La baronne Alice de Rothschild a marqué la ville Grasse
Grasse, station hivernale depuis le XVIIIe siècle a vu le passage de bien des personnalités. Mais, il est un personnage qui a réellement marqué la ville tant par son tempérament entreprenant que par ses actes de générosité, la baronne Alice de Rothschild. C’est en 1 887 qu’à l’instar de nombre de ses compatriotes, Alice de Rothschild, née à Francfort en 1847, descend sur la Côte d’Azur pour un séjour hivernal. Trouvant les villes du littoral trop « vulgaires », elle s’installe à Grasse. En 1887, elle acquiert un terrain de 135 hectares sur la colline du Malbosc, à l’est de la ville pour y construire sa maison, baptisée villa Victoria, en l’honneur de la reine d’Angleterre. En experte paysagiste et botaniste, elle y crée un magnifique parc, qui fut considéré en son temps et qui est resté dans les mémoires comme le jardin le plus pittoresque et ostentatoire du département. La colline en terrasses a été aménagée en parc vallonné, où Alice a planté des agrumes en grand nombre, des plantes exotiques telles que des palmiers, des yuccas, des aloès, des bambous et des mimosas de toutes variétés, donnant une floraison ininterrompue de novembre à mars. Chaque année, plus de 80 jardiniers plantaient près de 55000 marguerites, 25 000 pensées, 10 000 giroflées, 5 000 myosotis et 23 000 bulbes de tulipes et de narcisses. Ce style de jardin exotique va, dans les années qui suivent, se répéter dans l’ensemble du pays grassois, tant à l’initiative des propriétaires privés des quartiers avoisinants, que de la municipalité pour les jardins publics.
Elle fait venir l’eau potable
Malheureusement, l’entretien du domaine nécessitant des moyens financiers dépassant les capacités de la ville, ni la maison ni le jardin n’ont survécu à leur auteur. Et
pourtant, ils ont joué un rôle prépondérant dans le développement urbain et touristique de la cité. Au tournant du XXe siècle, les infrastructures de la station grassoise sont encore rudimentaires. Mais, la baronne, qui a des exigences de confort, va user de sa fortune et de son influence auprès du maire Ernest Roure (1 884-1 892) pour accélérer la modernisation des aménagements municipaux. En trois ans, la ville voit le branchement du gaz de ville, l’équipement en électricité et le raccordement au réseau d’égouts. En juillet 1889, la baronne débloque une subvention personnelle de 10 000 francs (soit 4 millions d’euros) pour l’achèvement des canalisations du Foulon, afin d’amener l’eau potable. Elle sera également la première des abonnés grassois au téléphone en novembre 1891. Avec un train de maison de plus de 130 employés durant la saison hivernale, la villa Victoria devient dès 1890 le siège d’une vie sociale intense.
La reine Victoria est son invitée
En mars-avril 1891, la baronne y reçoit la reine Victoria, offrant un rayonnement international à la commune. Les années suivantes voient, entre autres, la venue de l’impératrice Élisabeth d’Autriche, du prince de Galles, futur roi Édouard VII, et son épouse la princesse Alexandra et de la princesse Louise Caroline Alberta d’Angleterre. Mais son aura est aussi forgée grâce à sa générosité envers les indigents. Toutes les veilles de Noël, elle rachetait les objets déposés au Mont-de-piété pour les restituer à leurs propriétaires. Elle aimait les objets rares et divers et s’est constitué une exceptionnelle collection de pipes à fumer de 420 fourneaux et 103 boîtes d’allumettes. Quand Alice mourut en mai 1922, son cousin Edmond en a fait don à la ville où elle est toujours conservée à la médiathèque, la villa Saint-Hilaire. Les Grassois l’appelaient « la Toute-puissante ». Une puissance qu’elle a mis à leur service durant son séjour de trente-cinq ans dans la Cité des fleurs et des parfums. “La mensoungiéra”, berceau des rumeurs