Le « trésor » de Gérard Lhéritier aux enchères
Dans un mois, à Drouot, des milliers d’épargnants, qui s’estiment floués par la société du Niçois Gérard Lhéritier, espèrent limiter la casse. Leurs manuscrits précieux seront dispersés aux enchères
Il y aura le premier manifeste du surréalisme, vingt et une pages d’André Breton (estimé 800 000 à 1 million d’euros). Le mythique rouleau du Marquis de Sade écrit depuis son cachot de la Bastille (4 à 6 millions) ou encore le manuscrit complet écrit d’une traite intitulé Ursule Mirouët de Balzac (800 000 à 1,2 million). La vente des archives de la société Aristophil du Niçois Gérard Lhéritier (mis en examen pour « escroquerie en bande organisée en 2015, abus de biens sociaux et pratiques commerciales trompeuses »), est prévue le 20 décembre à Drouot à Paris. La première d’une très longue série...
Manuscrits surévalués
Pour éviter un effondrement des prix des manuscrits précieux après la liquidation judiciaire d’Aristophil, société basée à VilleneuveLoubet, le tribunal s’est donné six ans à travers près de 300 ventes pour remettre sur le marché quelque 130 000 oeuvres. Le but est de dédommager le moins mal possible les 18 000 investisseurs qui ont acheté pour 850 millions d’euros 135 000 lettres et manuscrits avec la promesse chimérique de plusvalue à 8 % par an. Un juge d’instruction parisien soupçonne Gérard Lhéritier d’avoir monté une « pyramide de Ponzi », escroquerie qui consiste à se servir de l’apport de nouveaux investisseurs pour payer ceux qui souhaitent récupérer leur mise. L’enquête laisse apparaître que les investisseurs attirés dans les filets d’Aristophil ont, certes, acheté des manuscrits de grande valeur, mais à des cotes surévaluées de 50 à 80 %, selon certains experts. Ce que conteste vigoureusement Gérard Lhéritier (lire par ci-dessous). L’étude Aguttes, chargée d’un colossal inventaire par le tribunal de commerce de Paris, donnera le premier coup de marteau. La collection constituée par Gérard Lhéritier est répartie en trois catégories : les lots de la liquidation, ceux détenus par un propriétaire unique et les lots détenus en indivision (jusqu’à 2 000 personnes pour un même lot). Les 190 lots mis en vente dans un mois sont estimés entre 12 et 16 millions d’euros. Avec l’espoir que l’État ne vienne pas perturber la vente. Celui-ci peut estimer que certaines pièces relèvent des archives publiques historiques et a le droit de les saisir sans bourse délier. Ce qui serait une nouvelle désillusion pour des investisseurs qui les ont, ces derniers temps, accumulées.