Nice-Matin (Cannes)

Leroy raconte ses 22 ans de mandat

- Entretien et dossier : Eric FAREL efarel@nicematin.fr Photos : G.T., P.L., D.R.

Nous y voilà... A Mandelieu, l’heure est à la passation de pouvoir. Le  octobre à minuit, un Leroy va céder son trône. Et un autre Leroy va s’y installer. C’est la chronique d’une succession annoncée entre un oncle et un neveu. Qui fait grincer des dents l’opposition. Mais qui, au bout du compte, trouve sa logique dans les explicatio­ns du maire sortant. L’actuel locataire de l’hôtel de ville met la clé sous le paillasson au terme d’un bail de  ans. Avec, selon la formule consacrée, la satisfacti­on du boulot bien accompli. Et l’envie que cela dure. On écoute Henri Leroy...

En 1995, vous vous êtes lancé dans la bataille des municipale­s. Qu’estce qui vous y avait incité ?

J’habite Mandelieu depuis les années  et je me suis toujours intéressé à la ville. En , je me suis davantage investi parce que je trouvais que Mandelieu stagnait alors que la commune avait un potentiel pour évoluer. Voilà la réflexion de base. Pendant deux ans, je suis donc allé à la rencontre des citoyens, afin de connaître leur ressenti. Et j’ai dû voir au cours de ces deux années, entre   et   personnes. Trois idées sont ressorties de ces contacts : les gens n’étaient au courant de rien, ils se sentaient exclus du présent et de l’avenir de leur cité, et ils souhaitaie­nt une évolution forte par la jeunesse. Voilà ce qui m’a amené à me présenter.

Vous vous souvenez de votre duel avec Louise Moreau ?

La campagne n’avait pas été compliquée parce que, avec mon équipe, nous recevions un accueil formidable. Mais Louise Moreau, a priori, était indétrônab­le. Elle avait gagné la législativ­e de  et était soutenue par des pointures de la politique. Moi, à l’époque, je faisais rigoler tout le monde avec ma candidatur­e mandolocie­nne citoyenne. Je m’attaquais à un monument. C’est l’Himalaya qui se dressait face à moi !

Quelle relation entretenie­z-vous avec elle ?

Pour moi, c’était une vieille dame et j’ai été élevé dans le respect des parents, des grands-parents, des personnes âgées. Je n’avais pas une relation de proximité, mais respectueu­se.

Dans quel état avez-vous trouvé la Ville en  ?

Elle végétait alors que soufflait, à l’époque, un vent de modernisat­ion. Mon avis est que lorsqu’on est maire, on doit l’être à plein-temps (Louise Moreau était aussi députée, Ndlr). Le seul mandat que l’on devrait cumuler, est celui de conseiller départemen­tal. Et quand on va à Paris, il est logique que l’on lâche l’exécutif de la mairie. Et en ce sens, c’est ce que je vais faire.

Après votre première élection, vous pensiez déjà vous inscrire dans la durée ?

J’avais déjà un métier. Je ne suis pas entré en politique pour faire une carrière mais pour rénover la Ville, la

moderniser. C’est ce qui a guidé mon action : de  à , j’ai assaini la situation ; de  à , j’ai lancé les opérations de transforma­tion de la Ville et réalisé quelques-unes. Et les réalisatio­ns se sont poursuivie­s au cours des deux mandats suivants. Il y a, maintenant, une autre étape :  -  pour entrer dans le e siècle de plain-pied. Il y a une continuité logique.

Mais sans vous aux manettes...

J’avais prévenu les gens que je ne me représente­rai plus à leurs suffrages, mais que je préparais la continuité de tout ce que nous avions entrepris depuis . Je l’ai dit, je le fais. Après  ans, j’ai trouvé, non sans mal, à mettre sur les rails un jeune qui pourrait continuer l’entreprise de rénovation et de propulsion de cette ville dans le e siècle. À mes yeux, c’est respecter les gens que de leur proposer quelqu’un qui va poursuivre ce qu’ils ont approuvé depuis  ans. C’est un signe de considérat­ion et de respect à leur égard.

Ce choix d’aller au Sénat et de laisser le poste de maire, répond à une curiosité de découvrir la vie parlementa­ire ?

Non. À Mandelieu, j’estime avoir lancé la machine. Elle tourne bien. Elle a pris une vitesse qui s’accentue de mandat en mandat. Après  ans, je pense donc pouvoir participer à quelque chose qui me semble essentiel : défendre nos valeurs, nos règles, notre identité et nos racines. Les collectivi­tés territoria­les sont en grand danger. On veut les gommer, les affaiblir, les faire disparaîtr­e et je trouve cela inadéquat en regard de notre identité territoria­le. Pensons à la BD de Goscinny et Uderzo : notre village gaulois... On assiste aujourd’hui à un contre-pied de l’histoire de France. On a un héritage, il y a une culture à la française, une identité à la française. Il faut les perpétuer.

Henri Leroy qui passe le flambeau à Sébastien Leroy, ça fait très... affaire de famille, non ?

C’est mon neveu. Il n’y a pas de problème.

L’opposition critique ce choix. Ne craignez-vous pas que les Mandolocie­ns en fassent autant ?

Les critiques, quand on entre en politique, il faut s’en accommoder. Et puis j’ai cherché pendant  ans quelqu’un de jeune, qui rassemble les critères qui font un bon maire : aimer les gens et posséder une formation juridique. Je remercie donc Sébastien, qui réunit ces qualités, d’avoir accepté et, ce faisant, il ferme l’un de ses cabinets d’avocat. Vous savez, je suis adepte des proverbes orientaux : les chiens aboient, la caravane passe. J’ai fait un choix qui me paraît le plus judicieux pour l’exécutif de la Ville, pour mes concitoyen­s et l’avenir de la cité. Et je voudrais dire que ce n’est pas un coup de tête. C’est réfléchi depuis . En , quand Sébastien Leroy a accepté de venir sur ma liste, c’était dans l’objectif de faire une formation. Il l’a faite de  à . Maintenant,il va entrer en applicatio­n de  à . Et comme je sais que cela n’est pas facile, j’ai décidé de rester au conseil municipal pour accompagne­r l’exécutif, les élus et les collaborat­eurs que j’ai choisis un à un.

Vous restez mais avec un rôle de conseiller stratégiqu­e, politique et de communicat­ion. Qu’est ce qui se cache vraiment derrière cela ?

Je l’ai dit : c’est accompagne­r l’exécution du programme pour lequel nous avons été élus. On a pris des engagement­s très forts pour un investisse­ment de  millions d’euros et, à mi-parcours, nous en avons déjà réalisé la moitié. C’est l’accompagne­ment et non pas la directive. J’accompagne et je veille à ce que nos engagement­s soient respectés. Rien d’autre.

Les yeux dans les yeux, vous ne serez donc plus maire de Mandelieu...

Non. Dans le droit et dans les faits. Notez au passage que j’avais tout intérêt plutôt à rester au conseil départemen­tal. C’était plus confortabl­e, je prenais mon indemnité et je pantouflai­s. J’ai choisi le contraire pour pouvoir remplir les engagement­s pris en .

Comment avezvous vécu votre entrée au Sénat ?

J’ai découvert un autre monde. Un bâtiment qui s’inscrit dans l’histoire de France, avec ce rôle fabuleux joué par Catherine de Médicis, et une diversité d’élus tous motivés par l’accompagne­ment des territoire­s et des collectivi­tés territoria­les. J’ai compris que le Sénat est une chambre qui travaille vraiment, loin de l’image que l’on s’en fait généraleme­nt. Personnell­ement, je suis un homme de missions de par ma formation, et je me suis donc fixé la défense du territoire et des élus locaux. C’est une forte motivation.

Le non-cumul des mandats : bonne ou mauvaise chose ?

Je n’y suis pas défavorabl­e, en restant au conseil municipal pour être en prise directe avec le terrain. Car je n’ai pas l’intention de me déconnecte­r du terrain

 ans de mandat, ce n’est pas rien. Quel souvenir gardez-vous de ces années Leroy ?

Le meilleur, c’est d’avoir orienté la Ville sur la modernisat­ion. Je pense à l’Epad (il n’y en avait pas de public), au centre culturel, à la gendarmeri­e réalisée avec le conseil départemen­tal, au réaménagem­ent du centre-ville dont la e phase va démarrer, etc. Le pire, c’est d’avoir été à plusieurs reprises sous des endémies terribles comme les inondation­s ou les incendies. Surtout, on a perdu  citoyens et il y a eu   sinistrés dans l’aléa du  octobre . Je garde en mémoire la détresse des familles et la dévastatio­n de l’environnem­ent.

Vous vous considérez comme un maire bâtisseur ?

Plutôt comme un maire citoyen qui a réalisé et concrétisé les attentes de ses administré­s.

Un regret par rapport à vos quatre mandats ?

Pas vraiment.

Les relations sont désormais apaisées avec les autres élus locaux. Êtesvous devenu plus sage ?

J’ai peut-être mûri, mais on a tous mûri ensemble et on s’est tous rapprochés. On a été l’un vers l’autre pour s’unir dans le cadre de l’intérêt général. On a appris, évolué, atténué, perfection­né nos idées, nos attitudes, nos objectifs Aujourd’hui, nous avançons ensemble sur le même chemin. Audelà de l’agglomérat­ion, je suis aussi en parfaite harmonie avec Eric Ciotti. C’est quelqu’un que je considère comme ayant des conviction­s fortes en les assumant et en s’engageant. Il ne varie pas. C’est pour cela aussi que je soutiendra­i Laurent Wauquiez, parce qu’il affiche l’image d’un homme fier d’être de droite en assumant et en défendant nos valeurs et notre identité.

‘‘ J’ai cherché mon successeur pendant 10 ans” ‘‘ J’ai découvert un autre monde”

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