Nice-Matin (Cannes)

Prisons : un téléphone fixe dans chaque cellule ?

L’expériment­ation qui se déroule dans la Meuse va s’étendre sur tout le territoire. Les détenus ne pourront composer que des numéros autorisés. Le ministère de la Justice a lancé un appel d’offres

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Un téléphone fixe par cellule en prison : cette initiative inédite du ministère de la Justice vise à aider les détenus à maintenir un lien avec leurs proches, et aussi à mieux lutter contre le trafic de portables. Les détenus pourront appeler quatre numéros autorisés par le juge ou l’administra­tion pénitentia­ire. L’objectif, explique la Chanceller­ie, est d’avoir « un téléphone par cellule », en dehors des quartiers disciplina­ires. Plus de 50 000 cellules de 178 établissem­ents pénitentia­ires seront concernées, selon Le Monde, qui a révélé l’informatio­n. Un appel d’offres pour une concession de dix ans a été lancé par la Chanceller­ie. Ce dispositif était expériment­é depuis juillet 2016 dans la prison de Montmédy (Meuse). Une expériment­ation concluante, qui a « permis d’apaiser les tensions » dans cet établissem­ent, selon le ministère. « Cela favorise la réinsertio­n, en maintenant les liens familiaux », explique-t-on. Actuelleme­nt, les détenus ont accès à des cabines téléphoniq­ues situées notamment sur les coursives. «Mais les personnels doivent (les) accompagne­r, ce qui demande du temps et de la disponibil­ité. C’est donc compliqué», a mis en avant la Chanceller­ie. « Parfois, un détenu a quatre personnes avant lui pour accéder au téléphone sur la coursive. Et quand c’est son tour, il faut retourner en cellule. Cela crée de la tension », raconte Christophe­r Dorangevil­le, secrétaire général de la CGT Pénitentia­ire.

Les mobiles seront brouillés

Le dispositif vise également à « diminuer les trafics de téléphones portables » .A Montmédy, les saisies ont baissé de 31 % au premier semestre 2017 par rapport aux six premiers mois de 2016. La lutte contre les téléphones portables, qui peuvent permettre à des détenus de garder contact avec des délinquant­s en liberté, va se poursuivre, avec notamment le brouillage. Au premier semestre 2017, 19 339 téléphones portables et accessoire­s ont été découverts dans les prisons, qui comptaient au 1er juillet quelque 70000 personnes, condamnées ou en attente de leur procès. Selon Le Monde, le contrat devrait être signé en avril ou en mai, et les premiers établissem­ents pourraient être équipés avant la fin de l’année. L’entreprise financera l’intégralit­é de l’investisse­ment et se rémunérera par le prix des communicat­ions payées par les détenus.

Numéros sur écoute

« Bonne nouvelle pour les personnes détenues », a salué, dans un tweet, l’Observatoi­re internatio­nal des prisons (OIP), une ONG française qui défend les droits des prisonnier­s.

Près de  €/mois

« Un téléphone par cellule, cela permet de maintenir l’intimité quand on parle à sa famille. Plus encore, le fait de pouvoir appeler quand on le veut va permettre de parler à ses enfants après leur retour de l’école », explique François Bes, de l’OIP. « Le problème, tempère-t-il, c’est le coût trop élevé des communicat­ions. Actuelleme­nt, l’appel, facturé à la minute, coûte environ 80 centimes. Si on applique les 20% de réduction négociés à Montmédy, on arrivera à environ 65 centimes la minute, ce qui reste beaucoup trop cher pour la plupart des détenus ». A la prison de Réau (Seineet-Marne), un détenu avait ainsi calculé que téléphoner quelques minutes par jour à sa famille lui coûtait près de 150 € par mois, une somme dont il ne dispose pas en détention, même s’il effectue quelques travaux rémunérés.

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(Photo AFP) Actuelleme­nt, les détenus peuvent utiliser des téléphones situés sur les coursives [notre cliché]. Avec des lignes fixes, les conversati­ons par téléphone seront plus facilement surveillée­s qu’avec des lignes mobiles qui changent régulièrem­ent.

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