Vers un nouveau procès Merah
Le parquet général a fait appel, hier, des condamnations d’Abdelkader Merah et Fettah Malki. Des peines lourdes (20 et 14 ans de réclusion) mais un acquittement partiel : le verdict fait débat
C’est le procès le plus difficile de ma carrière ». Même le bouillonnant ténor Eric Dupond-Moretti est sorti épuisé de cinq semaines d’audience, à Paris, devant la cour d’assises spéciale. Spéciale, à l’image du très attendu procès Merah dont le verdict est tombé jeudi soir, dans un contexte de tension extrême. Le mot « fin », lui, n’est pas écrit : l’affaire fera l’objet d’un deuxième procès. Dès hier matin, le parquet général a annoncé qu’il interjetait appel. Un choix guère surprenant. L’accusation avait requis la perpétuité contre Abdelkader Merah, frère du tueur au scooter, et 20 ans de réclusion contre Fettah Malki, l’ami d’enfance qui lui avait fourni arme et gilet pare-balles. Au final, les accusés ont été respectivement condamnés à 20 et 14 ans de réclusion criminelle, assortis d’une peine de sûreté des deux tiers. Si ces sanctions restent lourdes, ce sont les chefs d’accusation retenus par les juges qui suscitent de vives réactions. Abdelkader Merah et Fettah Malki sont reconnus coupables d’association de malfaiteurs terroristes criminels, mais pas de complicité dans les tueries qui firent sept morts, en mars 2012, à Toulouse et Montauban. Un exercice d’équilibrisme juridique, complexe et argumenté [lire cidessous], apprécié de manières bien différentes.
«Onrepartàzéro»
« Un mélange d’indignation et d’incompréhension ». Tel est le sentiment dominant des parties civiles, à l’image de la mère de Bryan, ado antibois grièvement blessé par Mohamed Merah. « Elle exprime de la surprise et du désaccord, avec mesure néanmoins », nuance son avocat niçois, Me Philippe Soussi. Invité, hier, de France Inter, son confrère de la défense Me Dupond-Moretti, souvent seul contre tous durant ce procès, rappelle qu’Abdelkader Merah écope du « maximum pour une association de malfaiteurs ». Une infraction à ses yeux « fourre-tout » et « intrinsèquement discutable ». Elle sera rediscutée, donc, devant la cour d’appel spéciale de Paris. Puisqu’il y aura bien un deuxième procès Merah. « Une bonne chose, estime Me Soussi. C’est un nouveau procès qui commence. On repart à zéro. » Pour l’heure, insiste le pénaliste, « la démocratie peut être fière de la façon dont elle traite ceux qui veulent sa mort. »