Bure : les antinucléaires bravent l’interdiction de manifester
Ils étaient trois cents, hier, à marcher contre le projet de stockage souterrain de déchets radioactifs. Quelques échauffourées ont eu lieu vers le bois Lejuc
Des échauffourées, sans incident grave, ont eu lieu hier, entre opposants au projet d’enfouissement des déchets nucléaires de Bure (Meuse) et forces de l’ordre à la lisière du bois Lejuc, dix jours après son évacuation musclée. Près du bois, épicentre de la contestation des opposants, des projectiles ont été lancés sur les forces de l’ordre qui bloquaient l’accès à la forêt. Les gendarmes ont répliqué en lançant des grenades lacrymogènes. Le cortège de 300 manifestants selon la préfecture (400 selon les opposants), en route dès 15 h depuis Mandres-en-Barrois, a rebroussé chemin, a observé une journaliste de l’Agence France Presse (AFP). Des manifestants ont ensuite tenté de s’en prendre aux forces de l’ordre avant de reprendre la route du village. « La manifestation a été contenue. Le dispositif mis en place a permis d’éviter de graves incidents avec des manifestants décidés à en découdre », a déclaré la préfète de la Meuse, Muriel Nguyen. « Il n’y a pas de blessé à déplorer de part et d’autre ni d’incident grave », a-t-elle ajouté. Une personne a été placée en garde en vue pour avoir tenté d’entrer dans le bois. « On reviendra. Nous savions bien qu’on ne pourrait pas passer aujourd’hui », a déclaré à l’AFP, sous couvert d’anonymat, une opposante. Le bois Lejuc a été retenu par l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) pour y procéder à des forages exploratoires avant de déposer une demande d’autorisation formelle de création du site de stockage des déchets nucléaires, dans le cadre du projet baptisé Cigéo. Cette forêt, occupée par une quinzaine d’opposants, avait été évacuée le 22 février lors d’une importante opération policière. Malgré une interdiction préfectorale de manifester devant le risque de « troubles graves à l’ordre public », les opposants au projet Cigéo – qui vise à enfouir à 500 m sous terre les déchets les plus radioactifs du parc nucléaire français – ont décidé de maintenir ce week-end un rassemblement prévu depuis le début de l’année. Le rassemblement s’est déroulé au début dans le calme, avec une marche d’environ 300 personnes, selon la police, entre Bure et Mandres-enBarrois, et la tenue de réunions et débats à huis clos entre différents comités d’opposants.
“Occupation symbolique”
« Au vu du dispositif militaire déployé pour entraver la tenue de ces rencontres, nous dénonçons la stratégie de la tension mise en place par les autorités et redoutons les conséquences d’une répression qui semble d’ores et déjà planifiée », a dénoncé le Réseau Sortir du Nucléaire. Il y a une semaine, l’évacuation du bois Lejuc avait été décidée pour éviter que les opposants ne mènent à bien tout projet d’installer des constructions en dur dans le bois, ce qui l’aurait transformé en Zad (»zone à défendre»), comme à Notre-Damedes-Landes en Loire-Atlantique. « Ce n’était pas une Zad, c’était une occupation symbolique. La Zad, si elle se fait, c’est le gouvernement qui l’aura créée par son changement de discours », a critiqué, hier, Jean-Marc Fleury, président de l’association des élus opposés à l’enfouissement des déchets radioactifs. Le site de Bure a été choisi en 1998 pour accueillir un laboratoire souterrain qui doit préparer l’enfouissement à 500 mètres sous terre des déchets nucléaires les plus radioactifs ou à vie longue du parc français. Les opposants au projet Cigéo ont prévu de poursuivre leur rassemblement aujourd’hui, «apriori» sans nouvelle tentative de pénétrer dans le bois Lejuc.