Nice-Matin (Cannes)

Soprano: « De l’espoir pour ceux qui baissent les bras »

Il se produit ce soir à Nikaïa. Avant-dernière date d’une tournée dont le Vélodrome aura marqué l’apogée. Après quinze ans de succès, Soprano veut rendre un peu de ce que la vie lui a donné

- PROPOS RECUEILLIS PAR FRANCK LECLERC fleclerc@nicematin.fr

En concert ce soir à Nice, Soprano met en scène le meilleur de lui-même. Son spectacle repose sur une sélection de titres couvrant quinze ans de carrière. Dont Le diable ne s’habille plus en Prada, Roule ou Mon Everest.

Comment se porte l’artiste masculin NRJ de l’année?

Oh là là! J’avoue qu’il commence à être un peu fatigué… Mais c’est de la bonne fatigue, on ne va pas se plaindre. Je suis debout!

Avant Nice, beaucoup de dates?

Nice sera l’avant-dernière, juste avant Montpellie­r. Près de cent dates! L’avantage, c’est que nous sommes « relâchés ». Et quand on se relâche, on a le sourire.

À quoi ressembler­a ce concert?

Cette tournée, c’est un mélange de tous les morceaux que j’ai faits au cours des quinze dernières années. Avec une grosse montagne en plein milieu de la scène, qui nous sert d’écran géant. Beaucoup de joie, de danse et d’amusement. Mais aussi des moments de révolte par rapport à l’actualité. Et des passages plus intimes où je parle de la famille, des enfants. C’est plus un spectacle qu’un concert proprement dit. C’est un show.

Après le Vélodrome, tout doit paraître bien petit?

Tout le monde me le dit. Bien sûr, c’était très spécial. Pas seulement par rapport aux  personnes qui étaient là, mais aussi parce que c’était chez moi. Comme un rêve de gosse qui se réalisait. Avec un message fort, socialemen­t. Un mec des quartiers Nord qui remplit le Stade Vélodrome? Incroyable! Une superbe émotion et une superbe victoire. Mais, quand même, c’était tellement grand que ça n’avait rien à voir avec des concerts où il y a dix fois moins de monde: on est plus proche des gens, comme j’ai dit on est plus relâché. C’est une autre ambiance. Quelque chose de très positif. Comme à la maison, on prend un kif ensemble.

Thomas Pesquet dit que le Vélodrome est ce que l’on voit d’abord quand on regarde

Marseille depuis l’espace… C’est un truc de fou! Ah non, mais c’est énorme ! Je vais parler comme un vrai chauvin marseillai­s: déjà, c’est normal que ça brille de loin. L’OM et le Vélodrome brillent partout ! Après, tous ceux qui viennent à Marseille sont impression­nés. Le stade, c’est vraiment très beau.

Une chanson dit que le carré VIP de Soprano, c’est son cercle familial?

Ce n’est pas trop mon délire, les trucs du show-business où il faut s’habiller de telle manière, faire telle chose. Moi, j’ai besoin d’être avec mes amis. Sans eux, je suis mal à l’aise.

On entend aussi dans Mon Everest que Soprano est « un rappeur

positif pour donner de l’espoir à cette jeunesse désabusée ».

Toujours bienveilla­nt?

Bien sûr. J’essaie de donner de l’espoir aux jeunes qui se sentent un peu perdus. Certains commencent à baisser les bras, d’autres sont pris par la rue et vont dans le négatif. Vu de là où je suis parti et là où je suis arrivé, le message ne peut être que positif. Qu’un mec comme moi, ayant fait ce parcours, dise ces choses-là, ça leur permet de comprendre qu’ils ne sont pas abandonnés par ceux qui, peut-être, se trouvent dans la lumière. C’est à eux, direct, que je pense quand je fais une chanson.

Musicaleme­nt, rien n’a changé?

C’est le rap qui a changé. Ma différence, peut-être, avec d’autres

‘‘ rappeurs, c’est que je me suis écarté de tout ce qui est violence, vulgarité. L’important pour moi, c’est d’avoir du fond. Il y a beaucoup d’adultes dans mes concerts car ils comprennen­t le sens de mes chansons. Les jeunes qui aiment entendre « n… ta mère » ou « je m’en bats les c… », ceuxlà ne viennent pas. Il y a aussi Sya Styles, l’ami volé par la maladie. Une thérapie? On vit avec. Il y a des jours où c’est dur, mais ce n’est pas un sentiment que je m’approprie. Beaucoup de gens vivent cette situation. Après, ça donne de la force de savoir que l’on n’est pas tout seul.

De la force, vous en donnez aux enfants hospitalis­és.

Impression­nant, comme les enfants sont heureux de rencontrer des artistes qu’ils aiment. J’ai vu un petit très malade, eh bien quand je suis entré dans sa chambre, il a souri. Ses parents m’ont dit que ça ne lui était pas arrivé depuis un an ! On peut redonner un peu de moral. Il y en a même que ça aide à prendre les médicament­s. C’est pour ça que je le fais. Après, comment supporter? Je fais le mec qui sourit, mais c’est très dur. Lourd pour mes épaules. Je suis un père de famille. Quand je rentre chez moi, j’attrape mes enfants, fort, et je me dis que j’ai de la chance.

La vie continue. La France a un incroyable talent aussi?

Non, j’ai participé à un enregistre­ment qui a été réparti sur deux émissions. Là où les gens pourront me voir régulièrem­ent, c’est dans The Voice. On a déjà tourné la moitié du programme, la diffusion est pour l’année prochaine.

Aucune propositio­n au cinéma?

On m’a proposé des choses, je n’ai jamais eu le temps. Mais une petite surprise se prépare…

Et votre ligne de vêtements ?

Kwell. C’est un mot comorien qui veut dire : authentiqu­e, sincère, vrai. On avait commencé dans un registre un peu trop « hype ». Beaucoup, dans les quartiers populaires, ne pouvaient pas acheter car c’était trop cher. Il fallait changer: à la base, c’est pour eux qu’on fait ça. Même si on perd un peu, c’est mieux de baisser le prix. Et pour baisser le prix, il faut être dans la grande distributi­on. On a donc travaillé avec Carrefour, Gemo et Leclerc. Pour que tout le monde ait accès.

Et maintenant, le téléphone!

Wiko, je croyais que c’était chinois ou japonais mais ce sont des Marseillai­s. Ils habitent juste à côté de chez moi! J’aime bien associer mon nom à des projets locaux, ça donne beaucoup de force aux jeunes de chez nous. Vu le matraquage que Wiko a fait un peu partout en France, ça a l’air de cartonner. Je vois ça comme une façon de faire entendre ma voix. Dans Mon précieux, je dis : OK le téléphone, mais tranquille sur les applicatio­ns. Il faut se déconnecte­r! Même si je suis le premier drogué...

Redistribu­er, une préoccupat­ion?

Dès le premier album, j’ai monté une société avec mes trois meilleurs amis. Tout l’argent gagné, on l’a investi et on a commencé à embaucher des jeunes de notre quartier après leur avoir fait suivre une formation. Aujourd’hui, on a douze salariés. Je travaille aussi sur une fondation qui se concentrer­a sur les Comores, le pays de mes parents. Si moi je ne fais rien, à quoi ça sert tout ça? Je ne gagne pas de l’argent pour acheter du Gucci ou pour me promener en jet privé. Ce n’est pas dans mon caractère, ce n’est pas dans mes valeurs.

Douze salariés, une fondation” Le Vélodrome, rêve de gosse”

Ce soir, à 20 heures, à Nikaïa. Tarifs: 35 et 49 €. Fnac et points de vente habituels.

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