Nice-Matin (Cannes)

Le maire de Rigaud inéligible pour cinq ans

Jean-Paul Crulli, 79 ans, a par ailleurs été condamné à six mois de prison avec sursis pour prise illégale d’intérêt par le tribunal correction­nel de Nice. Il a annoncé qu’il démissionn­ait

- GRÉGORY LECLERC

Lundi matin le préfet aura ma démission sur le bureau. » Jean-Paul Crulli, 79 ans, maire de Rigaud, dans la vallée du Var, était convoqué hier matin devant le tribunal correction­nel de Nice. Il a été condamné à six mois de prison avec sursis pour prise illégale d’intérêt, à cinq ans d’inéligibil­ité et à payer 1 943 euros de dommages et intérêts à sa commune. À la sortie de la salle d’audience, Jean-Paul Crulli était sous le choc (lire ci-contre). Devant le tribunal, le maire de cette petite commune de 230 habitants de la vallée du Var a dû s’expliquer sur les conditions dans lesquelles, au cours de l’été 2013, l’unique employé municipal de Rigaud s’était retrouvé à retaper la villa de son fils. Et ce, sur le temps de travail communal. Un employé communal avait même été recruté pour pallier l’absence de l’homme à tout faire dans les rues de Rigaud ! « Oui, quelqu’un me remplaçait quand je travaillai­s chez le fils du maire », a benoîtemen­t avoué le cantonnier. Ce dossier a été jugé dans une atmosphère électrique et en présence d’une forte délégation venue soutenir le maire.

Menaces à la barre

Un incident, en particulie­r, a jeté de l’huile sur le feu. L’employé communal, Georges Léon, venait tout juste d’admettre, alors même qu’il avait été cité par la défense, qu’il avait bien monté des murs pour le fils du maire. Et sur son temps de travail municipal, s’il vous plaît. Du pain béni pour l’accusation. Alors que la présidente, Catherine Bonnici, discutait d’un élément avec son avocat, Jean-Paul Crulli a joué du brouhaha pour menacer l’employé municipal, alors à un mètre de lui. « Dis la vérité, autrement tu verras... », a glissé le maire au cantonnier. Comme une partie de la salle, le procureur de la République et l’avocat de la partie civile ont entendu cette menace sous-jacente. Incident. Le procureur, Anne Dagain, a exigé que la phrase soit inscrite au procès-verbal. L’avocat du maire, Me Henri-Charles Lambert, tentera d’expliquer qu’il ne s’agissait pas de menaces. Mais l’impression fut désastreus­e. Les parties civiles (dont l’ex premier adjoint de Rigaud, à l’origine de la plainte), ont réclamé par leur avocat, Me David Rebibou, le remboursem­ent des sommes indûment versées par la commune. Le procureur de la République a requis un an avec sursis, 10 000 € d’amende et interdicti­on d’exercer une fonction publique. La défense du maire, par l’intermédia­ire de Me Henri-Charles Lambert, a plaidé avec conviction la relaxe, estimant qu’aucune preuve de la prise illégale d’intérêt n’avait été fournie à l’audience, dénonçant au passage le climat délétère régnant dans la commune. Cela n’aura pas suffi.

« C’est un jugement qui m’apparaît très équilibré, fondé sur des éléments objectifs du dossier », a commenté Me Rebibou à la sortie. Rigaud n’a donc bientôt plus de maire. Mais n’en a sûrement pas fini avec le temps de la discorde.

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(Photo G. L.) Jean-Paul Crulli, hier à la sortie du tribunal correction­nel de Nice.

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