Nice-Matin (Cannes)

« Définition d’un chauffard ? Vous et moi ... »

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Après quatre années comme coordinate­ur sécurité routière du départemen­t, Jérôme Bordy, 49 ans, a passé la main fin février. Dans son bureau préfectora­l, derrière lui, un tableau Veleda affiche le nombre de tués pour 2017 : 55. Pour 2018, le chiffre 5. Rien que pour le mois de janvier. Il ne s’y fait pas. « C’est très lourd. Quand un accident survient, je reçois les télégramme­s, je peux voir ce qui s’est passé, l’âge de la victime. Je rencontre les forces de l’ordre qui ont vu les lieux de l’accident, ont prévenu les familles. On ne s’y habitue pas.» La définition d’un chauffard pour Jérôme Bordy ? «Vous et moi. C’est potentiell­ement Monsieur et Madame tout le monde. Des petites erreurs sont commises tous les jours qui peuvent avoir des conséquenc­es importante­s. Un accident c’est presque toujours la convergenc­e de plusieurs facteurs.»

« Le permis de tuer »

L’action de l’État s’articule autour de deux piliers, la répression et la prévention. Jérôme Bordy est un fervent partisan de la seconde voie. « Pour moi, c’est en multiplian­t les actions de prévention, notamment chez les plus jeunes, qu’on trouvera la clé.» Le coordinate­ur sécurité routière peine toutefois à comprendre certains comporteme­nts. « On peut se demander si le permis de conduire n’est pas le permis de tuer.» Particular­ité départemen­tale: la mortalité des pilotes de deux-roues. « Sur les 55 morts l’an dernier, 31 étaient des deux-roues motorisés.» Il reste beaucoup à faire. «La population est surtout sensible quand elle a été touchée dans sa propre chair. On dirait qu’il y a une frontière, celle de l’accident. Avant lui, la sécurité routière c’est pour les autres. Après l’accident, les gens changent leur façon de voir la route et se disent d’un coup que les règles, c’est peut-être bien.» Même s’il milite sans cesse pour la prévention, Jérôme Bordy se dit convaincu que les radars sauvent des vies. Et attend beaucoup de la future génération pour faire baisser la mortalité. «Onarrive sur une logique d’itinéraire. Avant on avait un radar à un endroit bien précis. Mais tout le monde ralentit avant et accélère ensuite. Maintenant la logique est d’avoir sept points de contrôle sur un trajet, avec des radars leurres et d’autres bien réels. On sait ainsi que sur cette route, on peut être flashé tout le long.» Il en veut pour preuve la première expériment­ation sur la Moyenne-Corniche : «Sur une année, après l’installati­on, sur la Moyenne-Corniche, on n’a plus eu d’accident.»

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