Nice-Matin (Cannes)

Cannes-Bastia : un derby sur fond de nostalgie

L’ancien joueur de l’AS Cannes et du SC Bastia revient sur ses souvenirs à quelques heures d’un rendez-vous Cannes-Bastia (N3) à Coubertin (15 heures), très attendu

- ROMAIN HUGUES

N’importe quel supporter de l’AS Cannes se souvient de lui. Formé à Valencienn­es, transféré au RC Strasbourg où il gagnera une Coupe Intertoto, puis au SC Bastia où il disputera une finale de Coupe de France et y gagnera une autre Coupe Intertoto, Wilfried Gohel est indissocia­ble de l’AS Cannes. Aux côtés de David Suarez, Laurent Macquet ou Nicolas Van Vynckt, il n’a jamais hésité à se battre et à défendre un idéal. Après plus de 300 matches en pro, Wilfried Gohel a accepté de se confier.

Wilfried, que représente une rencontre Cannes - Bastia ?

C’est improbable de voir à quel niveau se joue ce match. Bastia est un club qui m’a beaucoup marqué parce que c’est une étape importante dans ma vie. Le voir jouer en N avec Cannes, c’est fou, surtout qu’il était en L l’an dernier… Mais si ça peut épurer quelques personnes au sein du SCB, ce n’est pas plus mal. Quand il n’y a plus de sang, les requins vont manger ailleurs. C’est un mal pour un bien.

Bastia ?

Je connais cette ville depuis tout gamin, j’y ai beaucoup de connaissan­ces, et c’est un état d’esprit qui me convient parfaiteme­nt :

‘‘ combatif, gagnant, rebelle lorsqu’il y a une injustice. Mon fils est né là-bas, certaines personnes m’ont accueilli, elles font maintenant partie de ma famille. J’aime les gens qui défendent leurs idées et leurs valeurs. Le SC Bastia ressemble à sa population. D’ailleurs, quand j’y jouais, on était  pros. Ce qui est incroyable, c’est que lorsque l’on se déplaçait,  et  femmes de joueurs se rejoignaie­nt, regardaien­t le match ensemble et on les rejoignait ensuite pour faire la bringue jusqu’au décrassage du lendemain.

Pour Cannes, c’est une chance d’affronter Bastia ?

Complèteme­nt ! Les joueurs cannois vont avoir affaire à des mecs qui vont mouiller le maillot. Parce qu’à Bastia, on a plutôt intérêt à l’honorer ce maillot, sous peine de « se faire appeler Arthur », comme à Marseille par exemple. J’aime quand l’on porte les couleurs d’une équipe qui nous accueille. La moindre des choses est de donner autant que ce qu’elle nous apporte.

Vous suivez encore Cannes ?

Oui, je suis sponsor. Johan (Micoud) est un pote, Bernard (Lambourde) aussi, j’ai joué avec Mickey (Marsiglia), Michel Pavon on a joué un grand nombre de fois l’un contre l’autre… Je ne peux surtout pas oublier l’AS Cannes. Cette saison, avec mon travail, je n’ai pas eu le temps d’aller au stade, mais là je vais recommence­r à y aller !

Vous êtes resté trois saisons à Coubertin, quels sont vos meilleurs souvenirs ?

Ce n’est pas un meilleur souvenir en tant que tel, mais c’est plutôt une période. En , on fait une épopée en Coupe de France où l’on est éliminé par Calais en prolongati­ons en ème de finale. Je regrette parce qu’on aurait pu aller au bout. Mais je reste extrêmemen­t fier que les amateurs de Calais soient allés, eux, au bout de l’aventure !

Vous étiez un des plus âgés du groupe

A  ans, j’étais le plus âgé avec Marc Libbra et Jean-Luc Vanucchi ! C’était une très belle expérience. Les jeunes m’écoutaient, sauf quand ils allaient en boite (rires). Ils m’appelaient « Papi », en raison de mes cheveux blancs que je colorais. Vis-à-vis de moi, il y avait une correction avec une forme de respect. Les Boutobba, Barul, Chabbert, Assignon, Sadani, ou encore Suarez… C’étaient de très bons gars. Je suis en contact avec certains.

L’aventure s’est terminée sur une relégation

Oui. La première et la deuxième année, on finit dans le ventre mou, à la e place. La troisième, c’est la catastroph­e. A quelques matches de la fin, malgré un départ précipité pour la Chine, j’avais toujours espoir. Mais nous n’avions pas été suffisamme­nt profession­nels et bons pour espérer se maintenir. C’est un regret, ce n’est jamais sympa de descendre…

Parmi les   minutes passées sur le terrain avec l’AS Cannes, y a-t-il un fait de jeu qui vous a marqué ?

Oui, mais je n’étais plus joueur. C’est l’année où le club est en National et qu’il rate le match de la remontée face à Valence (-). Sinon, je me souviens du moment où, quand j’ai signé à Cannes, je devais m’engager à Nice, mais à cause d’un agent ça ne s’est pas fait. Pourtant, les journaux avaient déjà titré que je venais… Finalement, je signe à Cannes. Et le premier match de championna­t… On va jouer à… Nice (rires). Évidemment, Zvunka, le coach niçois de l’époque, me jette (rires), sur le terrain je me fais massacrer, huer. Notamment, un petit groupe d’une dizaine de supporters derrière le but qui m’insulte. A un moment, il y a une insulte qui ne me plaît pas, je vais les voir, j’étais prêt à monter… (rires) Je me suis fait cracher dessus comme jamais. Finalement, pour la petite histoire, on fait -. Avec le temps, ça s’est tassé et maintenant je

‘‘ supporte Nice en L comme je supporte Cannes enN.

En  ans de carrière, vous n’avez connu que  clubs

Oui, et j’en suis fier. D’ailleurs, un phénomène m’agace : les subordonné­s du football. Les personnes qui gravitent autour, comme les agents, qui sont là pour apporter quelque chose au joueur, et là, en fait, ils font primer d’abord leurs intérêts avant celles du joueur. Ils préfèrent que les joueurs changent de club pour toucher des commission­s, etc. Il y a un manque de stabilité pour le joueur, ce n’est vraiment pas bien.

Vous ne vous retrouveri­ez pas dans le foot d’aujourd’hui ?

Si, mais c’est un choix de carrière. J’ai déjà refusé différents clubs à différents agents. J’ai changé quatre fois d’agent, ils ne correspond­aient pas à mes attentes. Mais maintenant, l’évolution du football fait que c’est différent. Dans les clubs, on peut avoir un nombre de joueurs mutés incalculab­les, le nombre n’est pas restreint. Je trouve ça dommage même si j’en ai profité !

Vous êtes très pris par votre restaurant (Le Boucanier), mais vous verra-t-on un jour coach ?

Je n’en sais rien, même si j’ai mes diplômes d’Etat. Il y a eu une possibilit­é quand Johan Micoud et Bernard Lambourde ont repris, mais je n’ai pas dit oui, parce que quand on s’occupe de l’AS Cannes, c’est uniquement à %. Et avec le restaurant, je ne pouvais pas. Mon plus grand regret aujourd’hui est de ne pas avoir eu la chance d’entraîner une équipe, la faire progresser, la construire.

A  ans, vous avez le temps…

Oui, et c’est fort possible que je prenne une équipe de jeunes. Ca me plairait énormément !

Quel message transmettr­e aux supporters cannois ?

Je voudrais leur dire un grand merci de soutenir les joueurs actuels qui en ont énormément besoin. Le club se restructur­e, il retrouve une âme. Je pense que l’erreur du club, à un moment donné, est de n’avoir pas fait confiance aux anciens joueurs. Maintenant je sais pourquoi, parce que si j’avais été là, j’aurais tout regardé et en premier lieu les comptes. Les Fakhri, par exemple, étaient des hommes de coeur, ils ont énormément donné pour le club. Mais ils se sont faits bernés par d’autres personnes, tout simplement. Maintenant, place à la renaissanc­e du club qui passe par de bonnes personnes comme les dirigeants mais également les joueurs. Mickaël Cériélo en est l’exemple ! Il est resté, ne triche jamais. Il est la définition de l’amour du maillot.

Cannes - Bastia, qui supporte-ton?

Le football ! Comme je le fais maintenant depuis quelque temps. Je suis pour un beau jeu, assister à un bon match. Que le meilleur gagne.

Quand il n’y a plus de sang, les requins vont manger ailleurs” Jamais sympa de descendre ”

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