Les chirurgiens-dentistes en grève jusqu’à lundi
À l’appel de deux syndicats, des centaines de praticiens ont fermé leurs cabinets cette semaine. Ils dénoncent une sous-tarification de leurs actes et une vision « archaïque » de leur pratique
Ce n’est pas la bonne semaine pour avoir une rage de dents. Jusqu’à lundi les patients risquent en effet de trouver porte close en se rendant chez leur dentiste. À l’appel de deux syndicats, la confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD) et l’union dentaire, ces professionnels de santé sont en effet grève. Un mouvement de grogne national qui serait observé par près de « la moitié des 1 370 praticiens libéraux des Alpes-Maritimes », selon Alexandre Nairi, le président de la CNSD06 qui souligne qu’un mouvement d’une telle ampleur dans le temps, une semaine, est « une première » historique. Les dentistes entendent ainsi s’opposer au règlement arbitral imposé sous l’ancien gouvernement à l’issue de l’échec des négociations conventionnelles organisées entre cette corporation et l’assurance-maladie. Faute de consensus, Marisol Touraine, l’ancienne ministre de la Santé, avait ellemême dicté les règles s’imposant à ces professionnels de santé, et notamment celles relatives à la tarification de leurs actes.
«Une pratique archaïque» privilégiée
Or, pour les dentistes le compte n’y est pas. « Ces propositions sont inacceptables », assure Alexandre Nairi. « Le gouvernement applique un règlement arbitral qui impose à la profession un mode de fonctionnement qui n’est pas compatible avec un exercice moderne de la médecine bucco-dentaire », estime ce professionnel azuréen qui rappelle que « les techniques ont grandement évolué depuis 30 ans. On est capable aujourd’hui de faire des soins préventifs sur les caries ou les tissus de soutien qui permettraient d’éviter d’en arriver à la pose d’une couronne ou d’un implant, qui sont en fait un échec...» Et qui sont aussi bien plus coûteux. Pourtant, explique-t-il, « ces soins préventifs ne sont pas prévus dans le panier de soins du règlement arbitral». Pas plus que ne le seraient « les soins novateurs liés à l’apparition des bio matériaux qui permettent de régénérer des tissus à des prix plus abordables que la pose d’une couronne. » Pour les dentistes, le gouvernement privilégierait ainsi « une pratique archaïque de la médecine bucco-dentaire », alors que le professionnalisme des praticiens français et la qualité de leurs plateaux techniques seraient reconnus au niveau européen.
Équilibres économiques en jeu
Ce serait donc la qualité des soins aux patients qui serait en jeu. Mais aussi l’équilibre financier des cabinets dentaires. Car le règlement arbitral, dont l’entrée en vigueur a déjà été repoussée au 1er janvier 2019, prévoit aussi le plafonnement des honoraires sur les prothèses dentaires. Or, c’est l’activité la plus rentable pour cette profession contrairement à tout un pan d’activité qui serait en fait déficitaire : « D’un côté on nous impose des soins à perte et de l’autre on plafonne les actes qui nous permettent d’équilibrer le fonctionnement de nos entreprises de santé », dénonce Alexandre Nairi pour qui cela n’est tout simplement «pas tenable économiquement ». Il pointe d’ailleurs les conséquences en terme d’emploi sur toute la filière dentaire française. Et pour lui, la rémunération des dentistes n’est pas un argument valable : « Nos honoraires sont simplement à la hauteur de nos responsabilités en tant que chefs d’entreprise de santé. »