« Offrir un cadre d’évolution aux adolescents »
Le psychiatre Xavier Pommereau rencontre de plus en plus de jeunes qui expliquent « s’en coller une » tous les weekends. Auteur de nombreux livres sur l’adolescence, il livre ses impressions.
Le binge drinking, est-ce un phénomène si nouveau que cela ?
Oui, c’est évident. Il y a ans, lorsque j’étais en internat de psychiatrie, on ne croisait pas d’ado en coma éthylique. Aujourd’hui, il ne se passe plus une semaine sans qu’on ne nous en adresse. Ce qui change aussi, c’est que cela ne concerne plus seulement les garçons. Les filles s’y sont mises. Dès ou ans, elles participent à de véritables beuveries, ingurgitent des quantités folles d’alcool. Et cela ne concerne pas que la France. Des confrères rencontrés lors de congrès font le même constat, que ce soit à Genève, à Montréal…
Que faire face à ces comportements ?
Ne pas fermer les yeux, même si l’on n’est pas le parent. Le cas typique, c’est l’adolescente et sa « meilleure amie », comme elle l’appelle, qui se promènent manifestement saoules dans la rue avec de la vodka. Personne n’intervient. Au mieux, un policier municipal leur ordonne de vider la bouteille et leur fait un rappel à la loi. Ce qu’il faut faire, même si on ne les connaît pas, c’est les faire conduire au commissariat, que les parents soient convoqués afin qu’elles prennent la mesure de la gravité de leurs actes. Il ne faut pas oublier que lorsqu’elles se mettent dans cet état, elles risquent les vols, les agressions. Certaines me racontent : « Samedi dernier, j’étais tellement ivre que je me suis retrouvée dans un lit avec un garçon que je ne connaissais même pas, avec qui j’ai couché sans préservatif. » De là découlent d’autres problèmes, celles des MST [maladies sexuellement transmissibles, Ndlr], des grossesses non désirées, des avortements, etc. Les jeunes, en réponse à la surprotection parentale, vont s’abandonner dans les excès.
Quels conseils peut-on adresser aux parents ?
Il ne faut pas fermer les yeux. Ces comportements sont graves, les parents doivent en parler avec leurs enfants et éventuellement les emmener consulter. Il faut trouver la juste mesure : on ne peut pas du jour au lendemain tout leur interdire. Il faut leur offrir un cadre d’évolution avec des bornes. Ils ont besoin de se sentir rassurés ; pour cela, on leur laisse suffisamment de liberté tout en les maintenant en sécurité.