Nice-Matin (Cannes)

Jacques Pouplot : première interview de maire

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Cela lui est tombé dessus comme la foudre sur un arbre isolé. Il n’avait pas vocation à devenir maire. Il en a pris le titre « à l’insu de son plein gré », comme il l’a souligné le soir de son élection. Ce jour-là, 27 décembre, Jacques Pouplot « permute » avec André Roatta, qui, lui, prend le poste de premier adjoint. Hier matin, il a inauguré son fauteuil de chef de la majorité. «Je ne m’y étais pas encore assis, on n’a pas eu le temps de changer les bureaux. » Et comme c’était jour de « première », il s’est aussi confié à nous. Sans écharpe tricolore, mais avec un an de plus : ce mercredi, il fêtait son anniversai­re !

Vos premiers jours de maire ?

Pour l’instant, ça ne change pas grand-chose. J’occupais déjà des fonctions à la mairie, alors je connais la maison.

Le regard de la population sur vous?

Certains m’ont félicité. Il y en a que ça amuse parce qu’ils savent que devenir maire n’était pas pour moi une grande priorité. Et puis d’autres qui me disent : “sincères condoléanc­es”. Enfin, il y a ceux qui ne disent rien.

La démission d’André Roatta ?

Il est parti se reposer parce qu’il était vraiment fatigué. Le passage de témoin s’est fait progressiv­ement. On en avait discuté une première fois au mois d’octobre. Il a des problèmes de santé et personnels. Et puis nous avons eu de

‘‘ grosses contrariét­és : une pénalité à cause des logements sociaux, imposée de façon brutale, le PLU, etc. Des choses qu’il a eu de plus en plus de mal à digérer. Un jour, il m’a dit : “Je démissionn­e”. Et je lui ai répondu : “Si tu pars, moi aussi”. Je ne voulais pas prendre la charge tout seul sur mes épaules. De plus, nous étions assez complément­aires au niveau des compétence­s. Je fais partie des gens qui considèren­t que tout seul, on ne fait pas grand-chose. Je ne crois pas à l’homme providenti­el.

En général, le maire sortant devient conseiller municipal, pas premier adjoint...

Ce qu’on a souhaité, c’est qu’il n’y ait pas de bouleverse­ment dans l’équipe. Au début, André voulait rester conseiller municipal, ce qui aurait pu poser des problèmes au sein de l’équipe par rapport à la désignatio­n d’un nouveau premier adjoint. L’idée a été que le changement ne concerne que nous deux.

Vous voilà maire. Vous n’étiez pas programmé pour cela...

Non. Et je ne suis pas sensible à tout ce qui est honorifiqu­e. J’ai une écharpe d’adjoint, si je l’ai portée dix fois depuis que je suis élu, c’est le bout du monde. Je n’ai pas fait ça pour les honneurs, depuis le départ d’ailleurs. Quand je suis entré dans la vie politique locale, c’était surtout pour occuper mon temps de retraite et me rendre utile.

Pourquoi avoir choisi la vie publique ?

Cela s’est fait par hasard. Il y a eu des élections en  à La Roquette parce que l’équipe municipale en place avait démissionn­é. Un ami m’a entraîné et je me suis retrouvé sur la liste de Victor Daon.

Dont vous vous êtes rapidement éloigné...

Sa gestion était confidenti­elle. Ils étaient deux ou trois à prendre des décisions et les autres n’étaient au courant de rien. J’avais conscience que ça n’allait pas mais on n’arrivait pas à avoir une explicatio­n. À cette époque-là, il y a eu l’histoire de l’entrée du haut pays au sein de Pôle Azur Provence. On en avait discuté avec l’équipe majoritair­e et celle-ci était très favorable au fait que les Monts d’Azur et Terres de Siagne (les deux communauté­s de communes du haut pays et de SaintValli­er, Ndlr) puissent y adhérer. Un jour, je rencontre un élu de Mouans-Sartoux qui me dit : “Nos maires ont fait un truc bizarre. Ils ont voté contre, en conseil des maires, l’entrée du haut pays.” Je me suis procuré le compte rendu qui confirmait cela. C’était une erreur politique magistrale et on s’est beaucoup fâché à ce momentlà. Mais j’avais déjà de gros doutes quant à la gestion communale, qui se sont confirmés par la suite. J’ai donc démissionn­é à la fin . Je n’avais pas l’intention de me présenter comme maire et, d’ailleurs, si je l’avais fait, je n’aurais pas été élu étant un nouvel arrivant. Avec quelques amis, on est allé chercher André Roatta... qui s’est bien fait prier.

Vous allez apporter une touche personnell­e à la gestion municipale ?

Il y aura forcément du changement car, avec André, nous sommes complément­aires mais pas identiques. Je pense qu’il y a des choses à revoir et, en particulie­r, réunir les commission­s qui sont un endroit où l’on peut discuter avec l’opposition. On avait tendance à ne pas assez travailler en équipe et cela me paraît important de le faire. Après, on ne va pas changer les projets qui avaient été définis préalablem­ent. Ce que je souhaite, c’est donner plus de place au débat qu’aux apartés sans intérêt.

Vous vous considérez comme un « politique » ?

Pas du tout. Je suis encarté chez Les Républicai­ns mais c’est historique : avant, j’étais au RPR. Je me considère plutôt comme un semibénévo­le au service des administré­s. Être maire, c’est une responsabi­lité, une obligation de résultats vis-à-vis de la commune et des habitants.

Les problémati­ques du village ?

On les a définies il y a déjà longtemps. Le premier problème, c’est le vieux village. Il était en train de mourir de sa belle mort. On a déjà fait beaucoup de choses (l’alternat, le stationnem­ent) mais il souffre d’un manque de vie. On a un projet au niveau du terrain Ferragnon (à l’entrée du village, Ndlr). On va y construire  logements mais surtout  m² de surface commercial­e et de surface d’intérêt communal. On a l’intention d’y installer un petit supermarch­é de centre-ville, garder un point poste et on étudie la possibilit­é d’aménager une maison médicale et une crèche. On a aussi le projet de créer une nouvelle maison des associatio­ns. Les locaux libérés permettron­t à un restaurant de voir le jour. Enfin, la commune a acheté un petit bout de terrain pour que les enfants de l’école puissent y faire du sport. Lors de la première mandature, entre la mairie, les syndicats et l’agglo,  millions d’euros de travaux ont été réalisés : l’Espace culturel, la nouvelle école, etc. Les gros investisse­ments sont faits. On peut donc passer à autre chose.

Quid des logements sociaux ?

On en a , il nous en faudrait un peu plus de  et ce n’est pas possible à cause des PPR (Plans de prévention des risques, Ndlr) et la structure de la commune. Chez nous,  % de la population est scolarisée en primaire et en maternelle. Cela a un coût. S’il faut le doubler, ce n’est même pas jouable. Lorsqu’on a pris la mairie, le taux de logements sociaux était de %. Aujourd’hui, nous sommes à % mais depuis

‘‘ ans,iln’yapas eu de constructi­on de collectifs. La pénalité va donc passer de   à   euros et on ne pourra pas la payer, sauf à augmenter les impôts.

Vous comptez vous inscrire dans la durée ?

Ces derniers temps, tout est allé très vite et je ne me suis pas posé la question de savoir ce que je ferai en . Mais, qui sait, peut-être vais-je prendre goût au rôle de maire, même si c’est parfois compliqué.

Par exemple ?

Il y a l’arrogance de l’administra­tion qui traite les élus comme des chiens. On nous explique qu’il faut passer en zone agricole un terrain goudronné. Quand on demande comment faire pousser des fleurs sur du goudron, on nous répond : “Ce n’est pas notre problème”. C’est insupporta­ble. Il y a aussi toute cette “réunionite” qui va avec la fonction, les cérémonies où il faut s’infuser des heures de discours. Tout cela, ce n’est pas mon truc.

Vos relations avec l’opposition ?

Ce n’est pas une opposition politique puisqu’on est à peu près tous du même bord idéologiqu­e. Mais on a eu un tort : c’est de ne pas assez la concerter. J’essaierai de faire un peu mieux à l’avenir. Il faut respecter son rôle qui est de représente­r un contre-pouvoir.

La Roquette tournée vers le Pays de Grasse, c’est logique ?

Non. Mais on n’a pas eu le choix. À une époque, la crainte était que Michel Mouillot (alors maire de Cannes, Ndlr) n’ait des vues sur La Roquette. Il y a donc eu une alliance avec Grasse pour éviter de se faire avaler par Cannes. Après, pour moi, l’intercommu­nalité est une absurdité intégrale. Il aurait mieux valu obliger les communes à s’associer sur les points fondamenta­ux que sont les transports, les déchets, etc. Mais l’agglo, est une source de complicati­ons. La structure a engendré un délire d’embauches dont l’utilité ne saute pas aux yeux. Elle n’a pas résolu les problèmes et elle coûte cher.

Les finances du Pays de Grasse sont au plus mal. Qu’est-ce que ça vous inspire ?

Des inquiétude­s. Mais on est tous à l’agonie financière­ment. Lorsqu’on a été élu, La Roquette était quasiment en faillite. On a augmenté les impôts de %, et si on avait écouté nos avocats, ils auraient plus que doublé. La commune a été remise en ordre de marche et puis, en , les dotations ont commencé à baisser. Aujourd’hui, on n’a plus un rond (sic) pour investir, on n’est même plus capable de boucler notre budget puisque se rajoutent les pénalités pour les logements sociaux. Malgré une gestion saine, on est en difficulté et ce n’est quand même pas normal.

Que vous reste-t-il à réaliser d’ici à la fin du mandat ?

Le projet Ferragnon et le projet de revitalisa­tion du village qui sera lancé de façon irréversib­le ; les travaux du chemin des Roques qui se font par étapes plus quelques voiries à reprendre ici et là. Il n’y a pas de grands projets parce qu’on a réalisé à peu près tout ce que l’on s’était engagé à faire.

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