Nice-Matin (Cannes)

Reportage au coeur d’un stage

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On ne pourra vous dire ni le lieu, ni de quelle formation il s’agit. Nous avons pu nous glisser, anonymemen­t, dans un stage de sensibilis­ation à la sécurité routière. Il s’est tenu en février dans les Alpes-Maritimes. Notre objectif : approcher au plus près ceux que la justice désigne comme des chauffards. Non pour juger. Mais pour comprendre. Ils sont une quinzaine présents. Deux seulement viennent récupérer volontaire­ment des points. Les treize autres sont condamnés, par la justice, à y participer. Ils ne récupérero­nt pas de points. La plupart font l’objet d’une suspension de permis. Il est 8 h 30, le stage va durer deux jours. Les regards sont embarrassé­s. Pas facile d’être assimilé à un délinquant de la route. Quatre femmes pour onze hommes. Ils sont globalemen­t jeunes, la trentaine en moyenne. Dans le groupe, Adrien(1), la vingtaine jean-basket, se démarque : il blague, sympathise, baille bruyamment. Signe d’aisance, il a remonté les manches de son pull à capuche. Cool. Pas vraiment concerné. Le tour de table commence par une présentati­on personnell­e. Avouer l’inavouable. Ses addictions. Son comporteme­nt au volant. Pas toujours facile. C’est Sarah, petite brune d’une vingtaine d’années, dynamique et sociable, qui s’y colle. Elle travaille dans le milieu de la santé. « J’avais perdu mon permis sans le savoir, des feux rouge, la vitesse, le téléphone, la ceinture. Un jour, j’ai été contrôlée au volant. J’avais fumé un joint. Ça sentait dans la voiture. On m’a embarquée, perquisiti­on chez moi, puis le tribunal, une grosse amende, 1 000 euros et des poussières. Sans compter le stage de sensibilis­ation à 200 euros. » Elle fume encore, affirme qu’elle va bientôt s’arrêter. Pour elle, le danger sur la route, « c’est les autres ». L’une des deux formatrice­s répond du tac au tac en souriant : «Profitezen, ils sont là », en désignant la tablée. Gêne. Elle fait partie des « autres ». Au tour d’Adrien, le « rebelle » affiché au pull à capuche. Un commercial. Ce qui l’a amené là? « La fume ». Un retour de soirée chez des amis et le contrôle de gendarmeri­e. «Ils étaient là au mauvais moment et moi aussi », résume-t-il, arrachant un sourire aux autres participan­ts. Lui aussi a multiplié les infraction­s, ceinture, feux rouge, etc. Volubile, il se raconte. « J’ai vu la galère que c’est de pas avoir le permis pendant six mois. Conduire, je conduis bien. Depuis le retrait, j’ai eu la totale, le test psychotech­nique, la visite médicale, l’amende, le stage à 200 euros. Bientôt c’est le même prix que le permis. Mais bon, on paye, c’est comme ça, hein...» Il semble estimer que la justice tape trop au portefeuil­le. « Cela fait partie de la sanction, indique la formatrice. Mais, juste pour savoir, vous dépensez combien en cannabis chaque mois ? » Adrien, déstabilis­é : « Près de deux cents euros. » Mais il se reprend et affirme haut et fort : « Avec des stups, je suis plus concentré au volant. » Sarah le soutient : « Si, si, je vous promets que c’est vrai, on a l’impression de faire plus attention. » La formatrice répond : « C’est votre ressenti. Mais je vous confronter­ai plus tard à la réalité. Elle est très diffé-

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