Nice-Matin (Cannes)

Le projet Matisse dilate son oeil sur les planètes Vrai démarrage en 

Fruit d’un travail collectif européen, mais conçu et réalisé à l’Observatoi­re de la Côte d’Azur, cet instrument titanesque va équiper quatre télescopes géants au Chili pour déchiffrer le ciel

- CHRISTINE RINAUDO crinaudo@nicematin.fr

Zoom dans le ciel. Gros plan sur l’univers et la formation des planètes. Le projet Matisse, élaboré dans les salles blanches de l’Observatoi­re de la Côte d’Azur à Nice, va ouvrir l’oeil. Et quel oeil ! Un instrument d’observatio­n titanesque automatisé, aussi puissant qu’un satellite, actuelleme­nt en cours de démontage pour être prochainem­ent envoyé au Chili afin d’équiper le Very large telescope (VLT). Autrement dit : un ensemble de quatre télescopes de 8 mètres de diamètre. Jusqu’à présent, on ne pouvait combiner que trois télescopes du VLT. Grâce à Matisse, on mixera les données des quatre. Dans le viseur de cet assemblage d’optiques et mécanismes de précision de haut vol : « Comprendre encore mieux comment les planètes, telles que la nôtre, se sont formées dès les premiers instants », vise Bruno Lopez, astronome et responsabl­e scientifiq­ue du projet Matisse.

« Comme un télescope de  mètres de diamètre »

Un télescope, c’est comme une pupille. L’appareil Matisse, lui, est comparable à la rétine qui reçoit un signal lumineux. L’engin amènera une double innovation. Un : recombiner la lumière de quatre télescopes et obtenir des images, dont la résolution et la finesse La phase de démontage du projet Matisse a commencé le  septembre. Les pièces ont été seront augmentées. « Cela fonctionne­ra comme si on avait un télescope de 150 mètres de diamètre. transporté­es par deux camions jusqu’à l’aéroport d’Amsterdam. Ensuite, la compagnie Air » Deux : observer dans le domaine des longueurs d’ondes infrarouge­s. « Notre objectif est France-KLM les prendra en charge dans un avion-cargo. Cap sur le Chili. Arrivé à Santiago, le chargement sera acheminé, à nouveau par camions, à   kilomètres au nord du pays. Dans le désert d’Atacama, là où le ciel est le plus pur au monde. De fin octobre à février, le projet Matisse sera rassemblé, puis installé dans le foyer des télescopes, là où se trouve un laboratoir­e focal. L’Observatoi­re de la Côte d’Azur avait été le théâtre d’une année de tests pour mesurer fonctions et performanc­es de l’instrument. Au Chili, de nouveaux tests sur le ciel seront programmés entre mars  et fin de l’année. « On pourra alors déduire les performanc­es réelles, annonce Bruno Lopez. Les vraies observatio­ns démarreron­t en . Nous avions commencé en … » d’examiner des poussières chaudes autour des étoiles, car ces poussières racontent l’histoire des planètes de notre système solaire. On pourra comprendre, par exemple, comment l’eau est arrivée sur Terre. » En résumé, plus de détails grossis sur les étoiles et une cartograph­ie de la matière élémentair­e. « Les données nous parviendro­nt sous forme numérique que nous devrons interpréte­r. Elles seront destinées à la communauté internatio­nale : tous les instituts de recherche, toutes les université­s. L’instrument va générer des dizaines de thèses de chercheurs de par le monde. » C’est géant !

« Auteurs de l’architectu­re »

Le projet, collectif, européen, fédère l’Institut national des sciences de l’univers du CNRS, les instituts Max-Planck d’astronomie d’Heidelberg, Max-Planck de radioastro­nomie de Bonn, l’agence Nova-Astron et l’université de Leiden aux Pays-Bas, l’European Southern observator­y, agence européenne pour l’astronomie, basée à Garching, en Allemagne. Côté français, il y a, bien sûr, le laboratoir­e Lagrange de l’Observatoi­re de la Côte d’Azur. Dans cette aventure plurielle, l’établissem­ent du mont Gros a le premier rôle : « Ici, nous avons été auteurs de l’architectu­re de l’instrument, conduit le projet, assemblé le dispositif, assuré les tests pour l’Europe ainsi que toute la partie informatiq­ue de pilotage de l’instrument et de réduction des données. »

 scientifiq­ues

L’innovante odyssée a mobilisé cinquante physiciens, astronomes, ingénieurs de recherche qui ont travaillé quinze ans, accumulé 250 000 heures de travail pour un résultat estimé entre 15 et 16 millions d’euros financés par les organismes impliqués, mais aussi avec l’aide de la Région, du Départemen­t, de la ville de Nice. Pourquoi Matisse ? « Nous avons choisi le nom d’une étoile de l’art. C’est aussi un acronyme signifiant Multi aperture interferom­etric and spectrosco­pic experiment… Ce qu’on fait est unique et complément­aire du nouveau télescope spatial de la Nasa et de l’Esa, le James-Webb space telescope, lancé en 2018 par les États-Unis. »

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Phase de démontage pour le projet Matisse. Dans quelques jours, il rejoindra sa base au Chili, là où le ciel est le plus pur pour observer les étoiles et les faire parler. (Photos Franck Fernandes) Derniers réglages pour la table optique chaude par...

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