Nice-Matin (Cannes)

Allé, «sans avoir tout dit» « A Nice, j’ai volé pour manger »

- PROPOS RECUEILLIS PAR LIONEL PAOLI

La voix était chaleureus­e – un rien gouailleus­e. Certes, Jean d’Ormesson n’était pas niçois. L’auteur de La Gloire de l’empire est né à Paris le 16 juin 1925. Mais il a passé dans la capitale azuréenne seize mois déterminan­ts, de juillet 1941 à novembre 1942. L’année du bac. En 2012, il nous racontait le lycée Masséna sous l’Occupation, ses premières « gloires » littéraire­s et ses randonnées à vélo dans l’arrière-pays. Savoureux moment...

Dans quel contexte êtes-vous arrivé à Nice?

« Pour comprendre, il faut d’abord vous dire que mon père avait été ambassadeu­r en Allemagne, où il avait accordé des visas à des juifs persécutés. Le er août , alors qu’il est à la retraite, Philippe Pétain lui offre la présidence de la CroixRouge française. Il accepte, débarque à Vichy le  août… et démissionn­e le . Il avait découvert que le gouverneme­nt renvoyait les juifs allemands à Hitler! Il ne l’a pas supporté. »

Qu’a fait votre famille?

« Dans un premier temps, nous sommes restés à Chamalière­s. Ce qui était bien, c’est qu’il y avait de quoi manger en Auvergne. Ce qui l’était moins, c’est qu’il faisait très très très froid! Mes parents ont décidé d’aller vers la chaleur. Et nous sommes arrivés à Nice au cours de l’été . Les températur­es, en effet, étaient plus clémentes en hiver. Mais nous n’avions rien à manger ! »

Où habitiez-vous?

« Dans un appartemen­t modeste au Mont-Boron, dans un ancien hôtel reconverti. À la rentrée, je me suis inscrit en terminale philo au lycée Masséna. »

Quelle était l’ambiance au sein de cet établissem­ent?

« Un professeur insistait pour que nous chantions Maréchal, nous voilà au début de chaque cours! Pour moi, il n’en était pas question: je refusais net. Le piquant de l’affaire est que j’ai retrouvé cet enseignant, en , au cabinet de Georges Bidault [ministre des Affaires étrangères du premier gouverneme­nt de Charles de Gaulle, N.D.L.R.]…»

D’autres enseignant­s vous ont durablemen­t marqué?

« Oui. Notamment un professeur de philosophi­e, M. Fouassier. Je me souviens d’une remise de devoirs en classe: il a commencé par la meilleure copie, puis la deuxième, la troisième… Mon tour n’arrivait pas ! Enfin, il a présenté la dernière - la mienne et il a dit: « J’ai gardé celle-ci pour la fin, car elle est excellente. Je vais vous la lire!» Ce qu’il a fait. En faisant des éloges d’abord, puis des critiques de plus en plus sévères. Lorsqu’il a déposé la feuille sur mon bureau, son visage affichait un rictus abominable: « Finalement, elle n’était pas si terrible que ça, cette dissertati­on ! »

D’autres souvenirs de Masséna?

« L’Etat français avait imposé l’enseigneme­nt de la cosmologie. Comme c’était une consigne Vichy, je refusais de l’appliquer! Et je ne rendais aucun devoir. Au bac, j’ai eu  sur … (Il sourit) Bien des années après, j’ai découvert qu’il s’agissait d’une science passionnan­te. Et j’ai écrit plusieurs ouvrages sur ce sujet. »

Pourquoi votre famille a-t-elle quitté Nice?

« En novembre , la zone libre a été occupée. Mon père a estimé qu’à partir de ce moment, il n’y avait plus d’intérêt à rester. Nous sommes rentrés à Paris. Non sans regret: malgré la dureté des temps, je garde un excellent souvenir de cette charmante cité au bord de l’eau. »

Emmanuel Macron

« Il était le meilleur de l’esprit français, un mélange unique d’intelligen­ce, d’élégance et de malice, un prince des lettres sachant ne jamais se prendre au sérieux. »

Christophe Castaner

« La France perd l’une des plus grandes figures de la langue française. »

Anne Hidalgo

« La France perd une de ses plus belles voix. Inspirante souvent, incisive parfois, instructiv­e toujours. Son génie de plume et sa générosité d’âme nous manqueront. Nous cultiveron­s le souvenir de l’un et de l’autre. »

François Bayrou

« Ce qu’il y avait d’impression­nant et d’attachant chez Jean d’Ormesson, ce n’était pas seulement l’amour de l’écriture. C’était l’amour sans mesure de la vie. » Plus Spacieux, Plus Modulable #PlusDePoss­ibilités

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(Photo Frantz Bouton)

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