La coke d’Amsterdam alimentait la Corse : procès à Nice
Une affaire peut en cacher une autre. Voilà un principe que connait bien tout enquêteur. En l’occurrence, les investigations autour d’un assassinat ont débouché sur un vaste trafic de stups. Voilà ce qui conduit douze prévenus, aujourd’hui, devant le tribunal correctionnel de Nice durant une semaine entière. Huit hommes et quatre femmes, âgés de 27 à 46 ans, sont appelés à comparaître dans le cadre d’un trafic de stupéfiants entre la Corse, la Haute-Savoie et les Pays-Bas. La plupart des prévenus est issue de l’île de Beauté. Mais l’instruction avait été dépaysée à Nice, sur décision de la chambre criminelle de la cour de cassation.
Langage codé
C’est donc la juridiction azuréenne qui doit juger ce trafic de cocaïne et de cannabis tissé, de 2012 à 2015, entre Amsterdam, Annecy et Bastia. La drogue en provenance des Pays-Bas était notamment destinée aux bars et discothèques de la Balagne. Selon les conclusions de l’enquête, les trafiquants l’auraient acheminée avec la complicité de leurs compagnes. Aux commandes : Anthony B. Ce Bastiais de 33 ans, condamné à six reprises pour des infractions routières, est détenu dans le cadre d’une affaire d’assassinat. C’est en le plaçant sur écoute que la police judiciaire a décelé un trafic de drogue, derrière des échanges téléphoniques prudents et codés : un « oiseau » désigne un trajet aérien, « allume l’autre » est une invitation à changer de téléphone, et les trafiquants partent « récupérer des fiches de paye » quand vient l’heure de la remise de fonds. Pour mener sa petite affaire, Anthony B. aurait bénéficié du soutien logistique de sa compagne, chargée de réserver les trajets et de gérer les mandats cash. Il aurait, par ailleurs, été épaulé par deux lieutenants : Paul L., un Grassois de 29 ans, et Tony G., un Francilien de 33 ans. Tous deux, multicondamnés, sont soupçonnés d’avoir fait « tourner la boutique » après l’incarcération du chef présumé.
Détention agitée
La prison ne leur a pas davantage réussi. Tous deux ont fait l’objet de sanctions disciplinaires. Paul L. a entamé une grève de la faim pour s’opposer à son transfert à Nice. Tony G., de son côté, a dû changer de prison après avoir agressé un surveillant. Un quatrième protagoniste, Yannick C., 46 ans, comparaît libre à la suite d’une... erreur procédurale. Le tribunal doit en outre examiner les rôles périphériques. « Ma cliente s’insurge contre sa mise en examen, car elle n’est en rien impliquée dans ce trafic, martèle Me Christian Donato Di Pinto, avocat de la compagne de Paul L. On a fait un “paquetage” et renvoyé tout le monde indistinctement devant le tribunal ! » A charge pour ce dernier de faire la part des choses.