L’objectif est d’assécher la prostate
l’adénome comprime la vessie et l’urètre, d’où des troubles urinaires importants chez les patients: difficultés pour vider la vessie, envies fréquentes – les patients sont obligés de se lever plusieurs fois par nuit –, et un risque de complications, notamment des incontinences, des infections urinaires, voire une rétention complète de l’urine. Ces troubles altèrent sévèrement la qualité de vie. »
Patients sous anticoagulants
Tous les patients ne souffrent heureusement pas de symptômes sévères, et dans la plupart des cas, des traitements médicaux, proportionnels à l’intensité des troubles, suffisent à les soulager. « L’intervention chirurgicale est envisagée quand ils ne sont plus efficaces. La technique de référence, nommée résection trans-utérale de la prostate, va alors consister à réaliser un morcellement de la partie centrale de la glande par un endoscope pour élargir le canal urinaire ». Efficace, et réalisée en routine depuis des années, la technique peut néanmoins être responsable d’effets secondaires, le plus fréquent étant l’éjaculation rétrograde (le sperme est évacué dans la vessie et pas à l’extérieur). «Chez certaines personnes, elle peut gêner la vie sexuelle et compromettre la fertilité. La taille de l’adénome et la prise de médicaments comme les antiagrégants ou les anticoagulants sont deux autres facteurs limitants pour la chirurgie, compte tenu du risque de saignement. » Ces risques semblent être moins problématiques et moins fréquents dans le cas de l’embolisation. « L’objectif étant de dévasculariser la prostate et ainsi l’assécher, il n’y a pas de risque hémorragique. Les rares complications observées sont mineures ; le principal risque est le « passage » des billes ailleurs que dans la prostate, dans la vessie en particulier et dans le rectum, susceptible de provoquer une rectorragie, mais sans gravité. Ce risque devrait par ailleurs considérablement diminuer avec la précision croissante de la technique. » Concernant les contre-indications à l’embolisation, elles sont associées aux limites de la technique. « Lorsque les artères sont très calcifiées, athéromateuses, il est très difficile de passer à l’intérieur. »
Depuis les années
Reste une question majeure : l’embolisation est-elle aussi efficace que la chirurgie ? « La technique étant beaucoup plus récente – elle ne se développe en Europe que depuis les années 2010(1)–, on ne dispose pas encore de données statistiques sur le long terme, reconnaît le Dr Jean Baqué. Mais, les dernières études scientifiques et la pratique sont très encourageantes. Les symptômes urinaires sont rapidement améliorés – ainsi que la qualité de vie –, même si les effets de l’embolisation sur la taille de la prostate sont relativement lents : 30 % de réduction au bout de 3 à 6 mois. Et dans 2 à 3 cas sur 10, pour des raisons qu’il reste à décrypter, malgré l’embolisation, les symptômes urinaires récidivent. » Pendant que la technique continue d’être évaluée, certains patients en bénéficient déjà. Qui sont-ils ? « Des patients qui présentent un adénome tellement volumineux qu’ils doivent bénéficier d’une sonde urinaire à demeure. Dans 7 cas sur 10, on parvient grâce à cette technique à retirer la sonde urinaire. Les patients à risque chirurgical ou sous anticoagulant sont également des candidats pour l’embolisation. » Pendant l’intervention, qui dure une heure, une carte des artères est projetée sur l’écran, et on rentre dans les artères à l’aide de très petits tuyaux. Une fois en place, le traitement peut commencer. En se guidant par les rayons X, on envoie dans l’adénome des petites billes d’environ , mm de diamètre. Pendant toute la procédure, on effectue des reconstructions tridimentionnelles permettant de vérifier où les billes sont envoyées, ce qui permet de sécuriser l’embolisation. Dans certains centres, cette intervention est pratiquée sous anesthésie locale et en ambulatoire. À Nice, nous préférons la réaliser sous sédation, et garder le patient une nuit à l’hôpital, pour des motifs de sécurité.
Quel qu’il soit, le choix du type d’intervention (chirurgie ou embolisation) se fait systématiquement en collaboration multidisciplinaire (urologue, radiologue interventionnel, anesthésiste…) et ne doit avoir qu’un objectif, qu’aime à rappeler le Dr Baqué : « Proposer à chaque patient la prise en charge la plus adaptée à sa pathologie, et ses attentes. »