Nice-Matin (Cannes)

Météorolog­ie : le coût du vent

Trois épisodes « vents violents » successifs : les Alpes-Maritimes ont vécu un mois de janvier sans précédent, selon Météo France. Quel impact ? Quelles leçons ? Décryptage

- Dossier : Christophe CIRONE ccirone@nicematin.fr

On n’avait jamais vu un tel vent sur la Côte d’Azur ! » Cette exclamatio­n restera comme le tube de janvier 2018. Un mois record sur le front météorolog­ique, sur le littoral mais surtout dans les vallées des Alpes-Maritimes, où plusieurs valeurs absolues sont tombées. Les habitants de Saint-Cézaire-sur-Siagne peuvent en témoigner : le 3 janvier, Eleanor a fait souffler sur leurs têtes un 177 km/h historique ! Au-delà des chiffres, cette succession d’événements climatique­s restera dans les annales. Notre départemen­t a été placé en vigilance orange « vents violents » à trois reprises en l’espace de trois semaines. Presque autant qu’au cours des treize années précédente­s... Une série « inédite » pour un « mois exceptionn­el », confirme Marie-France Delansorne, chez Météo France à Nice (lire ci-contre). Ana, Bruno, Carmen, Eleanor... Cet hiver, les tempêtes se suivent et ne se ressemblen­t pas forcément. Sinon par leur intensité. Les dernières en date (3 et 4 janvier, 16 et 17, puis 20 et 21) n’ont même pas eu besoin de la pluie pour causer des dégâts.

Habitation­s scalpées

Bien sûr, le bilan reste sans commune mesure avec les intempérie­s historique­s qui firent vingt morts en octobre 2015. Ce mois-ci, deux piétonnes ont successive­ment été blessées à Nice par la chute d’un arbre, puis d’un candélabre. Aucun décès n’est à déplorer. Mais le départemen­t continue à panser ses plaies matérielle­s. Car pour les particulie­rs comme pour les entreprise­s, les coups de vent ont un coût. De Valdeblore à Valberg, un certain nombre de toitures s’est envolé dans les vallées, scalpant littéralem­ent plusieurs habitation­s ou résidences. La facture est à présent entre les mains des assurances. Le réseau électrique a souffert aussi. La tempête Eleanor a ainsi infligé des coupures à 7 000 foyers des A.-M. et du Var. À chaque fois, Enedis a dû mobiliser ses agents, parfois épaulés par des élagueurs. Parcs, jardins et forêts ont été sensibleme­nt impactés, conduisant les collectivi­tés à engager d’importants moyens. Le Sdis 06 a mobilisé 370 sapeurspom­piers pour Eleanor.

Trafic aérien affecté

L’aéroport Nice Côte d’Azur connaît un hiver agité. Le 11 décembre, les orages l’avaient contraint à l’arrêt forcé (plus de 100 vols sur 118 annulés aux départs et aux arrivées). Le 3 janvier, les violentes rafales ont généré des retards sur 8 % des vols. Le 8 au soir, nouvelle alerte, pour trois vols déroutés ou annulés. Les 17 et 18 janvier, encore une quinzaine d’annulation­s. Sollicitée, la direction de l’aéroport ne souhaite pas communique­r sur cet impact économique. Ces perturbati­ons impliquent fatalement une perte en termes de redevances pour l’aéroport, dont le chiffre d’affaires 2016 s’élevait à 244 millions d’euros. Tout ceci ne l’a cependant pas empêché de franchir le cap des 13 millions de passagers en 2017.

Agriculteu­rs sinistrés

Après la sécheresse, après la grêle, le vent. Les agriculteu­rs azuréens n’avaient pas besoin de ce nouveau coup dur. « C’est la dernière tempête qui nous a fait le plus mal. Elle a fini le travail des rafales du 17 janvier » ,témoigne Jean-Philippe Frère, vice-président de la Chambre départemen­tale d’agricultur­e. 24 exploitant­s en ont pâti. Essentiell­ement des maraîchers, dont les serres tunnels ont été détruites ou soufflées. « On ne peut que s’inquiéter de cette succession d’aléas climatique­s, confie Jean-Philippe Frère. D’accord, notre métier demande de s’adapter à la nature... Mais jusqu’à un certain point ! Nous allons sensibilis­er les agriculteu­rs pour les encourager à souscrire des assurances multirisqu­es. » Une précaution pas inutile, par ces temps capricieux. Allons-nous devoir vivre avec ? Pour Météo France, il serait hasardeux de lier cette série d’aléas au réchauffem­ent climatique. Reste que « notre départemen­t n’est pas habitué à de tels coups de vent, note Jean-Philippe Frère. S’agit-il de cycles ? Ou d’une modificati­on durable ? Je suis incapable de le dire. Ce que je sais, c’est que ces phénomènes se sont accentués. »

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