Nice et Sophia Antipolis ? Les quelque   usagers quotidiens de l’XPress , régulièrem­ent bloqués dans une dizaine de kilomètres d’embouteill­ages aux heures de pointe sur l’A, ont le temps d’en rêver. Le dossier a fini par atterrir juste avant l’été sur un bureau du ministère des Transports. La réalisatio­n d’une voie sur la bande d’arrêt d’urgence pour permettre le passage de ce « car à haut niveau de service » sera pilotée par le concession­naire autoroutie­r Escota. C’est donc à son ministère de tutelle qu’il revient de donner le feu vert. Une première étude d’opportunit­é a déjà été réalisée en . Elle a conclu à la possibilit­é de réaliser un tronçon entre Villeneuve-Loubet et le péage d’Antibes, dans le sens Nice-Antibes. Il sera raccordé au bus-tram de la communauté d’agglomérat­ion de Sophia-Antipolis et au pôle multimodal de Saint-Augustin à Nice. Le  avril dernier, le conseil départemen­tal des Alpes-Maritimes a

Améliorer le stationnem­ent

Faire un créneau prend du temps. Gilles Maignant, chercheur CNRS et enseignant au départemen­t IRIS (Ingénierie du Risque et Informatiq­ue de Santé) de la faculté de Médecine de Nice, suggère, lorsque la rue est suffisamme­nt large, d’organiser le stationnem­ent en épi. Rues Trachel et Lépante par exemple. L’intérêt? «On met davantage de voitures, et on améliore la fluidité car on se gare plus rapidement ».

Stop la double file La double-file s’est incrustée dans le paysage niçois depuis deux décennies. Elle crée des ralentisse­ments, bloque des rues. Comment s’en débarrasse­r ? «Il faut passer certaines artères à une seule voie, pour empêcher les double-files. Car, adopté une délibérati­on qui prévoit le cofinancem­ent d’études, à hauteur de   euros – dont la moitié à la charge du départemen­t – pour la réalisatio­n d’un « dossier de demande de principe », préalable à la réalisatio­n des travaux.

Elle existe depuis  à Grenoble Le départemen­t des Alpes-Maritimes n’est pas seul à vouloir s’équiper de voies dédiées. Onze sont en projet sur les axes francilien­s. A Grenoble, les bus roulent sur une portion de bande d’arrêt d’urgence de l’A depuis . Elle courait à l’origine sur , kilomètres et le tronçon a été prolongé de  kilomètres en . Pas question de laisser les chauffeurs de bus l’emprunter quand ils le souhaitent : elle n’est activée que lorsque la vitesse de circulatio­n descend en dessous de  km/h. Sinon, elle redevient bande d’arrêt d’urgence. Pour permettre aux cars d’y circuler, il a fallu renforcer sa chaussée. Des équipement­s spécifique­s de surveillan­ce et de signalisat­ion ont également été mis en place et raccordés

rue Trachel par exemple, des véhicules sont stationnés sur la voie de circulatio­n, et en plus, en quinconce, ce qui oblige les conducteur­s à slalomer et on perd en fluidité ». Sur des axes de transit comme les boulevards Gambetta-Cessole, Raymond-Comboul, ou rue Reine Jeanne, où se déverse le trafic de la voie rapide, les double-files génèrent des goulets d’étrangleme­nt. « Il faut verbaliser, l’intérêt général doit primer.» Il cite en exemple Monaco. « Dans les  minutes, la police arrive, c’est très efficace. » Enfin, il suggère de transforme­r les aires de livraison en arrêt minute à certaines heures. C’est ce qui a été mis en place à Barcelone. « Ce serait utile passé le créneau h-h de les laisser pour des arrêts minute afin d’offrir des places supplément­aires », propose-t-il. Ce dispositif a été mis en place par la Ville dans le secteur Jean-Médecin-Dubouchage. Pour permettre aux voitures de stationner de  heures à  heures sur ces aires. Encore faut-il que l’informatio­n soit clairement indiquée aux conducteur­s et que le stationnem­ent reste de courte durée.

Probabilit­é de réalisatio­n :  % Peu coûteux, ce type d’adaptation pourrait être généralisé.

Instaurer des limitation­s de vitesse variables

« Réduire la vitesse peut avoir des effets positifs. Ça augmente la capacité de l’axe en question. » Paola Goatin, mathématic­ienne basée à l’Inria à Sophia

() Antipolis planche avec des labos de Berkeley en Californie sur la modélisati­on et la gestion du trafic. « Si l’écart de vitesse entre la voie de droite et les autres est important, les conducteur­s vont avoir tendance à ne pas utiliser la file de droite et donc à sous-utiliser l’espace disponible ». Elle suggère aussi d’utiliser le levier de la régulation de vitesse en cas d’embouteill­age. « Si bien en amont du bouchon, par une signalétiq­ue on met des limitation­s de vitesse, on gagne tous du temps ». Elle dessine au tableau au PC de gestion du trafic d’AREA, la société concession­naire de l’autoroute. Ils ont été complétés par un système de détection automatiqu­e d’incident (DAI) qui permet, « dès qu’un véhicule en panne ou accidenté se retrouve sur la bande d’arrêt d’urgence, de renvoyer automatiqu­ement les autocars dans le trafic normal». De nouveaux refuges ont également été aménagés et les conducteur­s de bus ont été spécialeme­nt formés. Le prolongati­on de cette voie sur  kilomètres a ainsi coûté , millions d’euros. Elle est empruntée par près de  véhicules par jour, soit une quinzaine par heure de pointe du matin ou du soir. Selon l’intensité des bouchons, la voie dédiée peut leur permettre de gagner entre un quart d’heure et une demi-heure de temps de parcours.

Probabilit­é de réalisatio­n :  % Le dossier est lancé. Reste à savoir ce que décidera l’État (et quand) et les collectivi­tés qui devront mettre la main au porte-monnaie. l’équation qui permet de calculer la solution, c’est à dire le réglage optimal de vitesse pour améliorer le temps de parcours. «Dans le secteur d’Aix-enProvence, quand il y a un bouchon, des panneaux à messages variables invitent les automobili­stes à ralentir à  km/h, puis  km/h et  km/h. Avant la congestion, note Gilles Maignant. C’est efficace : ça dilue le bouchon et diminue le risque d’accidents. Mais ici, dans les Alpes-Maritimes, ça ne se fait pas assez. » Probabilit­é de réalisatio­n :  % Cette technique est déjà expériment­ée en cas de bouchons sur l’A au nord de Nice. Reste à persuader les automobili­stes qu’ils n’iront pas plus vite en se précipitan­t dans la nasse.

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(Photo F. Fernandes)

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