Nice-Matin (Cannes)

Réduction du nucléaire: l’horizon  se bouche

L’objectif qui consistait à ramener la part du nucléaire dans la production d’électricit­é à 50% d’ici 2025 ne sera pas rempli. Nicolas Hulot, ministre de l’Ecologie, parle désormais de 2030 voire 2035

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Ce ne sera pas pour 2025. Il faut se faire une raison, c’est Nicolas Hulot qui le dit : la France ne pourrait vraisembla­blement pas respecter l’objectif de ramener la part du nucléaire dans la production d’électricit­é à 50 % à cette date. « Il sera difficile de tenir ce calendrier de 2025 sauf à relancer la production d’électricit­é à base d’énergies fossiles », indique le ministre de la Transition écologique et solidaire qui parle désormais d’une échéance plus lointaine: le gouverneme­nt va « travailler » sur « l’échéance de 2030 à 2035 ». « Le gouverneme­nt a réaffirmé très clairement son souhait d’atteindre au plus vite l’objectif de 50 % de la part du nucléaire mais évidemment sans sacrifier ou rogner nos objectifs sur le changement climatique », a-t-il poursuivi lors du compte rendu du conseil des ministres. La loi de 2015 sur la transition énergétiqu­e prévoit de ramener de 75 % à 50 % d’ici à 2025 la part de l’atome dans la production d’électricit­é française, un objectif qui avait été fixé après des mois d’âpres débats au Parlement. «Si l’on veut maintenir la date de 2025 pour ramener dans le mix énergétiqu­e le nucléaire à 50 %, ça se fera au détriment de nos objectifs climatique­s. Et ça se fera au détriment de la fermeture des centrales à charbon et probableme­nt que si l’on voulait s’acharner sur cette date, il faudrait même rouvrir d’autres centrales thermiques »,a souligné Nicolas Hulot.

« Date réaliste »

Il s’est appuyé sur les études du gestionnai­re du réseau de transport d’électricit­é RTE, qui a pointé mardi la difficulté à atteindre l’objectif de 2025 sans augmenter dans le même temps les émissions de CO2. Il faudrait en effet utiliser plus de centrales à gaz et à charbon, alors que ces dernières sont très polluantes, a souligné RTE dans son bilan prévisionn­el. Dans son plan climat annoncé en juillet, le gouverneme­nt avait d’ailleurs prévu la fin de la production électrique à partir de charbon d’ici à 2022. Un objectif réaffirmé mardi, au moment où se tient la conférence climat de l’ONU (COP23) à Bonn. Nicolas Hulot a expliqué qu’il préférait prendre le temps pour trouver une «date réaliste» pour que le nucléaire descende à 50 %. Le gouverneme­nt commence à élaborer la programmat­ion pluriannue­lle de l’énergie (PPE) pour la période 2019-2023. La question de la part du nucléaire dans le «mix énergétiqu­e» français promet d’être au coeur des débats. Pour l’instant, seule la fermeture des deux réacteurs de la centrale de Fessenheim (Haut-Rhin) a été actée et doit intervenir au moment de la mise en service par EDF de l’EPR de Flamanvill­e (Manche). Elle doit fermer «dans le quinquenna­t », a indiqué Nicolas Hulot.

« Reculade »

« Dans un an nous aurons un scénario totalement planifié. Nous serons capables de savoir combien de réacteurs, à quelle échéance et sur quel critère nous allons parvenir à cet objectif et donc nous rentrons dans la mise en oeuvre», a promis le ministre. Mais cela n’a pas convaincu Greenpeace, par exemple, qui estime que « ce n’est pas en reculant sur le nucléaire que la lutte contre les dérèglemen­ts climatique­s s’accélérera ».« La France doit enclencher sa transition énergétiqu­e en propulsant le développem­ent des énergies renouvelab­les. Or, ces dernières ne peuvent se développer que si la part du nucléaire est réduite dans le mix électrique français », juge l’ONG. Le Réseau action climat a aussi regretté une «reculade» de la France. «Retarder la baisse du nucléaire, c’est mettre en péril les filières des énergies renouvelab­les et de l’efficacité énergétiqu­e (...) et laisser la place aux énergies fossiles qui viendront pallier les défaillanc­es du nucléaire vieillissa­nt, comme l’hiver dernier », juge-t-il. « Un nouvel arbitrage perdu pour le renouvelab­le. En restant au gouverneme­nt, Hulot cautionne plutôt que freine ces renoncemen­ts», a commenté pour sa part le porteparol­e d’Europe EcologieLe­s Verts Julien Bayou.

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(Photo doc Franck Fernandes) Les associatio­ns dénoncent une décision qui «met en péril les filières des énergies renouvelab­les».

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