Sprint final
◗ Dans les magasins, la course aux cadeaux a cédé la place au grand rush pour les préparatifs du repas de Noël. ◗ Les petits artisans font de la résistance face à la grande distribution. ◗ Récit d’une folle semaine à l’hyper Carrefour-Lingostière.
On se lâche ! » C’est le mot d’ordre qui semble avoir guidé les consommateurs ces dernières semaines. Et qui reviendra à table, en cette soirée de réveillon de Noël et demain midi, de Mandelieu à Menton, du littoral aux vallées. C’est qu’elles s’annoncent bien garnies, ces tables, à l’heure du rendez-vous familial par excellence. «Onselâche» sur les mets, sur les cadeaux, et sur la carte bancaire en général : tel a été le fil conducteur de ces semaines de frénésie consumériste. « Des indicateurs comme les cartes bancaires montrent que des records ont été atteints sur les achats ces derniers week-ends, confirme Pascale Hebel, directrice du pôle consommation et entreprise au Credoc (Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie). Des phénomènes comme le Black Friday ont super bien marché. Ce sont des indicateurs d’une envie de consommer. On dépense plus ce Noël que le précédent. » Cette tendance traduit une remontée du moral des ménages français : « L’économie va mieux, les perspectives sont bonnes pour 2018. Donc forcément, on va se lâcher!»
« Davantage de repérages »
Nous y revoilà : se lâcher, coûte que coûte. Quitte à consentir quelques sacrifices avant et après. Et quoi qu’en dise notre balance. Car si nombre d’achats de Noël ont été réalisés dès novembre au gré des promos type Black Friday, ce sont forcément les courses alimentaires qui ont rythmé ces derniers jours. Plus encore depuis vendredi soir et le début des congés scolaires. Car le calendrier 2017 a accéléré la tendance. Et le sprint final est ébouriffant. Les géants de la grande distribution ont éclusé des stocks par milliers de tonnes. Les petits artisans ont joué une partie de leur chiffre d’affaires annuel sur quelques jours. Bref, la « grande bouffe » version Noël reste un enjeu tant commercial que sentimental. « On se lâche toujours un peu plus pour les fêtes, même si le budget est de plus en plus serré », observe Jean-Michel Cloppet, président de la Fédération des associations de commerçants et artisans cagnois. « Les habitudes de consommation changent en termes de période d’achat, témoigne Jérôme Bertin, cogérant du Clos de Laure, qui propose ses produits artisanaux à Nice. Il y a quelques années, les achats s’étalaient de début novembre à Noël. Aujourd’hui, ça se concentre sur les deux dernières semaines. Je pense que les clients font beaucoup de repérages et moins d’achats compulsifs. »
À la dernière minute
Pas forcément un cadeau de Noël pour les petits commerçants. Car cette concentration des achats alimentaires induit, outre un rythme frénétique, de potentiels refus de commande. Symptomatique, sans doute, d’une société soumise au culte de l’instantanéité. Où le consommateur veut tout, tout de suite. Et où le père Noël Amazon peut débarquer jusqu’au soir du 24 décembre. Or, les grandes surfaces, elles aussi, jouent gros. Le mois de décembre concentre « les plus grosses semaines de chiffre d’affaires de l’année – et de loin, atteste de son côté Philippe Smolnikoff, directeur du magasin Carrefour Lingostière. Et ce samedi 23 est le plus gros jour de l’année. » Un tour en ville ou en caisse, hier, en a donné la mesure aux clients de magasins pris d’assaut. Les « hyper » ont dégainé l’artillerie lourde, avec des produits de luxe (caviar, truffe...) proposés à des prix d’appel dérisoires. Les petits commerçants, eux, résistent avec leurs armes : qualité, conseil, convivialité. « L’avantage des magasins de proximité, c’est qu’on est moins soumis à la tentation. L’offre est de qualité supérieure mais plus restreinte, remarque Jean-Michel Cloppet. On sait que pour maîtriser son budget, mieux vaut faire ses courses le ventre plein et dans les commerces de proximité. Surtout chez les hommes ! »