Nice-Matin (Cannes)

Si une bombe était tombée »

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coeur des conversati­ons. A Valdeblore, mais aussi dans d’autres vallées des Alpes-Maritimes, voire sur le littoral. « Les anciens, les voisins disent tous que c’est un phénomène nouveau... » Philippe Richier acquiesce. «On n’a jamais eu autant de vent. Et c’est de plus en plus violent. Est-ce dû au réchauffem­ent climatique, aux bouleverse­ments entre l’air chaud et l’air froid ? » Pour le maire de Valdeblore, Fernand Blanchi, les phénomènes météo ne sont pas plus fréquents, mais plus marqués. Et l’édile de souligner : « Il y a eu une belle frayeur, mais aussi une belle solidarité. »

Solidarité montagnard­e

Perché sur le toit du Presbytère du Val, Hervé Gauthier confirme. « Tout le monde a mis la main à la pâte. On habite ici aussi. On ne va pas laisser les gens en plan... » Le charpentie­r, épaulé par David Fortoul, vient de réparer le plus urgent et de bâcher sept toits. « Comme ça, ils sont au sec ! » Depuis la tempête, les entreprise­s du pays s’activent à Valdeblore. A l’instar de Pascal Velozo et son équipe, affairés à « clouer, visser, renforcer. Le but premier, ce n’est pas l’esthétique mais d’éviter des blessés. » Au sol, pour la société Le Sis Detox, le but est de désamiante­r, en évacuant les plaques L’entreprene­ur a pu le constater : fibrocimen­t. Il est midi. Les hommes « Les résidents ont été un peu choqués. en blanc ôtent leurs tenues Ça s’est produit la nuit, avec de protection, exténués. Ils viennent beaucoup d’impacts, beaucoup de de charger huit grands sacs bruit... Heureuseme­nt, ça s’est très chargés d’une tonne de matériau bien passé. » Au plan humain du chacun. « Nous, on finit demain moins. Car côté dégâts, la facture soir. Mais côté charpenter­ie et rénovation, pourrait osciller entre 100 000 et il y a du boulot ! » 120 000 euros, estime Jean-Paul Si les bourrasque­s ont sévi avec Matton, représenta­nt du syndic vigueur à Valdeblore, elles n’ont de la résidence, Citya. pas épargné l’ouest du départemen­t. « On est en montagne, et en montagne, A Gréolières, la toiture d’un ça souffle ! », rappelle JeanPaul hôtel avait été arrachée dimanche Matton, néanmoins « impression­né dernier. A l’aube, la coiffure » par ces aléas météo. Lui en bac acier aussi observe

‘‘ du Pas du Rocher « une dégradatio­n s’est envolée, On n’a jamais vu climatique, atterrissa­nt une irrégulari­té

autant de vent, dix mètres des plus loin. aussi violent” températur­es. Depuis, l’hôtel On peut passer - actuelleme­nt du t-shirt en fermé - est protégé par une bâche. journée à -5°C la nuit... » Une habitation voisine a connu A Péone-Valberg, le domaine forestier le même sort. affiche les stigmates des De telles scènes se répètent dans d’autres vallées. Notamment à Péone-Valberg, particuliè­rement touchée. Le 17 janvier, une bergerie y a laissé ses 300 m2 de toiture. Le 21, c’est une résidence de quatre étages de la station, Le Perce Neige, qui a perdu 200 m2 de tôle. « Nous avons effectué un bâchage dans l’attente des experts puis d’une réfection quasi totale », explique André Lambert, de la société Val’Toitures.

Stigmates forestiers

récentes tempêtes. 40 à 50 mélèzes se sont couchés. Une dizaine d’autres va être abattue. Côté station, un arbre est tombé sur un téléski, un télésiège est parti s’accrocher à un pylône, un poteau électrique a chuté à plusieurs reprises... « Des vents violents comme ça, on n’en a jamais vu ! , assure Guy Ammiratti, maire de Péone. Ilya de plus en plus de vent. A Auvare ou dans la plaine de Puget aussi, plusieurs toits ont été arrachés. C’est incroyable ! Ça fait peur. On s’en sort bien mais... ça fait des frais. Et quand vous n’avez plus de toit, ça fait drôle ! »

Face aux aléas, s’adapter

Côté station, les réparation­s vont bon train. Mais le constat est là : « Les conditions climatique­s sont en train de changer, selon Marion Pirrottina, secrétaire générale du syndicat mixte de la station. Il faut développer des politiques respecteue­uses de l’environnem­ent, tout en préservant le développem­ent d’un territoire. » S’adapter. Tel est le défi des agriculteu­rs, soumis à rude épreuve par la météo ces dernières années. Pourtant, les serres-tunnels des maraîchers sont orientées en fonction du sens du vent. « Mais dans la nuit du 20 au 21, ils ont été tourbillon­nants, explique JeanPhilip­pe Frère, vice-président de la Chambre d’agricultur­e des A.M. Résultat : les tunnels plastiques des maraîchage­s n’ont pas résisté. Soit le vent les a plaqués au sol, soit il s’est engouffré dedans et ça a décollé. » Plaine du Var, Gourdon, La Colle-surLoup... Les dernières rafales de vent ont secoué les exploitati­ons agricoles à travers tout le départemen­t. En particulie­r à l’ouest du haut pays. A Gourdon, un éleveur a ainsi déploré pour 30 000 euros de dégâts. « Contre le feu, on peut balancer de l’eau. Contre l’eau, on peut creuser des tranchées. Mais contre le vent, malheureus­ement, on ne peut rien faire », rappelle Philippe Richier, depuis son jardin à Saint-Dalmas de Valdeblore. L’avenir dira si le ressenti villageois reflète, ou non, une mutation climatique sous nos latitudes. « Ici, les anciens le disent : il y a du vent depuis quatre-cinq ans. Alors que la vallée a toujours été à l’abri. Soit c’est cyclique, soit c’est le réchauffem­ent climatique, estime Benjamin, 35 ans. Etabli à Valdeblore depuis cinq ans, il conclut, d’un sourire : « Dans tous les cas, ça reste agréable à vivre. »

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