Une monographie dédiée à Philippe Ramette à Nice
Dans la galerie Espace à Vendre, l’artiste contemporain de renommée internationale expose ses sculptures, photographies et dessins emblématiques jusqu’au 26 novembre. Panorama
Àla tombée de la nuit, au détour de la rue Assalit, la tête défigurée de Philippe Ramette luit. Face contre vitre, exposé à la vue des passants, son Portrait tragicomique ressemble à un personnage de cire du musée Grévin. Un autoportrait grandeur nature, en silicone, flanqué d’un sourire fendu, d’un regard distordu et d’un buste costumé, tronqué par un socle en bois (notre photo ci-dessous). Un personnage que les promeneurs, interloqués, ne peuvent s’empêcher de dévisager. Une oeuvre qui pousse les curieux à entrer dans la galerie Espace à Vendre. Lieu d’exposition qui accueille jusqu’au 26 novembre, les photographies, sculptures et dessins d’un des artistes contemporains français les plus réputés.
Inspiration surréaliste
Philippe Ramette est né à Auxerre en 1961. Doué et passionné pour le dessin, il intègre l’école des Beauxarts de Macon (Saône-et-Loire), spécialité peinture. Amoureux d’art contemporain, il suit les conseils de Noël Dolla, peintre et sculpteur : en 1987, il rejoint Nice pour étudier deux ans à la Villa Arson. C’est ici que l’étudiant fait mûrir son art d’inspiration surréaliste. À la fois sculpteur, photographe et dessinateur, l’artiste se présente comme un réalisateur, acteur de sa création. Que cela soit dans l’esquisse, le modelage ou dans la pose, Philippe Ramette fait partie intégrante de son oeuvre : « Ce n’est pas de l’égocentrisme. Il doit y avoir une participation de mon physique parce que je suis acteur de mon propre travail. »
La réalité remise en question
Acteur qui se met en scène dans des situations improbables, des postures illogiques qui défient les lois de la pesanteur. Comme sur cette photographie prise à Sète, en 2016, à côté de laquelle l’artiste pose (notre photo ci-dessus). Sur le cliché, l’installation du personnage est familière. La posture renvoie à ces images de contemplateurs qui, allongés, les bras derrière la tête, fixent le ciel. Mais au décor champêtre se substitue un décor portuaire quelque peu… renversant. Étendu sur un mur de pierre, perpendiculaire à la surface de la mer, le contemplateur observe l’horizon, défiant la gravité. Invraisemblable et, pour autant, vrai. Régulièrement, l’artiste réalise des performances acrobatiques, grâce à des harnais, afin de souligner un point de vue décalé du monde que le photographe immortalise. Une remise en question de la réalité tangible et physique.
Univers entre tragique et comique
Dans son art, Philippe Ramette joue les équilibristes entre les registres. Parfois tragiques, parfois comiques, toujours ludiques. Récréatifs parce qu’il faut chercher le sens des situations créées. Dans le dessin Rencontre du quatrième type, sous des lignes épurées, quatre silhouettes sont représentées dans un bar. L’une à la porte, main tendue pour saluer, un point d’exclamation sur la tête. Les trois autres tournées vers lui, un point d’interrogation, aussi, audessus d’eux. Une rencontre équivoque entre ces quatre personnages qui attire l’oeil. Au fil de l’exposition, l’allusion au phénomène paranormal se dessine, parfois. Toujours, l’artiste joue avec l’imagination et les mots, autant que les situations.
Nice, une place privilégiée dans son art
Dans chacune de ses photographies, les lieux changent mais pas le personnage. Toujours vêtu d’un costume troispièces bleu. Une récurrence. Un fil rouge. Une identité : «À la Villa Arson, j’éprouvais le désir de me démarquer. Je venais en cours habillé en costume. C’était mon habit de tous les jours dans lequel j’ai posé pour mes premières photographies. J’ai gardé ce même costume bleu afin de créer une unité de temps entre les clichés. » De temps, d’action, mais pas de lieu. « Entre les photographies, il y a une unicité esthétique qui fixe les déplacements que je peux faire dans ma propre vie. Comme à Deauville ou Sète, puisque j’y suis resté longtemps. D’ailleurs, la prochaine photographie sera réalisée à Nice puisque j’y ai passé les plus belles années de ma vie. »