Nice-Matin (Cannes)

Un surveillan­t de Grasse s’enchaîne dans sa prison

Durant près de 7h30, un syndicalis­te Force ouvrière pénitentia­ire s’est enchaîné hier sur une grille de l’un des couloirs de passage de la maison d’arrêt. Un geste spectacula­ire

- GRÉGORY LECLERC gleclerc@nicematin.fr

Hier, en début d’aprèsmidi, la direction de la maison d’arrêt de Grasse a finalement réussi à trouver un double des clés pour détacher Hervé Segaud. Ce gardien, syndicalis­te Force ouvrière pénitentia­ire, s’était enchaîné vers 6 heures hier matin aux grilles intérieure­s de l’établissem­ent. Ce geste spectacula­ire, qui a duré près de 7 h 30, a permis au surveillan­t de médiatiser la lutte de ses camarades. Aux premières heures, Hervé Segaud s’était enchaîné à une des grilles de passage, peu avant la rotonde, le noeud de circulatio­n de la prison. Il a utilisé des entraves de pieds, des chaînes à bracelets habituelle­ment réservées aux détenus. Il a ainsi paralysé en partie les déplacemen­ts au sein de la maison d’arrêt. À son cou, le syndicalis­te Force ouvrière portait un panneau: « Surveillan­t insulté, menacé, agressé, méprisé, muselé, sanctionné. Enchaîné mais fier et debout! » Ce geste rarissime a surpris et quelque peu embarrassé la direction. « Beaucoup de surveillan­ts sont venus me voir pendant mon occupation. Ils m’ont apporté à manger, à boire, y compris des agents qui ne travaillen­t pas habituelle­ment dans ce secteur-là », a commenté hier après-midi le syndicalis­te.

Des syndicats divisés

Le gardien a été très sollicité par de nombreux médias, donnant même une interview radio alors qu’il était encore enchaîné. « Je fais cela pour qu’on parle de notre mouvement, de notre ras-lebol, de notre colère », a confié le surveillan­t à notre quotidien. « Les menaces de règlements de compte, de la part des détenus, sont quotidienn­es. Dès qu’on a une altercatio­n, un point de désaccord, ça commence par insultes, puis viennent les menaces et parfois les coups. »

Blocage à Nice

Ces dernières heures, les sanctions sont tombées, de la part du directeur de l’administra­tion centrale pénitentia­ire. Le but : faire fléchir le mouvement. Dans un courrier adressé aux directeurs de prison, que NiceMatin s’est procuré, Stéphane Bredin durcit le ton. Pour les grévistes, il tape d’abord au portefeuil­le : « Applicatio­n systématiq­ue de la retenue du trentième décomptée à partir du 20 janvier. » Et exige, pour la journée du 24 janvier, de cinq jours d’exclusion temporaire avec sursis « pour toute cessation concertée du service ou acte collectif d’indiscipli­ne caractéris­ée », à cinq jours ferme et dix avec sursis « pour les agents qui entraverai­ent l’accès des personnels de direction (...)». Des menaces qui n’ont pas impression­né tout le monde. La maison d’arrêt de Nice a de nouveau été bloquée hier matin, nécessitan­t une nouvelle fois l’interventi­on des forces de l’ordre. Hier soir, la base était très partagée sur les dernières propositio­ns faites dans la journée par la ministre de la justice: 1100 emplois supplément­aires, des primes plus élevées, du matériel de sécurité et des quartiers « étanches » pour les détenus radicalisé­s. Les syndicats, très divisés, devaient se prononcer sur la poursuite, ou non, du mouvement. Hier soir, FO pénitentia­ire et la CGT ne semblaient pas favorables à signer le projet d’accord. De son côté, Emmanuel Macron assurait la ministre de la Justice, Nicole Belloubet – en grande difficulté sur le dossier – de son entier soutien. Dans la soirée, la poursuite du mouvement de blocage était décidée. (Lire aussi en pages France)

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Hervé Segaud, syndicalis­te Force ouvrière pénitentia­ire, dans une très spectacula­ire opération au sein de la maison d’arrêt de Grasse. (DR)

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