Nice-Matin (Cannes)

David contre Goliath version arme nucléaire

- Par MICHÈLE COTTA

Avec son dernier tir de missile interconti­nental, le bras de fer continue entre le président nordcoréen et le président américain. David contre Goliath : un tout petit pays ne cessant de défier le grand. Ne cessant d’augmenter la portée de ses engins nucléaires, visant maintenant, audelà de la Corée du Sud et de Japon, l’Amérique elle-même, puisqu’hier pour la première fois, Kim Jung-Un, très content de lui, a communiqué la distance parcourue par sa fusée, près de   km, de quoi atteindre Washington. Le but du président coréen est clair : acquérir une capacité de riposte nucléaire à laquelle les États-Unis ne pourraient pas échapper. L’ennemi principal est nommé. Alors, certes, la Corée du Nord ne dispose pas encore de dispositif nucléaire véritablem­ent opérationn­el. Elle n’est pas encore, contrairem­ent à ce qu’a annoncé son président un état nucléaire à part entière. Mais enfin, elle s’en rapproche de jour en jour, elle en est même à la dernière étape. Bientôt il sera trop tard pour arrêter l’escalade.

Même si on pense que la guerre n’est pas pour demain, et qu’elle est évitable pour des raisons de simple bon sens, deux éléments incitent néanmoins à l’inquiétude. Le premier, peut-être, hélas le plus important, est la personnali­té des deux leaders qui se mesurent aujourd’hui. On sait aujourd’hui le tempéramen­t imprévisib­le, parfois dangereux, souvent incompréhe­nsible de Donald Trump. On connaît moins, évidemment, Kim Jung-Un mais le moins qu’on puisse dire est qu’il se comporte, à l’intérieur du pays comme dans sa politique extérieure, comme un potentat aux pouvoirs illimités, qui semble n’avoir autour de lui qu’une cour de dignitaire­s aux ordres. Tel n’est pas, il faut le noter, le cas de Donald Trump : le président américain est surveillé de près non seulement par le Sénat et le Congrès, mais aussi par nombre de ses ministres sans oublier les militaires américains, qui, dans le souvenir de la guerre d’Irak, ne souhaitent pas se lancer tête baissée dans un conflit dont ils ne mesurent pas les conséquenc­es. Le deuxième élément est que les sanctions, votées ces dernières années par le Conseil de sécurité, les États-Unis et l’Union européenne contre Pyongyang sont loin d’avoir l’effet escompté. Peut-être même, au contraire, ont-elles aggravé les choses, le dirigeant nord-coréen jugeant ces punitions à la fois inefficace­s et provocatri­ces. Alourdir ces sanctions aujourd’hui ne donnerait pas davantage de résultats. Reste la négociatio­n, telles que la pense encore possible le ministre des Affaires étrangères américain, Rex Tillerson, qui lutte contre l’impulsivit­é de Donald Trump. Comment ? En frappant à la porte du président chinois qui, allié de la Corée du Nord, a tout intérêt à ce que la tension s’apaise dans la région. D’autant que Xi Jinping entend bien dans les années qui viennent jouer un rôle essentiel dans la diplomatie internatio­nale. Mais peut-il, veut-il calmer le jeu d’enfer de Kim Jung-Un ? Entre « le bruit et la fureur » imprudemme­nt promis par Donald Trump il y a quelques mois, et un compromis négocié entre les deux pays, fut-ce en dressant des lauriers à la Chine, la stratégie américaine oscille décidément de façon dangereuse.

« La personnali­té des deux leaders qui se mesurent incite à l’inquiétude »

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